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ANNEES : 2001/2002/2003
Pour une nouvelle politique d’opposition. Ni aventurisme, ni exclusion
Les élections présidentielles sont terminées. Dans les conditions institutionnelles et organisationnelles du scrutin, il était évident que le candidat du régime serait proclamé vainqueur même s’il n’a eu qu’une seule voix, la sienne. Aussi, les résultats proclamés n’ont-ils rien de surprenant.
Les candidats des partis d’opposition qui avaient tenu à participer à la mascarade électorale dans ces conditions ont certainement obtenu ce qu’ils voulaient à travers leur participation. Mais comme on pouvait s’y attendre, le régime despotique est sorti des urnes, égal à lui-même et plus hargneux que jamais. L’avenir du pays est toujours sombre.
Ce que les résultats proclamés ont de bon, c’est qu’ils invitent tous ceux qui veulent la fin du régime de dictature à tirer de la mascarade les leçons qui s’imposent. Elles sont nombreuses et riches d’enseignement pour la poursuite de la lutte pour la démocratisation du système politique au Togo.
La lutte ouvertement engagée le 5 octobre pour les libertés démocratiques est une lutte juste et légitime. Parce que la résistance à l’oppression est un droit naturel et un devoir civique. Quels que soient leur caractère aberrant, les résultats de la mascarade électorale ne doivent pas pousser au découragement et à la résignation. La lutte pour la fin d’un régime d’oppression est une lutte longue et difficile. Mais elle peut aboutir bien plus rapidement qu’on le pense si tous ceux qui veulent vraiment le changement démocratique s’y impliquent véritablement et apportent chacun sa contribution.
L’opposition, ce n’est pas quelques leaders; ce n’est pas quelques partis se réclamant de l’opposition; ce n’est pas quelques hommes et quelques femmes. Il n’y a pas les opposants et les autres. Il n’y a pas l’opposition à part et la masse de la population opprimée. L’opposition, c’est tous ceux qui subissent l’oppression d’une façon ou d’une autre et qui veulent donc la fin du régime de dictature pour que le changement démocratique soit possible.
Si pendant 12 ans l’opposition togolaise n’est pas arrivée à mettre fin au régime d’oppression et à réaliser le changement démocratique, c’est parce que la politique d’opposition dominante conduite depuis la conférence nationale par la tendance dominante de l’opposition n’est pas une bonne politique d’opposition. La possibilité même de la mascarade électorale et la participation des partis d’opposition participationnistes sont des preuves supplémentaires de la faillite de la politique d’opposition dominante.
La CDPA-BT réaffirme une fois de plus que l’opposition togolaise peut venir à bout du régime d’oppression et instaurer un système politique démocratique dans le pays et qu’elle peut le faire plus vite qu’il ne paraît. Mais à une condition: il faut avoir le courage d’abandonner la politique d’opposition dominante qui a fait faillite pour définir et mener une nouvelle politique d’opposition plus cohérente. Cette politique alternative d’opposition implique forcément l’émergence d’une force alternative d’opposition.
En conséquence, la CDPA-BT recommande à tous ses membres de poursuivre sans relâche et dans la sérénité les actions engagées pour permettre l’émergence de la force alternative d’opposition. Elle demande à tous ses sympathisants et, au-delà, à tous ceux qui veulent le changement démocratique d’apporter chacun sa contribution aux actions en cours pour l’émergence rapide de la force alternative d’opposition.
Fait à Lomé, le 9 juin 2003
Pour la CDPA-BT
Le Premier Secrétaire
Prof. E. Gu-Konu
Après le vote du 1er juin, poursuivre la lutte pour la démocratie sur des bases nouvelles
Les Togolais vont aller voter demain dimanche le 1er juin pour élire un président de la république. Quel que soit l’optimisme affiché pendant la campagne électorale, chacun de l’immense masse de ceux qui font partie de l’opposition au régime en place s’interroge sur la portée réelle de ce qu’il va faire demain. Dans une de ses interventions au cours de la campagne, le Secrétaire générale de l’UFC avait dit qu’ils savent ce qu’ils vont mettre dans les urnes mais qu’ils ne savent pas ce qu’il en sortira (sic). C’est exact. A ceci près que chacun de ceux qui vont mettre un bulletin de vote dans une urne demain, y compris les candidats opposants savent que l’immense majorité des Togolais, y compris dans le camp du RPT, voteront contre Eyadema s’ils le peuvent, mais que le régime proclamera son candidat vainqueur, sauf s’il se produit un miracle!
Le régime a fait venir ses observateurs. 187 au total. Des Américains, des Canadiens, des Allemands, des Français, des Africains, y compris ceux de la Francophonie et autres organisations internationales. L’Union européenne et les Nations Unies ont refusé de s’impliquer dans la mascarade. Il faudrait d’ailleurs voir ce que coûtent ces observateurs pour le pays. Interrogés hier nuit par la télévision togolaise, certains des observateurs (un Canadien, un Allemand et un Africain) ont déclaré tout de go et visiblement satisfaits d’eux-mêmes qu’ils ont été impressionnés par le bon déroulement de la campagne, que l’opposition y a participé et s’est exprimée avec une grande liberté, que le processus est très transparent, que la démocratie est très vivante au Togo… Ces observateurs n’ont certainement pas remarqué, entre autres exemples, que le temps de couverture des meetings par la télévision du pouvoir est à chaque fois bien plus long pour le candidat du régime que pour les autres candidats, que la qualité de la présentation des images est infiniment plus élevé que celui des autres candidats, que tout au long de la campagne, les discours du candidat du pouvoir et de ceux qui l’accompagnent sont émaillés de propos injurieux et de menaces voilées ou ouvertes tendant à intimider et à peser sur le choix des électeurs… Les observateurs ne sont pas certainement invités pour apprécier si les élections sont justes et équitables ou non… Dans tous les cas, ils ont visiblement commencé à donner à l’opinion un avant-goût de ce qu’ils vont lui servir après le vote.
Après avoir traité les candidats de l’opposition de la manière dont ils les ont traité tout au long de la campagne, après avoir dénoncé la « conférence nationale dite souveraine », stigmatisé « la grève générale dite illimitée et non négociable », traité le mouvement d’opposition de désordre et d’anarchie, après avoir proféré des menaces de toutes sortes, le candidat du régime a proclamé hier sa volonté de mettre en place un gouvernement d’union nationale et d’instaurer une « démocratie apaisée ». Après 36 années de déchirements et d’exclusions, d’exactions et de brimades, le pays a bien besoin d’un gouvernement d’union nationale. Mais on sait qu’un gouvernement d’unité nationale est incompatible avec un régime totalitaire à pouvoir personnel. Et l’on sait que ce que veut le peuple togolais n’est pas la « démocratie apaisée » mais une démocratie pacifique fondée sur le respect des libertés essentielles, des droits de l’homme et de la dignité humaine. Seule, une démocratie pacifique peut permettre le développement et l’amélioration des conditions de vie de la grande masse des Togolais.
De la même manière que le dialogue inter-togolais avait en fin de compte permis au régime de renforcer ses bases antidémocratiques, de la même manière, la participation des partis d’opposition participationnistes à ces élections antidémocratiques va permettre au régime et ses soutiens extérieurs de faire passer ces élections pour des élections démocratiques afin de donner une nouvelle crédibilité au régime de dictature. Chacun des 3 200 000 électeurs qui va mettre demain un bulletin de vote dans une urne demain doit garder cela à l’esprit en sortant du bureau de vote.
La CDPA-BT réaffirme donc ses positions au sujet du scrutin. Elle réaffirme que, sauf accident, la dictature actuelle se maintiendra à partir du 2 juin, au mieux sous la forme d’une « démocratie apaisée ». En conséquence, elle demande aux masses populaires togolaises de ne pas se laisser décourager par le résultat de ces élections, mais de se mettre au contraire en mesure de poursuivre la lutte pour la fin du régime de dictature. Elle insiste sur la nécessité de l’émergence d’une force alternative d’opposition pour une nouvelle politique d’opposition au cours des cinq prochaines années. Elle exhorte chaque Togolaise et chaque Togolais qui veut vraiment la fin du régime de dictature de se considérer comme un citoyen concerné par la nouvelle politique d’opposition et de se déterminer à contribuer activement à sa conduite et à son succès. La CDPA-BT croit dans un avenir démocratique pour le pays.
Fait à Lomé, le 31 mai 2003
Pour la CDPA-BT
Le Premier Secrétaire
Prof. E. Gu-Konu
Échos de la campagne électorale: 26.05.03 au 30.05.03
La campagne électorale se termine ce vendredi 30 mai. Nous avions donné un aperçu de la campagne au cours des dix premiers jours. Comme il fallait s’y attendre, il ne s’est rien passé de grave qui puisse empêcher le déroulement des élections au cours de ces derniers jours. Le contraire eut été surprenant. Le régime et les candidats des partis d’opposition participationnistes ont intérêt que le processus se déroule jusqu’au bout sans incident grave.
1- Le candidat de la CDPA s’est retiré de la campagne au profit de l’UFC. Ce n’est pas surprenant. Il estime après les dix jours de campagne que c’est le candidat du PFC-UFC qui est le mieux placé dans la course. Dans l’après-midi, des militants de l’UFC sont allés danser au siège de la CDPA pour remercier ce parti du geste de son candidat.
2- Dans son meeting du mardi 27 mai, le candidat indépendant Nicolas Lawson s’en est violemment pris au slogan d’Ablode que le candidat du PFC-UFC utilise comme slogan d’animation de ses réunions de campagne. Nicolas est visiblement excédé par ce mot d’ordre qu’il n’a pas pu se contenir. Il estime que ce slogan est dépassé.
C’est vrai qu’il a tort parce que les Togolais sont toujours sous l’oppression et ont besoin de se libérer pour pouvoir procéder au développement du pays.
3- Dans sa tournée dans la Région des plateaux, le candidat du CAR, pour sa part s’en est pris au « Detia » mais très gentiment qu’au fond, le « detia » c’est lui et non pas d’autres. Car, a-t-il fait comprendre, c’est lui qui a le premier parlé du « detia » parce que, a-t-il expliqué, c’est grâce à lui que l’on peut librement fabriquer le sodabi (Rhum distillé à partir du vin de palme) dans le pays. Pour fabriquer le sodabi, il faut naturellement abattre les palmiers!
Le candidat du CAR a probablement commis une erreur : la majorité de l’électorat ne sachant pas lire mais capable de reconnaître l’image du palmier sur le bulletin unique… Agboyibo risque bien de faire de la propagande gratuite pour son concurrent Bob Akitani. Un juste retour des choses?
4- Le même candidat du CAR continue de se poser en intercesseur. Expliquons: comme dit-on, Gilchrist Olympio et Eyadema ne peuvent naturellement pas s’entendre et éventuellement cohabiter pacifiquement et qu’ils sont ainsi la source des malheurs du peuple, il faut un intercesseur pour sortir le pays du tunnel. Cet intercesseur, c’est moi Agboyibo.
La CPP a tenu le même discours au marché d’Adéta: Quand deux personnes se querellent pour la même chose, il faut choisir un troisième qui est capable de faire la paix. Ce troisième, c’est le candidat de la CPP.
5- Le candidat du RPT a continué sur sa lancée sur le thème de la paix et de la sécurité en dénonçant pêle-mêle la conférence nationale, la grève générale, les partis d’opposition… Au fur et à mesure du déroulement de la campagne, l’affrontement apparaît clairement entre l’UFC et le RPT, avec des risques de clash à Lomé, mais sans incident grave jusqu’à présent tout au moins.
Le jeudi 29 mai dans l’après-midi, il y eu un début d’affrontement entre les militants du PFC-UFC et ceux du RPT sur le terrain de jeu des cheminots au cours d’un meeting des militants PFC-UFC. Les forces de sécurité auraient jeté des grenades lacrymogènes pour disperser les manifestants.
Il est évident que l’immense majorité des électeurs ne votera pas pour le candidat du régime mais…
6- Le régime met tout en œuvre pour créer une psychose de la peur dans le pays. On n’arrête pas de parler de mercenaires massés sur la frontière Togo-Ghana. Et on n’arrête pas de soumettre les populations frontalières des régions de Bassar à des tracasseries inutiles.
C’est dans ce cadre qu’il faut placer l’accord que vient de signer le régime avec le gouvernement de Kufor le 27 mai dernier et qui concerne la sécurité sur la frontière séparant les deux pays. Le point 5 des dispositions de l’accord est le contrôle et la surveillance des réfugiés dans les deux pays. Tout laisse penser que cet accord est signé sous l’instigation du régime togolais et qu’il vise essentiellement les exilés togolais réfugiés au Ghana. Des dispositifs de sécurité et de combat sont mis en place le long de la frontière Togo-Ghana. On dirait que le régime s’attend à un combat. Mais contre qui…?
7- Cet après-midi du 30 mai, le candidat du PFC-UFC a fait un effort extraordinaire de mobilisation populaire pour le vote du 1er juin. Les militants de l’UFC manifestent dans les rues dans presque tous les quartiers de Lomé. On ne sait pas si ces manifestations vont se poursuivre dans la nuit.
Répondant à une question d’un journal à son éventuel désistement au profit de Bob Akitani comme l’a fait le candidat de la CDPA, le candidat de la CPP déclare que c’est plutôt Bob Akitani qui doit se retirer en sa faveur.
8- Enfin, ce 30 mai 2003, qui est le dernier jour de la campagne, tous les candidats ont donc envahi Lome, chacun s’efforçant d’exploiter au mieux possible les dernières heures de la campagne. La journée s’est passée apparemment sans incident, du moins à Lomé. Tout laisse penser que rien de vraiment grave ne se produira d’ici minuit, sauf si le régime lui-même créé un incident pour l’exploiter à des fins faciles à deviner. Mais le régime n’a aucun intérêt à vraiment provoquer des troubles. Ayant pris les dispositions que l’on sait pour la réélection automatique de son candidat, il est tenu de faire en sorte que le processus électoral aille jusqu’au bout, et pour que ces élections pipées d’avance aient l’apparence d’élections propres.
Fait à Lomé, le 30 mai 2003
Pour la CDPA-BT
Le Premier Secrétaire
Prof. E. Gu-Konu
Au-delà de la campagne électorale
Qu’on le veuille ou non, il faudra se résoudre à reconnaître l’existence de deux courants politiques au sein de l’opposition togolaise. Ces deux courants existaient dès avant la conférence nationale. La tendance trop facile à considérer l’opposition comme un tout cohérent, une « famille » unie ou qui doit l’être impérativement, n’avait pas permis de distinguer ces deux courants politiques dans la grande confusion qui accompagnait alors la pratique politique des responsables des partis d’opposition. Ces courants se sont cependant affirmés progressivement depuis la fin de la conférence nationale. Elles s’imposent aujourd’hui au point qu’on ne peut plus se permettre de les ignorer ou de feindre de les méconnaître. On ne peut plus continuer de considérer l’opposition comme un tout uni. On ne peut plus continuer de mettre tout le monde dans le même sac. C’est trop facile. La lutte pour la démocratie ne peut jamais atteindre son objectif si l’on continue de naviguer dans la confusion.
Le premier courant politique estime que la lutte pour la fin du régime de dictature passe par le remplacement d’Eyadema à la tête de l’Etat par un leader charismatique à travers une course concurrentielle des chefs des partis d’opposition entre eux pour le pouvoir. Il fait de la prise individuelle ou partisane du pouvoir l’objectif premier de la lutte pour la démocratisation. Par impuissance faute d’une organisation suffisante, et donc par incapacité, ce courant avait choisi la voie électorale. En conséquence, il a horreur du boycott. Et il est prêt à aller aux élections quelles qu’en soient les conditions. Cette désorientation de la lutte est le point de départ de l’échec de la politique d’opposition dominante à mettre fin au régime de dictature et à réaliser la démocratisation.
Le second courant estime qu’il faut d’abord mettre un terme au régime despotique avant de s’engager dans la compétition pour le pouvoir par les élections. Et pour arriver à mettre fin au régime, il faut commencer par transformer la masse de la population en une force organisée, capable d’exercer à tout moment une pression politique cohérente et efficace. C’est en ce sens que ce courant parle de mobilisation responsable, et dans le cas spécifique de notre pays, de remobilisation responsable. Il estime que les élections sans cette remobilisation responsable n’ont aucun sens dans le régime de dictature qui gouverne le pays depuis près de quatre décennies. Car, elles n’ont aucune chance d’être libres, transparentes et équitables. Le pouvoir en place a tous les moyens possibles pour détourner leurs résultats à son profit. L’expérience des législatives de 1994 et celle des présidentielles de 1998 le prouvent suffisamment.
Le premier courant constitue le courant majoritaire. Il réunit aujourd’hui la quasi-totalité des partis d’opposition : l’ADDI, le CAR, la CDPA, la CPP, l’UDS-Togo, l’UFC. Ce sont ces partis qui se sont regroupés au sein de la CFD, y compris l’UFC. L’UFC, le CAR, la CDPA et la CPP y représentent les partis dominants. Leurs responsables ont occupé le devant de la scène depuis la conférence nationale. Ce sont eux qui ont conduit la politique d’opposition dominante depuis ce moment jusqu’aujourd’hui. Et ce sont eux qui appellent aujourd’hui la population à se rendre massivement aux élections dans les conditions imposées par le régime despotique, et qui y vont eux-mêmes en rang dispersé, chacun étant persuadé qu’il est l’homme prédestiné pour réaliser le changement. On convient aujourd’hui, après 12 ans de lutte, que la politique d’opposition dominante conduite par ce courant majoritaire a fait faillite et qu’elle appelle désormais une politique alternative d’opposition.
Le second courant est représenté par la CDPA-BT et le Parti des Travailleurs. Ces deux partis n’approuvent pas la politique d’opposition dominante et n’y participent pas. Ils ne sont pas membres de la CFD dont la CDPA-BT avait déjà dit qu’elle n’irait pas loin. La CDPA-BT en particulier estime que les partis d’opposition doivent s’organiser ensemble pour mobiliser la population afin de faire émerger une force politique capable de faire pression sur le régime pour l’abrogation des lois de modification de la constitution et du code électoral. Et qu’à défaut d’un consensus pour mener ensemble cette action, les partis qui n’approuvent pas la politique d’opposition dominante doivent s’organiser pour l’entreprendre. Car, accepter d’aller aux élections dans les conditions imposées par le régime, c’est accepter de fait la modification de la constitution, celle du code électoral et tout le reste. C’est faire le jeu du régime.
Les lois scélérates et toutes les autres décisions arbitraires récentes du régime offrent une occasion inespérée à l’opposition pour engager la remobilisation responsable qui s’impose. Car, elles constituent des éléments de poids sur lesquelles les partis d’opposition peuvent fonder l’action en direction de la masse de la population.
Ceux qui vont voter le 1er juin doivent garder à l’esprit ces deux tendances au sein de l’opposition et les positions de chacune d’entre elles. Et il ne faut surtout pas les oublier au lendemain des élections. Parce que la lutte pour la fin du régime doit continuer après le 1er juin.
Contrairement à ce que l’on affirme de toute part avec tant d’hypocrisie et de démagogie, les élections du 1er juin ne vont pas régler le problème posé par le peuple le 5 octobre 1990. Rappelons qu’il s’agissait, avant toutes choses, de mettre fin au régime de dictature et d’instaurer les libertés démocratiques dans le pays pour y permettre le développement et le progrès social. Les élections présidentielles ne règleront pas ce problème. Au mieux, le pays sera confronté au lendemain du 1er juin à un régime dit de « démocratie apaisée » sous couvert duquel le vieux régime RPT continuera de garder la réalité du pouvoir. Le changement tant souhaité n’aura pas lieu. Au pire, le pays continuera d’être soumis à la même dictature, avec les mêmes pratiques politiques, des conditions de vie de plus en plus difficiles pour la grande masse de la population et une capacité d’oppression et de répression croissante.
La décision des chefs de partis d’opposition d’aller aux présidentielles dans les conditions inadmissibles imposées par le régime participe à la politique d’opposition dominante conduite pendant 12 ans par la tendance majoritaire actuelle de l’opposition. Cette participation est une preuve supplémentaire de l’échec de la politique dominante d’opposition conduite jusqu’à présent.
Depuis l’enterrement du fameux « dialogue inter-togolais », la lutte pour la démocratie dans notre pays était arrivée à un tournant décisif où il faut impérativement mettre en œuvre une force alternative d’opposition pour conduire une politique alternative d’opposition. C’est à l’émergence de cette force que la CDPA-BT travaille. Et elle invite tous ceux qui croient encore à un avenir possible pour le pays d’apporter leur contribution pour la réalisation commune et pour l’efficacité de ce travail. Car, du moment que les présidentielles de juin 2003 ne sont pas de nature à apporter au peuple la solution aux problèmes qui l’a poussé dans la rue le 5 octobre 1990, il faudra bien que la lutte pour la fin du régime de dictature continue.
Fait à Lomé, le 28 mai 2003
Pour la CDPA-BT
Le Premier Secrétaire
Prof. E. Gu-Konu
Échos des dix premiers jours de la campagne électorale
1- La campagne électorale a commencé depuis le 15 mai à minuit. Comme on le sait et comme on devrait s’y attendre, la candidature de Gilchrist Olympio est rejetée par la CENI et par la cour constitutionnelle. Mais il ne s’est rien passé contrairement aux déclarations et aux menaces antérieures du chef de l’UFC. Un début d’incendie de la boutique d’une station Total à Bè et une tentative pour en incendier une autres dans le même quartier. Les quatre jeunes appréhendés et présentés à la télévision n’ont mis en cause aucun parti politique. Le régime a pourtant tenté d’imputer le fait à l’UFC. Les déclarations antérieures de Gilchrist et les rumeurs qui circulaient à Lomé indiquaient tout naturellement l’UFC et d’autres partis d’opposition comme auteurs de ces faits. Patrick Lawson et quelques jeunes de la Nouvelle Dynamique Populaire (NDP) furent donc interpellés le 7 mai puis relâchés. Le 11 mai, J-P Fabre fut interpellé à son tour puis relâché le lendemain. L’enquête est supposée en cours. Mais l’hypothèse selon laquelle le régime lui même serait le commanditaire de ces actes n’est pas à exclure.
2- Pour contourner le rejet de la candidature d’Olympio, l’UFC a présenté un candidat de substitution en la personne du premier vice-président du parti, mais sous la bannière du PFC, parti des forces du changement. Dans les faits, Bob Akitani est donc en campagne pour le compte de l’UFC. Il est en somme un candidat de substitution de Gilchrist Olympio. Les modalités de la désignation de Akitani comme candidat du PFC ont fait des mécontents au sein de l’UFC. Et on peut comprendre.
3- Dès le 16 mai, tous les candidats se sont mis en campagne tambour battant. Au total, 8 candidats dont Lawson, un candidat indépendant, Eyadema pour le compte du RPT et les 5 candidats de l’opposition, y compris le rénovateur du RPT, Dahuku Pere. Parce que les chefs des partis d’opposition en lice, notamment ceux de la CFD ont été incapables de se mettre d’accord sur l’un d’entre eux pour en faire le candidat unique dont il a été tant question, et que chacun d’entre eux tient à aller aux élections pour son propre compte, le candidat du RPT se trouve en face de 5 candidats opposants qui rivalisent pour s’éliminer réciproquement. Cette situation met bien entendu Eyadema et le régime en position de force, et la population dans l’embarras. Elle renforce les conditions de la « réélection » automatique d’Eyadema.
4- Le candidat de la CPP a commencé sa campagne dans le nord du pays. Il est descendu de Dapaon et a tenu son dernier meeting à Bassar vendredi le 23 mai. Dans l’ensemble, les autres candidats ont tourné jusqu’à présent dans la partie méridionale du pays, en particulier à Lomé et dans le Yoto.
5- Eyadema a fait son premier meeting à Kpalime le 21 mai. La veille, un détachement militaire fut envoyé dans la ville : Deux chars équipés de canons et précédés de deux motards de la garde présidentielle, une dizaine de camions militaires et quelques jeeps de commandement. Les motards ouvraient le chemin et exigeaient des automobilistes de dégager la voie. Pris de peur, les chauffeurs des transports en commun et autres véhicules ne se faisaient pas prier pour se mettre sur le bas coté de la voie afin de laisser passer le convoi militaire. Le régime s’est arrangé pour bien mettre en évidence ce convoi militaire. Est-ce qu’il en sera ainsi pendant toute la campagne du candidat du RPT ? Bien entendu, les autres candidat n’ont pas eu droit ni à des chars, ni à des canons, ni à des détachements militaires… C’est sûrement ce qui s’appelle « des élections justes et équitables ». Aucun des candidats opposants n’a émis la moindre protestation.
6- Les candidats ont encore utilisé leurs temps de parole à la télévision ce 24 mai. Le discours reste toujours désespérément celui d’une campagne électorale classique. Comme si l’on était dans une situation normale, comme si les candidats opposants avaient en face d’eux un candidat concurrent normal et un parti adverse normal. A aucun moment, les candidats opposants n’ont parlé de régime de dictature auquel il faut mettre fin, ni de la réécriture de la constitution, ni de la modification du code électorale, ni de l’absence de représentants de l’opposition dans les CELI et les bureaux de vote. Tout se passe comme si le 5 octobre n’avait jamais existé. En fin de compte, le discours se réduit à votez massivement et « votez utile », sous entendu votez massivement pour moi et je ferai ce qu’il faut.
7- C’est encore Eyadema et les siens qui parleront sans arrêt du 5 octobre, naturellement dans le sens qu’on devine sans peine. Dans son meeting de Kpalime le 21 mai, le candidat du RPT s’est fait menaçant et méprisant : Le 5 octobre, c’est l’anarchie, c’est le désordre… A Badou et à Atakpamé, il a durcit le ton et a proféré des menaces encore plus ouvertes : l’anarchie, le désordre, c’est fini ! L’armée ne se laissera pas provoquer… ! Il a parlé d’aventuriers et ses directeurs de campagnes de terroristes… Les mêmes menaces et les mêmes mises en garde qui seront servies à Notse et à Tsevie le 23 mai.
Ce discours va-t-en guerre fait comprendre la fonction de ces chars, de ces canons, de ces motars, de ces détachements militaires qui avaient précédé le candidat du régime à son meeting de Kpalime. Il s’agit ni plus ni moins d’une démonstration de force pour terroriser la population et obliger ceux qui vont aux urnes à voter dans le sens qu’il faut.
Le discours du candidat du RPT montre ainsi que le régime n’a rien compris de ce qui s’est passé le 5 octobre, rien compris des aspirations ardentes aux libertés démocratiques qui ont poussé le peuple dans la rue ce 5 octobre et les mois suivants.
8- Toutefois, aucun incident grave ne s’est encore passé pendant ces dix jours de campagne. Le mercredi 21 mai, tous les candidats des partis d’opposition se sont plaints à l’unisson de l’inégal traitement auquel se sont livrés les médias publics à leur égard : discours non diffusés, passages coupés, propos tronqués etc… La Haute Autorité de l’Audio-visuel et de la Communication (HAAC) s’est contentée de prendre acte, mais a ensuite organisé une conférence de presse pour réfuter les allégations des plaignants en les accusant de n’avoir pas respecté les dispositions réglementaires en vigueur : éviter les propos injurieux, ne pas diffamer des autres candidats, ne pas proférer de menaces etc… Ce que n’arrête d’ailleurs pas de faire le candidat du régime dans ses meetings à l’égard des candidats opposants régulièrement traités d’aventuriers, de terroristes, de fauteurs de troubles…
Mais tout le monde, y compris nos candidats opposants, savent bien que la HAAC est un instrument du pouvoir. Cette institution peut-elle donc tenir une autre attitude sans aller à l’encontre des règles inadmissibles du « jeu des élections présidentielles », règles qu’ils ont accepté de fait en acceptant d’aller aux élections dans les conditions imposées par le régime pour que son candidat ressort des urnes égal à lui-même.
9- Pere Dahuku et ses amis du Pacte socialiste pour le Renouveau (PSR) se sont plaints le 23 mai d’avoir été victimes d’agressions de la part des jeunes du RPT. Et de fait, il y aurait eu effectivement des echauffourés entre les deux groupes lors du passage de Pere à l’Université.
Ce sont des choses auxquelles il fallait s’attendre. Dahuku Pere a été exclu du RPT pour ce que l’on sait. Mais il continue de se réclamer de ce parti qu’il ambitionne rénover un jour. Ne pouvant cependant pas se faire investir candidat par le parti dont il se réclame, il a emprunté la couverture du PSR dont il n’est pas membre, en comptant sur les mécontents du RPT pour se faire élire. Le clash est inévitable. Aussitôt après les plaintes du PSR, les jeunes du RPT ont fait un long communiqué pour reprocher à Pere de vouloir débaucher les membres du RPT à son profit et pour le mettre en garde.
10- A part ces incidents, rien de vraiment grave de nature à perturber la campagne. Cela ne veut pas dire qu’elle se déroule sans problèmes comme le candidat Kodjo l’a laissé croire hier le 23 mai dans le point de presse qu’il a fait sur la campagne du Coq dans le nord du pays. Si lui a pu aller faire ses meetings dans la partie septentrionale du pays sans se faire agresser, il n’est pas du tout certain que tous les autres candidats de l’opposition pourraient le faire sans problèmes.
11- Mais dans cette campagne électorale si ambiguë, le régime et les candidats de l’opposition ont tous les deux intérêt à ce que les choses se passent bien.
Le régime tient à donner une apparence démocratique à ces élections antidémocratiques pour pouvoir obtenir l’appui de la communauté internationale si l’opposition venait à mettre en cause la régularité du processus électoral et des résultats du scrutin, et pour que l’UE reprenne sa coopération financière avec Eyadema sans être gênée aux entournures. Le régime n’a donc pas intérêt à pousser trop le bouchon au risque de voir la campagne péter. Juste assez de menaces pour faire peur aux Togolais et paraître ferme et décidé à tout aux yeux de l’opinion étrangère. On sait que quelques puissances de la Communauté internationale aiment ça pour un président africain.
Ce que voulaient les candidats de l’opposition en se présentant individuellement n’est pas de battre Eyadema mais de se mesurer entre eux, chacun visant à prouver après le décompte des voix qu’il est le leader le plus grand, que son parti est le plus grand, et qu’il doit donc être le seul interlocuteur d’Eyadema au cas où… Les candidats opposants, eux aussi, ont donc intérêt à ce que la campagne se déroule « pacifiquement », et que l’on aille jusqu’au bout du processus électoral sans encombres. Voila pourquoi leur discours et celui du régime se rejoignent si bien dans le fond. Il ne faut donc pas s’attendre à des perturbations majeures dans les jours à venir.
12- Une dernière information importante qu’il convient encore de souligner à la fin de ces dix jours de campagne : Tous les partis d’opposition ne participent pas à ces élections présidentielles. Ceux qui y participent, ce sont l’UFC et les partis membres de la CFD, laquelle CFD qui risque fort d’ailleurs de disparaître au lendemain des élections (parce qu’elle aura terminé ses fonctions).
La CDPA-BT et le Parti des Travailleurs ne participent pas aux élections. La CDPA-BT n’y participe pas, pas seulement parce que les conditions institutionnelles et réglementaires d’organisation du scrutin consacrent une élection automatique d’Eyadema et donc sont inadmissibles. Mais elle n’y participe pas aussi parce que le régime, ses soutiens extérieurs traditionnels et peut-être toute la communauté internationale mettront en avant le fait de la participation de l’opposition ou de quelques partis d’opposition à ces élection pour dire qu’elles sont démocratiques, alors qu’elles ne le sont pas du tout.
Les partis qui participent à ces élections juste pour se mesurer entre eux prennent la lourde responsabilité de rendre la lutte pour la démocratie dans le pays plus difficile à partir du 2 juin.
Fait à Lomé, le 25 mai 2003
Pour la CDPA-BT
Le Premier Secrétaire
Prof. E. Gu-Konu
Les Présidentielles du 1er Juin ne mettront pas fin au régime de dictature
La campagne électorale est ouverte depuis le 15 mai à minuit. Les candidats retenus s’y sont engagés tambour battant. En dépit de ses propres promesses de ne pas toucher à la constitution de 1992 et de se retirer à la fin de son mandat, Eyadema a modifié la constitution pour se présenter à nouveau. Et il a modifié le code électoral pour s’assurer une réélection automatique. Rien de tout cela n’est surprenant. Tout le monde sait que le régime RPT fonctionne depuis des années sur la base du mensonge, de l’hypocrisie et de la manipulation des consciences.
Ce qui fait réellement problème, c’est que tous les partis membres de la CFD, y compris l’UFC, participent à ces élections malgré les conditions inadmissibles de son organisation. En plus, ils se sont révélés incapables de se mettre d’accord sur un candidat unique. Du coup, Eyadema se trouve en face d’un conglomérat de cinq candidats de l’opposition qui rivalisent entre eux pour s’éliminer réciproquement.
Bien avant le début de la campagne électorale, les partis membres de la CFD et y compris l’UFC, n’ont pas cessé d’appeler la population à se rendre massivement aux urnes, laissant ainsi croire qu’un vote massif des Togolais suffit pour mettre fin au régime de dictature et permettre l’instauration de la démocratie dans le pays.
En présentant chacun sa candidature à ces élections présidentielles, les leaders de ces partis savaient pourtant bien qu’ils ne donnaient aucune chance à l’opposition de battre Eyadema en allant à ces présidentielles en rang dispersé. Ils avaient néanmoins continué de proclamer qu’ils allaient aux élections pour mettre fin au régime de dictature. Et qu’il faut que les Togolais se rendent massivement aux urnes pour que l’objectif soit atteint.
Par ailleurs les leaders de la CFD avaient sans cesse déclaré qu’ils finiraient par trouver un candidat unique en leur sein. Certains d’entre eux avaient même évoqué des raisons de stratégie électorale et de sécurité pour essayer de calmer les inquiétudes de la population. Et ils continuent de laisser croire jusqu’à présent au miracle des désistements de dernière minute au profit d’un candidat unique de l’opposition.
Mais la population n’est pas dupe. Quand on jette une caution de 20 millions dans la course pour le pouvoir, on ne se retire pas à la dernière minute au profit d’un candidat rival. Sauf évidemment si les 20 millions sont tombés du ciel. Et de fait, le discours a définitivement changé au cours de la campagne. Il apparaît clairement qu’aucun des candidats n’est prêt à s’éclipser pour permettre de dégager un candidat unique. Chacun d’entre eux demande aux électeurs de faire un « vote utile » en pensant bien entendu à lui-même. Et l’on déclare maintenant qu’à partir du moment où il est impossible de dégager un candidat unique, « il revient au peuple de donner son point de vue sur la question », bien entendu par « un vote utile »…
En tant qu’opposants à un régime de dictature qui érige le mensonge et la manipulation des consciences en méthode de gouvernement, nous avons le devoir de dire la vérité au peuple.
Dans les conditions institutionnelles et réglementaires d’organisation de ces élections présidentielles, le problème de la candidature unique se révèle d’ailleurs un faux problème et le débat sur la question une diversion. Si même le miracle s’était produit, même si les cinq candidats de l’opposition (y compris le rénovateur du RPT) venaient à trouver un candidat unique la veille du scrutin, le problème fondamental de la fin du régime de dictature ne sera pas résolu pour autant. Les conditions d’organisation des élections ont aggravé le rapport des forces aux dépens de l’opposition en assurant une réélection automatique du candidat du régime. En d’autres termes, candidat unique ou pas, Eyadema sortira de ses urnes, égal à lui-même comme en 1993 et comme en 1998.
Dans ces conditions, comme elle l’avait déjà dit, la CDPA-BT maintien son mot d’ordre de boycott de ces élections présidentielles. Elle demande à ses membres de ne pas y participer. Pas seulement parce le scrutin n’a pas de sens quant à la nécessité de mettre un terme au régime de dictature. Mais aussi parce qu’il présage de graves conséquences pour l’avenir de la lutte en cours pour la démocratie au Togo. On reviendra sur ces conséquences.
Les Togolais qui auront choisi d’aller à ces élections sont naturellement libres de le faire. Mais ils doivent avoir à l’esprit le fait qu’en raison des conditions inadmissibles dans lesquelles elles sont organisées, Eyadema ressortira une fois encore des urnes égal à lui-même. Cela veut dire que le régime de dictature se maintiendra après le 1er juin. Et qu’en conséquence la lutte pour la fin de ce régime devra se poursuivre afin de créer les conditions de l’instauration de la démocratie dans le pays.
Fait à Lomé, le 20 mai 2003
Pour la CDPA-BT
Le Premier Secrétaire
Prof. E. Gu-Konu
LA CDPA-BT: LE TEMPS DE PARLER
(Convention Démocratique des Peuples Africains – Branche Togolaise (CDPA-BT), https://www.cdpa-bt.com, Lomé, Togo, 18 avril 2003)
On se souvient que la CDPA-BT s’était retirée de la CFD. L’UFC s’en retirera à son tour quelques mois plus tard. La CDPA-BT avait estimé que les rivalités de leadership ne permettraient pas à la coalition d’aller loin ; qu’elle n’arriverait donc pas à répondre aux attentes réelles de la population, et que, par ses contradictions, elle accentuerait au contraire le désarroi et le découragement parmi ceux qui veulent la fin du régime.
Depuis cette date, notre parti s’est abstenue jusqu’à présent d’intervenir dans le débat sur la CFD. Mais comme malheureusement l’évolution de l’organisation n’a pas démenti nos prévisions, le Bureau Exécutif National du parti estime que le moment est venu de rompre le silence pour contribuer au débat sur l’organisation. Il faut mettre l’opinion en mesure de juger en toute connaissance de cause afin qu’elle parvienne à adopter des attitudes positives au regard de la lutte en cours contre le régime de dictature et pour la démocratie.
Il faut reconnaître que les Togolais ne sont pas informés sur les conditions de la création de la CFD. Rares sont en effet ceux qui peuvent affirmer en toute sincérité savoir pourquoi et comment cette nouvelle structure de l’opposition est née. La remarque n’est pas valable seulement pour l’homme de la rue. Elle l’est également pour nombre de ceux qui sont sensés outillés pour suivre l’évolution de la situation politique. Et paradoxalement, l’est pour les journalistes dans leur quasi-totalité. A l’exception d’un malheureux article, qui ne fut d’ailleurs qu’un reflet de la guerre de leadership qui a miné l’opposition jusqu’à présent, la presse dite d’opposition n’a rien dit des discussions qui ont conduit à la naissance de la CFD. Aucun journal n’a parlé par exemple de l’incident provoqué par Mr Gnininvi le 14 octobre et qui a été à l’origine de tout le processus. Aucun journal n’a évoqué l’idée, avancée par la CDPA-BT, de la nécessité d’une structure légère afin de mettre un peu d’ordre dans les démarches entreprises à partir du 10 octobre pour mobiliser l’opinion contre la mascarade électorale du 27 octobre 2002. Les propositions de la CPP dans un document non daté, intitulé « Proposition pour la création d’une coalition entre les partis et courants politiques de l’opposition démocratique », n’ont fait l’objet d’aucun commentaire par la presse. Il en est de même du document produit par le « Front » quelques jours plus tard en réaction contre les propositions de la CPP, document daté du 22 octobre 2002, et intitulé « Proposition du front pour la création d’une union forte de l’opposition ». La presse n’a pas été au courant de tout cet enchaînement de faits. Pas seulement parce qu’elle n’avait pas cherché à savoir, mais aussi parce qu’elle avait été tenue à l’écart du processus. Les journalistes invités par mégarde le soir où l’on est sensé annoncer la création de la coalition savent bien ce qui leur est arrivé. La presse ne pouvait donc pas informer. Et quand elle va commencer à parler abondamment de la CFD après la mascarade électorale du 27 octobre, c’est pour présenter cette organisation à l’opinion comme l’ultime planche de salut par laquelle l’opposition allait mettre fin au régime de dictature. Et elle en a fait une institution sacrée devant laquelle tout le monde devra tomber en adoration.
L’opinion doit être informée pour pouvoir suivre l’évolution de la politique d’opposition. Les leaders des partis impliqués dans la conduite de cette politique doivent s’interdire la rétention de l’information pour ne pas contribuer à l’obscurantisme politique dans lequel le régime continue de tenir la population.
La CDPA-BT avait activement participé à ce débat en vase clos qui a conduit à la naissance de la CFD. Quand elle avait ensuite publié un communiqué le 5 novembre 2002 pour annoncer son refus de faire partie de cette organisation, elle avait fait l’objet de vives inimitiés au lieu de susciter un besoin d’en savoir plus. Et cette presse, qui n’est pas au courant du débat ayant conduit à la création de la coalition, a même intimé l’ordre au Premier Secrétaire de « dépasser les cadres vaseux des littératures politiques. » Nous avons tenté d’expliquer notre position avec l’espoir d’instaurer un débat public salutaire sur la CFD pour forcer l’organisation à se tenir droit. Mais nous avons compris qu’il vaut mieux ne pas insister. Le débat démocratique qui clarifie et permet de juger en toute connaissance de cause avant de se déterminer n’est possible que dans certaines circonstances politiques. Il appartient aux partis politiques et à la presse indépendante de contribuer ensemble à la création de ces circonstances pour permettre à notre lutte pour la démocratie d’atteindre ses objectifs. Cela aussi fait partie du changement dont nous parlons.
A la CDPA-BT, nous ne sommes ni heureux, ni fiers de ce qui s’est passé à la CFD depuis que nous avons décidé de ne pas en être membre. Mais cette évolution ne nous surprend pas. Nous nous y attendions, parce que les conditions de la création de la Coalition la rendent inévitable. En intervenant aujourd’hui dans le débat, nous n’avons donc pas l’intention de crier victoire ou de jeter la pierre. Il faut dépassionner le débat pour y voir clair, l’approfondir et l’enrichir. C’est une condition nécessaire pour ne pas passer à coté des vrais problèmes et des vraies solutions par conséquent. Le couple candidature unique/candidature plurielle a pris une place importante dans le débat en cours. La difficulté pour les chefs de ce qui reste de la CFD à trouver un candidat unique en leur sein offre certainement une image lamentable. La question ne devrait plus être aujourd’hui s’il faut une candidature unique ou une candidature plurielle face au pouvoir. Si l’on admet que c’est par des élections que l’on mettra fin au régime de dictature, le bon sens recommande alors que l’opposition se donne un candidat unique. Dans les conditions spécifiques de la transition démocratique togolaise, l’opposition aurait dû opter déjà depuis 1993 pour la candidature unique. Et s’y tenir tant qu’elle aura le régime despotique en face. Car les conditions politiques ne se sont pas améliorées. Elles ont sans cesse empiré.
En 1993, des partis d’opposition avaient défendu à juste titre la candidature unique avant de se retrouver aux « dialogues » de Ouaga. Et quand ils ont constaté dans la capitale burkinabe qu’ils n’ont aucune chance d’être ce candidat unique de leurs vœux, ils se sont rétractés et se sont mis à prêcher la candidature plurielle. Ce sont les mêmes contradictions que nous voyons aujourd’hui. Et ce n’est pas beau. Mais si ceux qui prônent aujourd’hui la candidature unique n’étaient pas coincées par les lois scélérates qui imposent si arbitrairement le scrutin à un tour, ils n’auraient jamais parlé de candidature unique et seraient tous en train de constituer chacun son dossier pour être candidat. L’envoi de représentants de la CFD à la CENI-RPT, le retrait de l’UFC de la coalition, la candidature de Gilchrist aux présidentielles,… ont fait également l’objet du débat en cours. Ces pratiques ne forment pourtant pas le problème essentiel de l’heure. Parce qu’ils ne sont que les résultats des fondements de la politique dominante d’opposition conduite depuis 1991, et parce que toute la pratique politique repose alors sur le principe de la concurrence entre leaders de l’opposition pour le fauteuil présidentiel tout de suite, il y a vice de forme. Et les problèmes de la démocratisation ne peuvent alors prendre d’autres formes que celles sous lesquelles elles se présentent aujourd’hui. Dans ces conditions, il est inutile de s’attarder à reprocher aux leaders en vue leurs ambitions pour le pouvoir tout de suite. Il ne sert à rien non plus de vitupérer contre Gilchrist Olympio pour sa candidature. Il ne sert à rien de réclamer l’union de l’opposition ou d’exiger des chefs de ce qui reste de la CFD de donner un candidat unique séance tenante. Même s’ils finissent par le faire, ce ne sera pas de bon cœur. Et ils n’hésiteront pas à mettre des peaux de bananes à la première occasion. On se souvient bien de comment les choses se sont passées en 1993.
La politique d’opposition dominante rend logiques tous ces comportements politiques regrettables. Ce qu’il faut donc, c’est changer de politique d’opposition. Il faut avoir le courage d’abandonner la politique d’opposition dominante pour une politique d’opposition alternative qui donne la priorité à la lutte pour la fin du régime de dictature pour créer les conditions d’une véritable alternance au pouvoir.
L’objectif visé par les masses populaires descendues dans les rues le 5 octobre 1990 est de mettre fin au système de dictature pour permettre au peuple togolais de jouir des libertés démocratiques et des avantages de l’Etat de droit comme tous les peuples normaux du monde. La cause n’était pas de créer une occasion pour que des chefs de partis d’opposition s’engagent chacun dans une course concurrentielle pour le pouvoir tout de suite. Entre se battre pour la fin du régime de dictature, et se battre pour accéder au pouvoir, il y a une différence fondamentale. La confusion hypocrite de ces deux objectifs dès avant la conférence nationale est à l’origine des malheurs de l’opposition togolaise. L’enterrement du « dialogue inter togolais » et ses succédanées que sont l’ACL et le CPS, la suppression de la CENI consensuelle, la création du Comité des 7, les élections yoyo du 27 octobre 2002, la modification de la constitution et du code électoral sont autant de raisons pour changer la politique d’opposition conduite jusqu’à présent. La création de la CFD est une occasion rêvée pour faire le pas décisif dans ce sens. Mais avant même de l’avoir créée, on avait fait de la coalition un instrument de la fuite en avant dans la politique d’opposition dominante. C’est cette orientation de la CFD qui est regrettable. Elle conduira au mieux à une cohabitation d’une partie de l’opposition avec le régime de dictature et au pire, à un bâillonnement total des partis d’opposition.
Fait à Lomé, le 18 avril 2003
Pour la CDPA-BT
Le Premier Secrétaire
Prof. E. Gu-Konu
ANNEE 2002
POUR UNE ÉMERGENCE RAPIDE DE LA FORCE ALTERNATIVE D’OPPOSITION
Pour mettre fin à la dictature et instaurer la démocratie au Togo
La mascarade électorale d’octobre 2002, la manipulation de la constitution et la modification de la loi électorale pour permettre au régime despotique de se perpétuer mettent désormais clairement en évidence la faillite de la politique d’opposition conduite jusqu’à présent. La nouvelle situation impose plus que jamais l’émergence d’une force alternative d’opposition comme une nécessité historique pour mettre fin à la dictature et instaurer la démocratie au Togo. Cette force alternative s’adresse sans distinction à toute cette masse d’opposants qui veulent la fin du régime de dictature, y compris la diaspora togolaise et africaine. C’est un appel à une participation massive des Togolaises et des Togolais à la lutte contre le régime de dictature.
La force alternative d’opposition n’est pas un parti politique. C’est un mouvement d’opposition à base sociale la plus large possible. Il regroupe sans distinction tous ceux qui veulent réellement la fin du régime despotique et l’instauration de la démocratie dans le pays, reconnaissent que la politique d’opposition conduite pendant 12 ans a fait faillite et ressentent la nécessité d’imprimer une nouvelle orientation à la lutte. La nature particulière du régime Eyadema impose l’émergence de cette force alternative d’opposition comme exigence.
N’étant pas un parti politique mais un mouvement, la force alternative d’opposition regroupe des individus, des organisations associatives, des organisations syndicales, des partis politiques bref tous ceux qui ressentent la nécessité d’une autre politique d’opposition. Elle est formé autour d’un noyau dur constitué par un parti d’opposition ou par des partis d’opposition alliés dans un vrai front de lutte contre le régime et qui sont déterminés à se battre d’abord pour l’abolition du régime de dictature avant de s’engager, après la victoire, dans une compétition politique pour la prise du pouvoir. Ce noyau dur est le moteur de la force alternative d’opposition.
Comme on peut le constater, la force alternative d’opposition n’exclut personne parmi tous ceux qui veulent la fin du régime de dictature et l’instauration des libertés démocratiques, reconnaissent qu’on ne peut pas atteindre ce double but avec l’orientation politique donnée à la lutte jusqu’à présent, et sont prêts à œuvrer dans le cadre d’une politique alternative d’opposition pour permettre au mouvement d’aller de l’avant. La force alternative d’opposition n’est donc orientée contre personne, contre aucun parti politique d’opposition, contre aucune organisation associative inscrite dans la mouvance oppositionnelle. La force alternative d’opposition n’est orientée que contre les tenants de la dictature et, bien entendu, contre tous ceux qui favorisent en fin de compte le maintien du régime par la fuite en avant dans une politique d’opposition qui a fait faillite.
En tant que mouvement, la force alternative d’opposition se propose comme un cadre de mobilisation consciente et massive des Togolais, des vrais amis du Togo et de toutes les forces démocratiques du monde pour mettre un terme à la dictature au Togo. C’est ici et maintenant qu’il faut se déterminer à contribuer à cette mobilisation générale. Tout attentisme et toute tergiversation ne peuvent que permettre la prolongation de la vie du régime de dictature dans le pays.
La diaspora togolaise a un rôle fondamental à jouer dans ce nouveau cadre de lutte pour la fin du régime.
QUESTIONNAIRE (à remplir et à renvoyer à l’adresse ci-dessous)
NB: Le présent formulaire a pour but de nous permettre de reprendre contact avec tous ceux qui approuvent la nouvelle orientation de la lutte contre le régime et qui sont prêts à contribuer à la vie du mouvement, afin d’examiner ensemble avec eux les formes d’action à mener dans le cadre de la Force alternative d’opposition et les modalités pour conduire ces actions avec succès.
1) – Acceptez-vous l’idée de l’émergence de la force alternative d’opposition comme exposée ci-dessus et seriez vous prêts à participer aux activités du mouvement ?
Oui Non
2) – Si OUI, merci d’indiquer:
Nom: _______________________ Prénom: _______________________
Tel.: ______________________ Courriel: _____________________
Adresse: ______________________________ Pays: ______________
Nous vous remercions pour l’intérêt que vous portez à ce questionnaire.
Formulaire à retourner à: CDPA-BT FRANCE
Courriel: cdpa-bt@cdpa-bt.org
INFO CDPA-BT N°12: Échos de la semaine du 11 au 17 novembre 2002
Cette semaine, les gourdins ont refait leur apparition à Lomé. La CDPA-BT a pris position sur la répression. Sans surprise, la médiation togolaise bat de l’aile à Lomé II.
La répression de la marche (suite)
La répression brutale de la marche organisée par l’opposition le 9 novembre continue de susciter des remous dans l’opinion. Les journaux privés indépendants de sensibilité opposition ont diversement commenté l’évènement au cours de la semaine. Certains d’entre eux ont estimé que les forces de répression lancées contre les manifestants « ont fait preuve d’une rare maîtrise », affirmant en prime qu’elles « ont été admirables » (!), qu’elles n’auraient fini par gourdiner qu’à la suite d’un ras-le-bol dû aux « provocations » des manifestants et qu’elles « n’ont pas reçu pour mission de disperser la manifestation… »!
Comme quoi l’opposition togolaise est un problème complexe. Si l’on fait partie de l’opposition contre le régime despotique, on ne contribue pas à l’avancée de la lutte en restant assis entre deux chaises et en se prétendant au-dessus de la mêlée. Des agents de sécurité qui, au cours d’une manifestation, font « la preuve d’une rare maîtrise » ne tombent pas tout d’un coup à bras raccourci sur les manifestants, et ne les pourchassent pas indistinctement dans toutes les directions en fendant joyeusement crânes et arcades sourcilières. Et les forces de répression d’une manifestation ne se mettent jamais en action si elles n’ont pas reçu de leurs supérieurs l’ordre formel de réprimer. Ce sont pourtant des choses pas très compliquées à comprendre.
Le régime s’est naturellement empressé d’exploiter l’occasion, en commentant abondamment « ces journaux de l’opposition » sur les antennes des média publics dans le cadre de la campagne de dénigrement de l’opposition. Il n’y a pas qu’un seul moyen d’aider le régime à casser l’opposition démocratique.
Wade et la médiation de Lomé II
Comme vous le savez, le Sénégalais Wade a publiquement déclaré que la médiation de Lomé II dans la crise ivoirienne est un échec. En faisant ce constat, le chef de l’Etat sénégalais confirme ce que les Togolais savaient d’expérience dès le départ.
C’est probablement parce que Lomé II a pris conscience de cet échec inavouable que l’on a vu tout d’un coup un groupe de résidents ivoiriens aller dans la semaine féliciter M. Eyadema pour sa grande capacité de médiateur, et que M. Walla a fait célébrer hier des offices religieuses spectaculaires pour implorer Dieu afin que les Ivoiriens se réconcilient entre eux et retrouvent la paix!
Et quand on ajoute à tout cela la déclaration de M. Fologo hier à la télévision togolaise et celle de l’Union fraternelle des populations de l’Afrique de l’Ouest (UFRAPAO), alors on comprend tout.
Pauvre Côte d’Ivoire.
Lomé, le 17 Novembre 2002
Pour la CDPA-BT
Le Premier Secrétaire
Prof. E. Gu-Konu
INFO CDPA-BT N°11: Échos de la semaine du 4 au 10 novembre 2002
Cette semaine, les gourdins ont refait leur apparition à Lomé. La CDPA-BT a pris position sur la répression. Sans surprise, la médiation togolaise bat de l’aile à Lomé II.
Le retour aux gourdins
Vous le savez sans doute déjà. La marche de protestation organisée le 9 novembre par les partis d’opposition membres de la Coalition et les « Rénovateurs » a été brutalement réprimée par le régime. Huit blessés dont deux cas graves. Le Secrétaire aux relations extérieures de la CDPA, Martin Aduayom, a été rageusement piétiné. La manifestation a dégénéré parce que les forces du pouvoir autocratique ont voulu dévier la marche de l’itinéraire retenue par les organisateurs.
Cette répression brutale ne surprend guère. La décision de disperser la marche et la brutalité du « gourdinage » démontrent une fois de plus la volonté du régime d’étouffer l’opposition par tous les moyens pour pouvoir se maintenir au pouvoir. La brutalité de la répression est un signe annonciateur. Les leaders des partis d’opposition doivent avoir le courage de définir et de conduire une nouvelle politique d’opposition sans laquelle la lutte contre le régime continuera de manquer d’efficacité.
Nous rappelons que la CDPA-BT et le Parti des travailleurs ne sont pas membres de la coalition.
Communiqué de presse de la CDPA-BT
Les négociations battent de l’aile à Lomé II
Les représentants du MPIC ont quitté la capitale togolaise tout en affirmant, semble-t-il, leur volonté de poursuivre les négociations. Les négociations sont suspendues sine die. On espère qu’elles reprendront un jour. Mais qui croyait sérieusement dans la capacité de la médiation togolaise à résoudre le problème ivoirien? Les précédents tchadien, libérien et autres sont là. Le silence du Sénégalais Wade est éloquent, de même que le retrait du Nigérian Obassandjo du processus. Pauvre Côte d’Ivoire!
Lomé, le 11 Novembre 2002
Pour la CDPA-BT
Le Premier Secrétaire
Prof. E. Gu-Konu
Communiqué de presse de la CDPA-BT
La marche de protestation organisée par la Coalition le 09 novembre 2002 a été brutalement réprimée par le régime despotique. La CDPA-BT s’indigne contre cette répression et la dénonce sans détour. Notre parti dénonce également la manière tendancieuse dont les médias publics, notamment la TVT, ont couvert les événements pour poursuivre la désinformation et la manipulation politique de l’opinion érigées en méthodes de gouvernement. La violence ne vient pas de l’opposition. Elle vient du régime.
La CDPA-BT exprime sa compassion pour tous les blessés, et remercie tous ceux qui leur ont porté secours. Mais elle déclare que cette répression de la marche du 9 novembre préfigure la politique de répression que le régime entend mener d’ici les présidentielles éventuelles de 2003 pour briser totalement l’opposition démocratique.
La CDPA-BT estime que seule une structure solide, allégée des calculs électoraux et des « féroces rivalités » de leadership est capable de procéder à une véritable remobilisation des masses populaires pour permettre à l’opposition de mettre un terme au régime despotique.
Lomé, le 10 novembre 2002
Pour la CDPA-BT
Le Premier Secrétaire
Prof. E. Gu-Konu
LA CDPA-BT ET LA COALITION: Pourquoi la CDPA-BT ne fait-elle pas partie de la Coalition?
La CDPA-BT et le « dialogue intertogolais »
On sait que la CDPA-BT avait refusé de participer au dialogue intertogolais en estimant que l’idée n’était qu’une manière de donner du temps au régime pour lui permettre de trouver des stratégies de contournement afin de continuer de se maintenir au pouvoir après ce coup de force électoral désapprouvé par tous, y compris par la Communauté internationale. La CDPA-BT, on le sait également, avait alors préconisé qu’à la place d’un enième dialogue, les partis d’opposition mettent plutôt l’accent sur la mobilisation populaire pour régler le contentieux électoral, et que même si dialogue il doit y avoir, que les partis d’opposition y prenant part s’appuient de préférence sur une pression populaire forte, afin de mettre l’opposition en position de force face au régime de dictature. Enfin, la CDPA-BT avait toujours clairement déclaré que l’ACL était vide de contenu politique et que le CPS n’aboutirait à rien de bon pour l’opposition.
Ces rappels sont nécessaires pour comprendre la position actuelle de la CDPA-BT à l’égard de la Coalition. La CDPA-BT regrette toujours la facilité avec laquelle le contentieux électoral fut liquidé pour des législatives hypothétiques qui n’auraient même pas permis à l’opposition de mettre un terme au régime de dictature.
La CDPA-BT réaffirme aujourd’hui que tout le processus du dialogue, de l’ACL et du CPS sont un échec, et que cet échec confirme la faillite de la tendance dominante de la politique d’opposition menée dès avant la Conférence nationale. Que le régime se soit permis d’organiser la mascarade électorale du 27 octobre est à la fois une preuve supplémentaire et une des conséquences déplorables de cette faillite. Il importe de reconnaître avec courage que la politique d’opposition conduite jusqu’à présent a échoué et d’en tirer les leçons nécessaires. C’est une condition indispensable pour se mettre en mesure de donner une nouvelle orientation à la lutte afin de ne pas continuer les mêmes pratiques politiques en guise de politique d’opposition.
Une leçon capitale
Une des leçons capitales qu’impose cet échec de la tendance dominante de la politique d’opposition est la nécessité d’une remobilisation politique effective de la population en vue d’obtenir sa participation massive, consciente et efficace à la lutte contre le régime. Il s’agit d’une remobilisation-responsabilisation de la population Elle doit logiquement favoriser l’émergence d’une force alternative d’opposition capable de porter la nouvelle orientation de la politique d’opposition. L’entêtement du pouvoir à organiser la mascarade électorale du 27 octobre offrait une excellente occasion pour cette remobilisation responsabilisation. Il fallait saisir l’occasion.
On avait le sentiment après l’enterrement du CPS par le régime en mai dernier que les partis d’opposition accrochés à la branche pourrie avaient compris la nécessité de saisir cette occasion. Par la force des choses, ils avaient fini en effet par se décider à boycotter le scrutin du 27 octobre. Et depuis le 6 octobre, tous les partis d’opposition avaient pu alors engager une série d’actions en vue de mobiliser la population sur le mot d’ordre du boycott. La CDPA-BT s’était associée à ces actions avec l’espoir que le mouvement ainsi naissant serait le point de départ de la remobilisation qui s’impose. Il est regrettable que l’idée d’une coalition de l’opposition soit venue perturber le cours des actions engagées pour le boycott, brisant ainsi le mouvement vers la remobilisation indispensable. Une fois encore, les chefs de l’opposition ont raté le rendez-vous historique avec la masse de la population et manqué ainsi l’occasion de la réorientation indispensable de la politique d’opposition au régime.
Redéfinir une nouvelle politique d’opposition
L’idée d’une coalition des forces démocratiques n’est pas mauvaise en soi dans la conjoncture politique ouverte par le pseudo scrutin du 27 octobre. Mais à condition que la coalition envisagée ne soit pas réduite à un COD II bis, mais que l’idée se traduise au contraire par une structure solide et durable, conçue pour permettre à l’opposition d’être capable de prendre désormais l’offensive au lieu d’être constamment à la traîne des manœuvres du pouvoir, et de se mettre en mesure de faire face aux difficultés qui se profilent à l’horizon d’ici 2003 et au-delà.
La création d’une coalition de cette trempe n’est possible que si les chefs de la tendance dominante de la politique d’opposition pouvaient accepter de taire pour un temps leurs rivalités traditionnelles pour le pouvoir et leurs calculs électoraux pour arriver à concentrer toutes les énergies de l’opposition sur l’abolition préalable du régime de dictature. Certains d’entre eux avaient récemment donné le sentiment d’avoir finalement compris cela. Mais le montage de la coalition proclamée, ses non-dits politiques, ses présidences tournantes, ses vagues professions de foi pour « mettre un terme définitif au système RPT », montrent que cette structure n’est rien de plus qu’un autre COD II débaptisé, et que les enjeux électoraux de 2003 l’emportent en réalité sur la nécessité de doter l’opposition d’une nouvelle politique capable de permettre le renversement du régime de dictature grâce à l’émergence d’une force alternative d’opposition.
En effet, comment « rester unie pour relever le défi démocratique tout en développant sur le terrain les féroces rivalités inhérentes à la lutte pour la conquête du pouvoir »? « Les féroces rivalités » pour la conquête du pouvoir sont tout à fait incompatibles avec la lutte pour l’abolition d’un régime de dictature. Nous devrions avoir compris cela après douze années d’une politique d’opposition qui est allée d’échec en échec justement à cause de cette concurrence prématurée pour la conquête partisane du pouvoir.
Les responsables des partis d’opposition ont un devoir de vérité et de respect vis-à-vis du peuple. L’union sans cesse réclamée par la population est irréalisable dans ce contexte de concurrence féroce pour le pouvoir. Mais ce n’est pas parce que l’opinion réclame une union de l’opposition qu’il faut lui servir une énième illusion d’union. Ce n’est pas avec une illusion de coalition agrémentée d’effets d’annonce que la remobilisation responsable pourra se faire pour permettre une participation effective des masses populaires à la lutte pour la fin du régime despotique.
La Coalition n’ira pas loin
De toute évidence, la coalition n’ira pas loin et chacun des chefs des partis membres le sait. Et elle contribuera par ses échecs à renforcer le régime de dictature. Au risque de ne pas être comprise, la CDPA-BT entend le dire dès maintenant pour inviter à plus de réflexion. La CDPA-BT ne peut pas faire partie de cette Coalition sans trahir ses positions bien connues. Elle espère par contre que la pression des événements à venir clarifieront les enjeux électoraux et forceront alors les partis membres de la coalition à abandonner pour un temps leurs calculs électoraux afin que l’opposition puisse se mettre en mesure de créer une structure capable de mener la lutte pour la fin du régime. La CDPA-BT ne ménagera aucun effort pour atteindre cet objectif et contribuera à toute action allant réellement dans le sens de la lutte pour l’abolition du régime.
Fait à Lomé, le 5 novembre 2002
Pour la CDPA-BT
Le Premier Secrétaire
Prof. E. Gu-Konu
INFO CDPA-BT N° 9: Échos de la semaine du 21 au 27 octobre 2002
La semaine qui s’achève est naturellement dominée pas les prétendues élections anticipées. Sur ce tableau, il faut souligner deux faits essentiels: 1- l’abandon de fait du mouvement de remobilisation de la population pour le boycott du scrutin, 2- la poursuite de la politique de répression et d’intimidation.
1- Répression et intimidations
Le ministre de l’intérieur, M. Walla, a clôturé vendredi la campagne électorale par un vigoureux communiqué visant sans ambiguïtés l’opposition et mettant en garde contre tous ceux qui seront tentés de créer des troubles lors du scrutin du 27 octobre. Le ton du communiqué et la violence des propos contre les partis de l’opposition montrent bien que le régime veut agiter l’épouvantail de la répression pour entretenir la peur au sein de la population afin qu’elle ne suive pas le mot d’ordre du boycott. Mais au-delà, tout se passe comme si le régime se préparait à allumer lui-même des incendies le 27 octobre afin de se donner des justifications pour une répression de l’opposition.
2- L’abandon de fait du mouvement de remobilisation
On se rappelle que l’ensemble des partis d’opposition avait amorcé à partir du 6 octobre des actions unitaires tendant à mobiliser la population pour le boycott des prétendues élections anticipées. Ces actions avaient débuté par des contacts en direction de certains groupes sociaux qui avaient pris courageusement des positions sans ambiguïtés contre la non transparence et la non équité du scrutin. A l’idée d’une meilleure organisation de ces actions à travers la création d’une structure légère qui serait mandatée pour poursuivre les contacts de façon plus organisée, la tendance dominante habituelle de l’opposition répondit par un document proposant une coalition de l’opposition, en réalité une structure lourde, du même type que celles qui l’avaient précédée sans résultat. De toute évidence, on avait brusquement glissé de l’objectif de la mobilisation contre la mascarade du 27 octobre vers les enjeux électoraux de 2003. On peut regretter le fait. Pour une fois encore, la tendance dominante de l’opposition va donner à la population une illusion d’union dont les conséquences prévisibles renforceront la démobilisation des masses populaires après le 27 octobre.
Le 27 octobre. Et après?
La mascarade électorale est en cours. Aucun doute sur les résultats. L’opposition doit nécessairement procéder à une remobilisation de la population et à une réorientation de la lutte pour la fin du système et pour l’instauration d’une véritable démocratie dans le pays. On y reviendra.
Lomé, Dimanche le 27 octobre 2002
Pour la CDPA-BT
Le Premier Secrétaire
Prof. E. Gu-Konu
INFO CDPA-BT: Échos de la semaine du 13 au 20 octobre 2002
Parmi les événements politiques de la semaine du 13 au 20 octobre, on peut retenir: le déroulement de la campagne des prétendues élections anticipées, le boycott actif du scrutin par l’opposition, le harcèlement des partis d’opposition et la nécessité d’une force alternative d’opposition.
1- La campagne yoyo
La campagne électorale ouverte par le régime pour son parti-État le 11 octobre 2002 suit son cours. Il suffit de suivre les discours des candidats à la TVT pour se rendre compte du montage grossier organisé dans les officines du pouvoir pour donner à l’opinion internationale le sentiment que la mascarade constitue des élections démocratiques. Rappelons que les partis d’opposition sont unanimes à ne pas participer au jeu. L’Assemblée qui sera issue de ces prétendues législatives ne sera pas une assemblée représentative. Elle ne sera donc pas une assemblée nationale mais une chambre d’accompagnement de la dictature. Comme nous l’avons déjà dit, les partis d’opposition devront cette fois-ci être conséquents avec eux-mêmes pour ne pas donner l’occasion à cette assemblée de se donner une quelconque légitimité comme dans le cas de l’assemblée-RPT de mars 1999. On n’envoie pas des propositions de loi à ratifier par une assemblée issue d’un scrutin auquel on a refusé de participer pour l’avoir jugé irrégulier et frauduleux. La campagne yoyo va encore amuser la galerie pendant une semaine, du 21 au 26 octobre.
2- Le boycott actif
Par la force des choses, les partis d’opposition sont donc unanimes à boycotter la mascarade électorale et à rendre ce boycott actif (même si le mot continue de hérisser le poil à certains leaders de ces partis). Tous ces partis se sont donc mis ensemble depuis le 6 octobre pour engager des actions communes dans le sens du boycott actif. Naturellement, la CDPA-BT s’est associée à ces actions communes sans se faire des illusions sur la capacité de la tendance dominante de l’opposition à mener des actions communes à la fois cohérentes et durables pour arriver à mettre le rapport des forces du coté du peuple afin de lui permettre de venir à bout du régime oppresseur.
3- Le harcellement de l’opposition se poursuit
A la suite d’une réunion faite par la CDPA à Sokode le 7 septembre au domicile du secrétaire locale M. Mohamed Gandi, Professeur d’EPS, ce dernier fut convoqué le 13 septembre à la préfecture où il est accusé d’avoir organisé une réunion publique pour inciter les jeunes de la ville à organiser des troubles le 27 octobre afin d’empêcher la tenue des élections. M Mohamed Gandi s’est défendu comme un diable et on le relacha. Mais le même jour, il reçoit une décision d’affectation sur Dapaong. Sans commentaire.
4- Harcèlement bis
Le jeudi 17 octobre 2002, M. Walla convoque le vice-président et le secrétaire général de l’UFC à son bureau d’où il les conduits au bureau du Premier Ministre. Là, en présence du Directeur général de la police nationale, du conseiller du Premier ministre, du ministre de l’information et en présence des journalistes de la télévision et de la radio, Walla leur dit qu’ils ont appris que le secrétaire général de l’UFC a organisé une réunion à son domicile le 9/10/02, puis au siège du parti le 17/10/02, et qu’à ces réunions, on a parlé de distribution de tracts et incité les jeunes à semer des troubles le jour des élections. Et on leur demande de s’expliquer. Les deux responsables de l’UFC exigèrent d’abord que les journalistes se retirent. Ce qui fut fait finalement. Puis ils déclarèrent qu’effectivement ils ont organisé ces réunions mais qu’ils n’ont rien d’autre à dire. La scène a duré quelques temps. Devant la détermination des deux responsables de ne pas parler, on mit fin à l’entrevue. Mais comme on pouvait s’y attendre, aux informations de 20 heures, la TVT lut un communiqué où le premier ministre mettait en garde contre toute tentative pour créer des troubles le 27 octobre afin d’empêcher les élections. Que le Premier Ministre se prête à ces jeux n’est pas surprenant. Mais les réunions à domicile ou au siège des partis politiques sont-elles aussi interdites dans le pays?
5- L’impossible union de l’opposition
Les tentatives d’action unitaire amorcées par les partis d’opposition depuis le 6 octobre n’iront pas loin. C’est ce qui se dégage de la dernière réunion tenue par ces partis au siège de la CPP le 17/10/02. Il suffit d’être habitué aux non-dits du discours des « grands leaders » pour s’en convaincre. La concurrence pour le pouvoir à tout prix ne permettra jamais à ces « grands leaders » de se mettre ensemble pour mener une action durable et efficace contre le régime despotique. La CDPA-BT n’a pas cessé de le dire: Si les Togolais veulent se libérer du régime oppresseur, il faut qu’ils reconnaissent la nécessité de l’émergence d’une force alternative d’opposition et qu’ils contribuent à cette action orientée vers ce but.
Lomé, Dimanche le 20 octobre 2002
Pour la CDPA-BT
Le Premier Secrétaire
Prof. E. Gu-Konu
INFO CDPA-BT: Échos de la semaine du 07 au 13 octobre 2002
Un choix difficile parmi les événements politiques de la semaine écoulée: la déclaration commune du Front au Foyer Pie XII, le tripatouillage de la constitution, la supercherie électorale.
1- Le Front au Foyer Pie XII : La déclaration commune
Dimanche le 5 octobre, le Front (CAR, CDPA, UDS-Togo, ADDI) a fait une réunion au Foyer Pie XII pour dénoncer le processus électoral en cours et demander à la population de ne pas aller retirer les cartes d’électeur. La CDPA-BT se félicite de cette position. A l’issue de la réunion, une déclaration commune avait été lue et signée par les quatre partis du front auxquels se sont associés la CPP, Dahuku Péré agissant au nom des « Réformateurs » du RPT et le PSR. L’UFC n’avait pas signé. Le Parti des Travailleurs non plus. La CDPA-BT n’avait pas été associée à la manifestation par les organisateurs. Il se félicite de la tenue de cette réunion et des positions qui y sont prises. Elles vont en effet dans le sens de la lutte en cours pour l’abolition du régime de dictature dans le pays.
2- Le tripatouillage de l’article 52 de la Constitution
Lors du conseil des ministres du 9 et 10 octobre 2002, le régime a enfin prononcé la dissolution de l’Assemblée-RPT en vue du scrutin du 27 octobre. Par un autre décret, le même conseil a modifié l’article 52 de la Constitution pour « permettre d’assurer la continuité de l’État quelles que soient les circonstances et notamment la continuité du Pouvoir législatif » et pour « éviter tout risque de vide juridique lorsque, pour une raison quelconque, le processus électoral prend du retard ou est interrompu ». L’article 52 de la Constitution dispose dans son deuxième alinéa que « Les élections ont lieu dans les trente jours précédant l’expiration du mandat des députés. L’Assemblée Nationale se réunit de plein droit le deuxième mardi qui suit la date de proclamation officielle des résultats. » Pourquoi le régime éprouve-t-il maintenant le besoin de modifier la Constitution pour apporter ces précisions à l’article 52? Dans les circonstances anormales où s’organisent ces « législatives anticipées », cette question mérite d’être méditée.
3- La supercherie électorale est confirmée
On sait qu’à partir de juin 2002, le régime avait suscité la création d’une flopée de partis soi-disant de l’opposition et sans aucune représentativité pour se fabriquer sa propre opposition (il en a tout de même besoin d’une « opposition ») et écarter du processus électoral par tous les moyens les partis d’opposition qui se préparaient au scrutin. L’examen de la liste des partis prenant part au processus et des candidats par circonscription électorale révèle bien que ces prétendues élections constituent une grossière supercherie. Sur 134 candidats, 60% sont RPT, 6% de l’énigmatique RSDD, 5.9% de la problématique Juvento et 5.2% sont des candidats indépendants sans surface politique. Les autres partis sont ou bien insignifiants, ou bien franchement ridicules. Le RPT est seul dans plus de la moitié des circonscriptions électorales et pratiquement seul dans un peu moins du tiers de celles qui restent. Ces données montrent que l’Assemblée qui sortira des urnes le 27 octobre ne sera pas représentative de la volonté populaire. Elle ne sera pas une Assemblée nationale. Elle ne sera qu’une curieuse émanation du RPT, une Assemblée-RPT bis c’est-à-dire un instrument au service du parti-Etat restauré et du régime despotique. Les partis d’opposition qui sont toujours si prompts au compromis avec le régime devront cette fois-ci ne plus rien faire pour permettre à cette assemblée illégitime de se donner une quelconque légitimité comme ce fut le cas pour l’Assemblée-RPT issue des élections de la honte de mars 1999.
4- La France éternelle et le régime Eyadema
Au cours de cette semaine où s’ouvre la campagne électorale pour les prétendues élections anticipées si controversées et auxquelles le Peuple Togolais refuse de participer, la France vient d’accorder plus de 900 millions de francs au régime d’Eyadema. Une inquiétante coïncidence.
Lomé, Dimanche le 13 octobre 2002
Pour la CDPA-BT
Le Premier Secrétaire
Prof. E. Gu-Konu
INFO CDPA-BT: Échos de la semaine du 23 au 29 septembre 2002
Quatre faits essentiels marquent cette semaine politique : La célébration du 16e anniversaire du 23 septembre 1985, la lettre pastorale de l’Eglise Evangélique Presbytérienne du Togo, la convocation du corps électoral pour le 27 octobre 2002 et une accalmie apparente des « séminaires de réflexion » des ailes marchantes du RPT.
1- La démonstration de force pour intimider et effrayer
Le régime vient de célébrer lundi le 16ème anniversaire de ce qu’il est convenu d’appeler dans l’histoire officielle du régime l’attentat terroriste du 23 septembre. Les Togolais savent ce qui s’était passé cette nuit du 23 septembre 1985. Le régime avait réussi à attirer dans un guet-apens un groupe d’opposants basé au Ghana et les avait fait arroser sans pitié. Rien dans le contexte politique actuel ne justifie l’éclat donné à cet anniversaire, si non la nécessité pour le régime de faire une démonstration de force militaire pour intimider et répandre encore plus la peur, afin que la population se tienne tranquille. Cette démonstration de force militaire apparaît ainsi comme la réponse militaire à la remobilisation politique dont on parle dans le pays.
2- La lettre pastorale de l’Eglise Evangélique Presbytérienne du Togo
Dimanche 12 septembre 2002, l’Eglise Evangélique Presbytérienne du Togo avait communiqué aux délégués de toutes les paroisses une lettre pastorale destinée à être lue à l’attention de fidèles dans tous les temples du pays. « Le Togo, pour occuper dignement sa place dans le concert des Nations, doit être gouverné, administré et géré par le biais d’une Démocratie Pluraliste Effective (sic) supposant la libre existence de partis politiques… », peut-on lire parmi les convictions si vigoureusement affirmées dans la lettre pastorale. C’est un appel sans ambiguïté à poursuivre le processus de démocratisation en ce moment totalement bloqué, et à le faire aboutir pour permettre « un développement durable du Togo » (sic).
Dans cette atmosphère politique et sociale délétère où les sectes de toute couleur ont poussé comme des champignons après la pluie et enfoncent gloutonnement le pays dans l’abêtissement religieux avec la complicité du régime, la lettre pastorale est une bouffée d’oxygène pour soutenir le moral de la population et éclairer les consciences. Qu’elle soit diffusée à la veille du 23 septembre a sûrement un sens caché. Les Togolais n’ont en effet aucun mérite à attendre les bras croisés que Dieu leur apporte la liberté et la dignité. Mettons-le tout ensemble sur les genoux et Dieu nous aidera à nous le mettre sur la tête.
3- Les législatives « anticipées »
Le régime vient de convoquer le corps électoral pour aller aux urnes le 27 octobre. Ce scrutin s’annonce comme une véritable foutaise. Tous les partis d’opposition ont clairement annoncé leur refus d’y participer. Dans tous les cas, ces législatives « anticipées », qui n’avaient au demeurant pas un grand intérêt pour l’avancement de la lutte contre la dictature, n’ont plus aujourd’hui rien d’anticipé. Elles doivent être massivement boycottées. C’est ce que recommande la CDPA-BT à tous ceux qui refusent de se laisser sans cesse flouer par le régime.
4- Des séminaires de réflexion à la campagne électorale
Le flot des « séminaires de réflexion » (c’est nouveau) régulièrement ponctués de dénigrements virulents de l’opposition et de la surenchère des motions de soutien dans les médias publics semble s’être décanté au cours de cette semaine. Faut-il imputer l’accalmie à la « campagne électorale » qui va s’ouvrir dans moins d’une semaine ? L’ouverture est en effet prévue pour le 11 octobre 2002.
Lomé, Dimanche le 29 Septembre 2002
Pour la CDPA-BT
Le Premier Secrétaire
Prof. E. Gu-Konu
INFO CDPA-BT: Échos de la semaine du 16 au 22 septembre 2002
Trois événements politiques essentiels au cours de cette semaine : Dates des élections anticipées, interjection en appel du ministère public, les démêlés de RFI avec la pouvoir.
1- Les élections « anticipées » au 27 octobre 2002
Le régime vient de fixer la date des élections « anticipées » au 27 octobre 2002 et le montant de la caution à 500 000 francs cfa. Rappelons que ces législatives auraient dû avoir lieu depuis mars 2000. Rappelons également que les législatives d’où l’assemblée actuelle est issue avaient été unilatéralement et arbitrairement organisées par le régime dans la situation politique confuse créée par le coup de force électorale de juin 1998, malgré les protestations de l’opposition et contre l’avis des facilitateurs.
Les élections du 27 octobre 2002 sont parties pour se dérouler dans les mêmes conditions d’organisation et de proclamation des résultats qu’en mars 1999. Les partis d’opposition membre du CPS, qui avaient sans cesse revendiqué ces élections anticipées, ont finalement confirmé leur refus d’y participer. La CDPA-BT se félicite de cette prise de position.
La CDPA-BT avait toujours mis en doute l’intérêt des législatives anticipées pour la lutte en cours pour le changement. A plus forte raison, elle ne participera pas à la mascarade du 27 octobre. Elle demande une fois de plus à la population de la boycotter. Pas seulement parce que l’organisation du scrutin est confiée à des magistrats à la dévotion du régime mais pour des raisons bien plus graves encore et sur lesquelles on reviendra.
2- Les prolongements du procès inique
Après le verdict du 6 septembre qui a ramené les peines de Claude Ameganvi et de Julien Ayi de 54 mois et 100000 frs d’amende à 4 mois et 100000 frs, le ministère public a interjeté appel. Quand on repasse le fil des irrégularités et des insuffisances du dossier monté pour mettre ces personnes en prison, on se dit que le ministère public a manqué encore une excellente occasion de se taire.
Il faut souligner toutefois que la démarche semble viser deux objectifs inavouables:
1. Passer par cette procédure pour garder plus longtemps ces innocents en prison ;
2. Faire passer la justice togolaise pour une justice indépendante.
Si en effet un juge togolais se permet, pour un procès politique, de ramener une peine de 54 mois à 4 mois, et que le ministère public interjette appel pour manifester son opposition au verdict, qui peut encore prétendre que les magistrats togolais ne sont pas indépendants et ne pas reconnaître que la démocratie « est pas en marche » dans le pays ?
Mais les Togolais qui connaissent leur régime politique ne se laissent pas duper par ces manœuvres du pouvoir despotique. C’est pourquoi ils réclament la mise en liberté sans condition pour Claude Améganvi, de Julien Ayi et de Klu Névame. Et c’est aussi pourquoi ils demandent à tous ceux qui sont épris de justice d’appuyer cette revendication.
3- On ne peut plus écouter Radio France Internationale au Togo
Depuis que Radio France Internationale a diffusé l’interview de Agbeyome Kodjo le 17 septembre 2002, les Togolais ne peuvent plus écouter la station de cette radio en modulation de fréquence.
On évoque une panne pour expliquer le silence. Mais la coïncidence entre la panne et la diffusion de l’interview est trop belle pour donner du crédit à cette version. Et la « panne » est certainement très gravissime puisqu’elle n’est toujours pas encore réparée ! En attendant, les Togolais ont eu droit toute la semaine aux discours prononcés par Agbeyome Kodjo et où cet homme défendait le régime avec acharnement quand il était encore Premier ministre. Histoire de démontrer aux Togolais que cet homme du sérail était tout sauf un homme.
Mais au fond, qui donc avait choisi l’inconditionnel Agbeyome pour en faire son Premier ministre et l’avait décoré pour ses hauts faits et son soutien militant pour le régime ?
Lomé, Dimanche le 22 Septembre 2002
Pour la CDPA-BT
Le Premier Secrétaire
Prof. E. Gu-Konu
INFO CDPA-BT
Cher compatriote et ami,
Nous avons entrepris l’an dernier d’entreprendre une campagne d’informations sous le nom INFO CDPA-BT pour vous permettre de suivre l’évolution de la situation relative à l’arrestation et à l’incarcération d’Agboyibo. Nous avons constaté que ces informations avaient suscité un intérêt chez certains de nos compatriotes et chez d’autres aussi.
Nous avons décidé de reprendre cette action en vous envoyant cette fois-ci une sélection des événements survenus au cours de la semaine de façon à vous offrir de quoi recouper éventuellement d’autres informations pour mieux apprécier l’évolution de la situation politique interne et suivre encore mieux le déroulement de la lutte commune pour la fin de la dictature et pour l’instauration de la démocratie dans le pays.
Par les récentes décisions prises par le pouvoir et la nouvelle vague de répression qu’il déchaîne dans le pays, le régime a fini par nous ramener à la case de départ. Mais nous sommes convaincus qu’avec une nouvelle politique d’opposition fondée sur une meilleure prise en compte des aspirations réelles de la population et une meilleure implication de la masse de tous ceux qui veulent le changement, l’opposition togolaise peut remonter la pente à nouveau et gagner la bataille pour la démocratie.
Nous avons confiance. Et nous espérons que vous aussi vous gardez confiance dans l’avenir.
Pour la CDPA-BT
Le Premier Secrétaire
Prof. E. Gu-Konu
Échos de la semaine du 26 au 31 août 2002
1- Claude Améganvi est ses compagnons sont toujours en prison bien que M. Koussawo Eloi ait clairement revendiqué la paternité du document incriminé. Il est clair que le régime tient tout simplement à arrêter et à garder Claude Améganvi et Ayi Julien en prison le plus longtemps possible pour intimider l’opposition et dissuader toute action de mobilisation populaire. C’est une fois de plus le visage de l’arbitraire. Le comité de libération mis en place poursuit ses actions.
2- Une rencontre eut lieu le 23 août 2002 entre Walla et les responsables de l’UFC au sujet de l’interdiction des meetings de ce parti. Le ministre avait jugé ces meetings » anticonstitutionnels » sous prétexte que le parti appelait à la subversion. Puis, il a fait diffuser par voie de presse un communiqué disant que lors de la rencontre, les responsables du parti se sont engagés à « éviter à l’avenir, les dérapages » et à » prendre dorénavant toutes les dispositions pour garantir la non-violence, le caractère pacifique » de leurs différents meetings. Mensonges ! a rétorqué la direction de l’UFC. L’affaire suit son cours. Ces mesures prises contre l’UFC participent de toute évidence à la stratégie d’intimidation des partis d’opposition, et démontrent la volonté du pouvoir d’étouffer l’opposition pour laisser le champ libre pour le RPT. C’est une atteinte contre la pluralité des partis et des idées.
3- Le comité des 7 magistrats chargés par le régime d’organiser les législatives anticipées a publié les listes nominatives des membres des CELI (Commissions électorales locales indépendantes), des CLC (Commissions des listes et cartes) et la liste des nouveaux bureaux de vote. Aucun membre des partis d’opposition ne figure parmi les 124 personnes composant les commissions. Visiblement, le régime poursuit sa fuite en avant et n’entend pas restaurer la CENI et le code électoral consensuels. Des partis de l’opposition ont réaffirmé leur refus de participer dans ces conditions aux législatives anticipées. Peut-être ceux qui ont gardé le silence espèrent-ils du régime un geste de nature à leur permettre de participer à ces élections.
4- Le 30 août 2002, le régime a fêté avec un faste et un fracas inhabituels le 33e anniversaire de la création de son parti, le RPT. C’est de bonne guerre. Après la remise en cause, de l’intérieur, des pratiques du parti-Etat par ses plus hauts responsables (Lettre de Dahuku PERE), après la bombe par qu’Agbeyome Kodjo a fait éclater dans le sérail et après toutes ses histoires sur la fortune du chef de l’Etat avec les arrestations auxquelles elles ont donné lieu, on comprend que le régime donne cet éclat particulier au 33e anniversaire du 30 août 1969 pour tenter de redorer son image. Mais cette célébration est aussi une véritable démonstration de force. Elle montre entre autres que le pays est revenu à la case de départ et que les forces démocratiques sont tenues de se donner une politique d’opposition alternative à celle conduite jusqu’à présent.
Lomé, 31 Août 2002
La CDPA-BT
Échos de la semaine du 02 au 08 septembre 2002
1- Le Procès inique. L’événement politique essentiel de la semaine est sans doute l’inique procès de Claude Améganvi et de Ayi Julien. On sait combien les peines avancées sont disproportionnées par rapport aux supposés délits : 48 mois pour chacun des deux dont 6 mois fermes pour diffamation de qui l’on sait et 48 mois pour troubles à l’ordre public ; pour M. Eloi Koussawo et Klu Nevame, elles sont de 6 mois fermes et de 60 mois pour les mêmes raisons.
M. Eloi Koussawo a fait parvenir au procès une lettre où il reconnaît être l’auteur du document incriminé et où il a déclaré avoir été l’objet de pression et de tentatives de corruption venant du Ministre de l’intérieur, M. Walla. Cette lettre, à elle seule, disculpait totalement Ayi Julien et Claude Ameganvi. Et pourtant !
Ce procès odieux a révélé trois évidences au moins:
1. Toute l’histoire n’est qu’une machination malhonnête orchestré par le régime pour mettre M. Claude Améganvi en prison et l’y maintenir le plus longtemps possible. Le procureur et la partie civile ont joué leur rôle si mal dans ce montage que la machination sautait aux yeux.
2. Devant le tribunal, Ayi Julien est en fait revenu sur toutes ses dépositions antérieures. Il a avoué en plus qu’il n’avait pas lu le procès verbal d’interrogatoire avant de l’avoir signé. Et il a déclaré à la barre qu’il avait fait les dépositions sous la contrainte.
3. Enfin, il est clairement apparu que les arrestations et le montage du procès visent avant tout à intimider les partis d’opposition de manière à les faire taire. Assurément, de tels procès ne font pas honneur au pays comme l’ont relevé les avocats de la défense. Mais c’est de bonne guerre. Il appartient aux partis de l’opposition de trouver la bonne organisation, capable de dissuader le régime de poursuivre dans sa fuite en avant dans l’arbitraire et la manipulation des consciences.
2- Conférence de presse du Comité des 7 Magistrats et la mascarade électorale. Le Comité des 7 magistrats désignés par le régime au mois de mai pour organiser les législatives anticipées à la place de la CENI régulièrement constituée a fait le 04 septembre 2002 une conférence de presse dans laquelle son Président, M. Abalo Péchelebia a laissé entendre que tout est fin près pour procéder à ces élections avant décembre 2002. Quelques jours plus tard, il niera d’ailleurs avoir fait une telle déclaration.
Dix-sept (17) partis qui n’existaient pas pour la majorité d’entre eux se sont positionnés pour participer à ces élections. Il est évident que ces partis, dont beaucoup se réclament de l’opposition, ont été plus ou moins directement suscités par le régime pour se donner son opposition afin de conférer une apparence plurielle et une crédibilité de façade à ces élections. Le comité des 7 magistrats prépare ainsi la mascarade électorale pour laquelle ils sont désignés par le régime.
Les 5 partis d’opposition du CPS ont fini par déclarer chacun qu’ils ne prendront pas part au scrutin dans ces conditions d’organisation. C’est une position juste. Pas seulement parce que le parti d’opposition qui prendrait part à cette mascarade électorale se décrédibiliserait complètement auprès de l’opinion. Mais surtout parce que ces législatives, qui auraient dû avoir lieu depuis mars 2000, n’ont plus rien d’élections anticipées et n’ont plus aucun sens.
Il faut rappeler en plus que même si le comité des 7 pouvait être digne de foi, ces législatives comme toutes celles à venir ne seront jamais transparentes dans leur organisation et dans leur déroulement pas plus qu’ils ne seront équitables dans leurs résultats, tant que la cour Constitutionnelle et la Haute autorité de l’audiovisuel en de la communication (HAAC) continueront d’être ce qu’elles sont aujourd’hui dans leur composition et dans leurs orientations, et tant que l’accès aux média publics continuera d’être fermé aux partis d’opposition.
3- Le Front. Dimanche le 1er septembre 2002, le front (ADDI, CAR, CDPA, UDS-Togo) a fait une réunion d’information au Foyer Pie XII. Le porte-parole de l’organisation a déclaré à cette occasion qu’au niveau des leaders, « un minimum d’entente a été obtenu pour éviter les dénigrements de toutes sortes » et qu’il « fallait répercuter cette entente sur la base ». C’est pourquoi, « nous avons voulu réunir nos militants pour leur dire… que quatre partis politiques ont pris l’engagement de travailler ensemble ».
Le front a lancé un appel aux 7 magistrats chargés d’organiser les législatives anticipées complices du régime. Il en a appelé à leur conscience et a demandé « que la crainte de Dieu les inspire et les éloigne du chemin du mal… ».
Reste à savoir pourquoi ces magistrats ont-ils accepté de siéger dans cette commission impopulaire afin d’organiser la machination électorale, et si leur choix a quelque chose à voir avec la « conscience » ou avec le « bien ou de mal » ! Espérons que ces magistrats entendront cette exhortation.
Lomé, 11 Septembre 2002
Pour la CDPA-BT,
Le premier Secrétaire
Prof. E. Gu-Konu
Échos de la Semaine du 09 au 15 septembre 2002
1- La fin du procès de Claude Améganvi et ses co-inculpés. Comme vous le savez, le régime n’a finalement condamné Claude Ameganvi, Ayi Julien et Klu Nevame qu’à 4 mois d’emprisonnement et 100 000 francs d’amende au lieu de 4 ans et 6 mois requis par le ministère public. Et le seul chef d’accusation retenu contre eux est celui de diffamation contre le chef de l’Etat.
Ce verdict confirme le caractère ubuesque de toute cette machination si maladroitement orchestrée juste pour faire une démonstration de force et imposer le silence à tous ceux qui contestent le régime.
Car, si Eloi Koussawo continue de réclamer la paternité du document incriminé et demande une commission rogatoire pour s’expliquer, on ne voit pas pourquoi Claude Améganvi, Ayi Julien seraient jetés en prison et paieraient une amende et Klu Nevame contrait à l’exil.
Il importe de continuer de se battre pour que ces innocents puissent retrouver leur liberté avant le terme des condamnations iniques.
2- Un code de la presse encore plus répressif. La modification du code de la presse dans ses articles 89, 91 et 105 continue de faire l’objet d’une réprobation et d’une indignation générales. La presse indépendante s’en est encore préoccupée toute cette semaine.
L’article 89, 91 et 105 dans leurs formulations précédentes constituaient déjà une atteinte inadmissible à la liberté de la presse et à la liberté d’expression. L’imprécision des notions d’offense, d’injure et de diffamation permettait en effet d’envoyer le journaliste en prison pour un oui ou pour un non, et laissaient ainsi la porte ouverte à toutes les dérives possibles. Ces articles représentaient déjà un parapluie commode pour protéger les tenants du système despotique des malversations et à des actes de corruption qu’ils commettent.
Les modifications introduites dans ces articles sont un renforcement des peines prévues, avec pour objectif évident de dissuader davantage le journaliste qui serait tenté d’aller mettre son nez dans les arrières-cours de la gestion des affaires de l’Etat.
Les nouvelles lois renforcent le caractère répressif du code de la presse. En même temps, elles accentuent l’opacité de la gestion des affaires publiques et assurent aux auteurs des malversations à venir une couverture plus efficace. Pour ces raisons, le code de la presse devient encore plus antidémocratique qu’avant. Il mérite en conséquence d’être dénoncé et combattu au non de l’intérêt général.
Lomé, 15 septembre
Pour la CDPA-BT,
Le Premier Secrétaire
Prof. E. Gu-Konu
Déclaration de la CDPA-BT: la CDPA-BT se félicite de la naissance du Front!
La CDPA et le CAR se sont associés l’ADDI et l’UDS-TOGO pour constituer un front. La CDPA-BT se félicite de l’initiative. Elle espère que les partis constituants parviendront à tirer des tentatives de regroupement passées les leçons nécessaires qui s’imposent pour arriver à faire de ce nouveau groupe un front réel, capable de contribuer à l’avancée de la lutte contre le régime.
La constitution du front n’a pas seulement le mérite de clarifier la situation politique au niveau de l’opposition togolaise. C’est aussi un constat de la faillite de la politique d’opposition conduite jusqu’à présent. Elle démontre en outre que la concurrence pour le pouvoir comme principe à la base des rapports des partis d’opposition entre eux dans la lutte contre un régime despotique est incompatible avec une union réelle de l’opposition.
La CDPA-BT estime que la faillite de la politique d’opposition s’explique surtout par la marginalisation de la masse de la population, tenue à l’écart de la lutte politique pour le changement et entretenue dans l’inaction. Elle a conduit à la démobilisation et à l’apathie politique qui paralysent si dangereusement la lutte engagée contre le régime. Le constat de la faillite appelle une réorientation inévitable de la politique d’opposition dans son ensemble. La CDPA-BT souhaite que la constitution du front crée une occasion favorable à cette réorientation courageuse. Elle est prête à contribuer à toutes les formes d’action allant réellement dans ce sens.
La réorientation passe entre autres par:
Une priorité à donner à la lutte pour la fin du régime sur la lutte pour la conquête du pouvoir tout de suite,
L’abandon du principe de la concurrence comme fondement des rapports entre les partis d’opposition au régime despotique, dans la phase actuelle combat pour la démocratie,
L’implication réelle de la population dans la lutte politique à travers une véritable remobilisation des masses populaires…
La CDPA-BT estime que c’est cette remobilisation qui constitue la tâche prioritaire de l’opposition à l’heure actuelle, et qu’elle devrait permettre l’émergence d’une force alternative d’opposition. Notre parti est prêt à s’associer à toute action qui concoure à cette remobilisation réelle. La force de l’opposition réside dans la force organisée des masses populaires.
Concernant les élections, la CDPA-BT estime qu’en raison du dilatoire par lequel le régime avait fait retarder jusqu’à présent les législatives anticipées, l’enjeu décisif se situe désormais à l’horizon 2003, que Eyadema se décide à se retirer ou non. Dans cette perspective, le retour au code électoral consensuel est une exigence.
Mais le code électoral consensuel et l’unicité des candidatures ne suffisent pas à eux seuls à garantir la transparence du scrutin et à obliger le régime à se conformer au verdict des urnes lors des présidentielles de 2003. Les institutions mises en place par le régime, et qui avaient permis le coup de force électoral de juin 1998, demeurent toujours en vigueur. L’abrogation de ces institutions scélérates constitue une exigence au même titre que le retour au code électoral consensuel. La CDPA-BT est prête à s’associer à toute forme d’action allant dans ce sens.
Lomé, le 14 août 2002
Pour la CDPA-BT,
Le Premier Secrétaire
Prof. E. Gu-Konu
Déclaration de la CDPA-BT: s’organiser pour donner un coup d’arrêt à la dérive répressive du régime
1 – Les risques d’implosion du RPT suite à la rébellion de Maurice Dahuku Péré et de Kodjo Agbéyomé ont lancé le régime dans une nouvelle fuite en avant dans l’arbitraire et la violence répressive.
Mr Claude Ameganvi, S. G. du Parti des travailleurs est en détention depuis le 6 août 2002 sous des accusations totalement infondées.
Mr Ayi Julien, directeur commercial de Nouvel Écho, est arrêté au même moment sous la traditionnelle accusation de diffusion de fausses nouvelles et vient d’être transféré en prison sans jugement.
MM Djaoura Tiguena et Takora Badjessa, enseignants, sont arrêtés à Siou et jetés en prison depuis plus de 15 jours pour avoir distribué des » tracts « .
Mr Agbo Basile, directeur de publication du journal Akéklé est interpellé le 5 juin 2002 dans cette affaire rocambolesque d’Agbéyomé Kodjo – Ernest Gnassingbé et mis en prison où il est toujours, alors que l’évolution de cette affaire depuis son incarcération démontre son innocence.
MM Maurice Dahuku Péré et Kodjo Agbéyomé qui ont enfin osé réclamer un peu de démocratie et un peu de transparence dans la gestion des affaires de l’Etat et du RPT qu’ils ont si fidèlement servi pendant des décennies viennent d’être exclus du RPT au cours de la réunion du comité central présidée par Eyadema lui-même.
Ces faits montrent que l’arbitraire et la dérive répressive s’accentuent dans le pays, et avec des accents qui rappellent étrangement les plus sombres moments de la dictature pure et dure de ces 35 années de règne du régime RPT.
2 – Ce raidissement réactionnaire du régime est une preuve supplémentaire de l’échec de la politique d’opposition conduite jusqu’à présent. Cet échec découle avant tout de l’orientation donnée à la lutte pour le changement par la tendance dominante de l’opposition. Une orientation marquée par tant de zigzags politiques et une marginalisation de la population qui ont conduit à une profonde démobilisation politique des masses populaires. Ce nouveau déchaînement de l’arbitraire et de la violence répressive dans le pays est une des conséquences de la faillite de la politique d’opposition conduite dans cette orientation désastreuse.
3 – Ce déchaînement de l’arbitraire et de la violence répressive appelle une fois de plus non pas une recomposition hâtive du tableau de l’opposition sur le modèle de ce que l’on a toujours fait depuis février 1992, mais une réorientation courageuse de la politique d’opposition.
4 – Cette réorientation passe nécessairement par une restauration des masses populaires dans le rôle historique qui leur revient dans la lutte contre le despotisme afin de permettre l’émergence d’une force alternative capable d’opposer une politique cohérente, ferme et efficace aux dérives arbitraires et répressives du régime. C’est la pression populaire sous toutes ses formes qui permettra de libérer les victimes de l’emprisonnement arbitraire et qui pourra imposer au régime le respect des libertés essentielles.
5 – La nécessaire restauration des masses populaires dans leur rôle historique implique un travail de remobilisation politique responsable et méthodique. La CDPA-BT réaffirme que c’est ce travail qui devrait constituer aujourd’hui plus que jamais la préoccupation première de l’opposition togolaise. Notre parti est prêt à conjuguer ses efforts avec tout autre parti ou organisation qui s’oriente dans ce sens.
Fait à Lomé, le 9 août 2002
Pour la CDPA-BT,
Le Premier Secrétaire
Prof. E. Gu-Konu
Rapport du 1er Secrétaire de la CDPA-BT aux Assises de la Scandinavie pour une force alternative d’opposition
Le 1er Secrétaire de la CDPA-BT s’est rendu en Suède le 24 avril 2002 sur l’invitation du Comité Togolais pour la Survie de la Démocratie accompagné du secrétaire de la section d’Allemagne CDPA-BT-e.V., du secrétaire de la CDPA-BT France et de quelques membres de cette dernière section. Il a profité de l’occasion pour faire un court séjour en Allemagne et en France.
Pour la Suède, il était invité à prendre part aux Assises de la Scandinavie organisée à Lund par la CTSD sur le thème « Quel Togo pour le 3e millénaire ». Il s’agit d’une réflexion sur la situation politique au Togo et les voies et moyens pour sortir le pays de la crise politique et sociale dans laquelle il se débat depuis 10 ans.
La réflexion a essentiellement porté sur l’action de l’opposition et le blocage du processus de démocratisation. La question de l’unité de l’opposition est revenue de façon récurrente. Le 1er Secrétaire de la CDPA-BT a souligné que les conditions de la création des partis d’opposition et les objectifs qu’ils poursuivent chacun rendent cette union de l’opposition irréalisable. Et il a déclaré que ce que 7 partis d’opposition ne parviennent pas à faire parce qu’ils sont incapables de s’unir, un seul parti peut le faire à condition qu’il soit un parti démocratique, un parti de masse, qu’il se donne une ligne politique juste et qu’il tire sa force de la force organisée de la masse populaire.
Le 1er Secrétaire de la CDPA-BT a affirmé que l’échec de la politique d’opposition menée jusqu’à présent par la tendance dominante de l’opposition ne signifie donc pas qu’il n’existe plus aucune perspective pour la fin de la dictature et l’instauration de la démocratie dans le pays. Cet échec, a-t-il affirmé encore, impose l’idée de la nécessité de l’émergence d’une force alternative d’opposition dans le pays. La CDPA-BT s’efforce depuis plusieurs années déjà de faire passer ce mot d’ordre dans l’opinion.
En Allemagne, le 1er Secrétaire a participé à deux conférences à Essen les 3 et 4 mai 2002. Les deux conférences avaient été organisées par la section CDPA-BT e.V. d’Allemagne. Les thèmes sont respectivement l’Afrique dans les médias en Allemagne et le rôle et la place de la femme dans le développement au Togo.
Animée par un journaliste allemand, Mme Dorothee Peyko la première a établi un constat : l’Afrique n’existe pratiquement pas dans les médias d’Allemagne ; et si on parle du continent, c’est toujours dans une vision négative. En conséquence, l’opinion allemande est très mal informée sur la situation réelle des populations africaines. D’où la nécessité pour les organisations politiques de la diaspora africaine en Allemagne de multiplier des rencontres de ce genre pour permettre à l’opinion allemande de s’informer davantage sur ce qu’est le continent et sur ce qui s’y passe.
La seconde conférence, animée par Mlle Rosine de Souza et par André Atiye (Secrétaire la section CDPA-BT d’Allemagne) a débordé son thème pour devenir une réunion d’information sur la situation politique togolaise et ses perspectives d’évolution. Beaucoup de participants ont exprimé leur déception en portant une critique parfois virulente sur les responsables des partis de l’opposition. La CDPA-BT a été interpellée avec vivacité par les femmes. Elles voulaient savoir quelle place le parti réserve dans son programme aux problèmes de la femme au Togo.
Le 1er Secrétaire a reconnu le bien fondé des critiques portées contre les responsables des partis d’opposition. Il a reconnu qu’effectivement la politique d’opposition menée jusqu’à présent a échoué. Mais il a demandé à nos compatriotes de la diaspora de ne pas se décourager et il a formulé le veux que chacun fasse l’effort nécessaire pour s’informer plus en profondeur sur la situation politique et faire au sein de l’opposition et avec objectivité les distinctions qu’un amalgame facile cache trop souvent.
Quant à la question de la place de la femme dans le programme de la CDPA-BT, le 1e Secrétaire a demandé à la section d’Allemagne de mettre à la disposition de nos compatriotes la documentation appropriée pour leur permettre d’avoir une idée plus riche de ce que le parti pense de l’avenir de la femme dans le contexte du changement démocratique auquel aspire le peuple togolais.
Il a insisté sur le fait que dans le contexte du régime despotique, les problèmes de la femme se ramènent aux problèmes de tous ceux qui subissent l’oppression dictatoriale. La femme nourrira de plus en plus difficilement ses enfants tant que le régime dictatorial continuera de se maintenir, a-t-il dit ; elle ne parviendra jamais à donner une bonne éducation à ses enfants tant que le régime dictatorial continuera de survivre ; elle et ses enfants continueront d’être victimes du chômage tant que le régime despotique ne sera pas aboli.
Les femmes, toutes les femmes devront donc s’engager dans les organisations qui combattent pour le renversement du régime despotique et pour l’instauration de la démocratie. Les problèmes de la femme ne pourront trouver des solutions qu’après la disparition du régime despotique et son remplacement par un système démocratique où les femmes pourront désormais, avec le soutien actif de l’Etat démocratique, contribuer pleinement à la définition et à l’application de politiques susceptibles d’apporter des solution efficaces à leurs problèmes spécifiques, a-t-il conclut.
A Essen comme à Lund, le 1er Secrétaire a insisté sur la nécessité de l’émergence d’une force alternative d’opposition pour relancer la lutte contre le régime sur des bases nouvelles. L’échec de la politique d’opposition conduite pendant dix ans par la tendance dominante de l’opposition est maintenant un fait évident. Cet échec ne doit pas faire croire que le régime despotique est trop fort et conduire alors au découragement et à l’inaction. Il doit au contraire provoquer un nouveau sursaut vers la constitution d’une nouvelle opposition qui implique réellement la masse de la population dans la lutte pour la fin du régime de dictature. La force d’une opposition à un régime despotique réside dans la force de la masse organisée.
En France, le 1er Secrétaire a donné le 11 mai 2002 une conférence sur l’initiative de la CDPA-BT France. Dans son ensemble, l’assistance a reconnu l’échec de la politique d’opposition conduite jusqu’à présent. Le sentiment dominant est l’absence de toute perspective nouvelle. Le débat a donc longuement tourné autour du concept de force alternative d’opposition que le 1er Secrétaire de la CDPA-BT a proposé à Paris également.
Le concept a suscité un intérêt évident auprès des participants. On a demandé au 1er Secrétaire d’être plus explicite, de faire des propositions. On a reproché à la CDPA-BT de n’avoir pas pris contact avec les autres partis d’opposition pour leur proposer l’idée et pour en débattre avec eux. Certains ont pensé que l’idée avancée suppose à priori l’exclusion des autres partis d’opposition. Ces réactions sont tout à fait normales. Mais elles supposent aussi un certain déficit d’information sur le fonctionnement quotidien réel de l’opposition sur le terrain.
Le 1er Secrétaire a insisté sur le fait que la CDPA-BT n’entendait pas apporter une recette toute faite et ne cherche pas à tirer la couverture à soi à travers l’idée de la nécessité de l’émergence d’une force alternative d’opposition. Il a déclaré que la proposition est en même temps une invitation pour tous ceux qui sentent eux aussi la nécessité d’imprimer une nouvelle orientation à la politique d’opposition à venir contribuer à la réflexion sur le contenu du concept et sur les voies et moyens pour le rendre opérationnel. Mais il est évident qu’on ne peut forcer personne à sortir des ornières où il a investi ses intérêts.
Le 1e secrétaire a insisté sur le rôle fondamental que la diaspora togolaise et africaine peut et doit jouer dans l’émergence de cette force alternative d’opposition. Il a insisté sur la nécessité de convaincre la diaspora que l’échec de la politique d’opposition conduite jusqu’à présent par la tendance dominante de l’opposition ne signifie pas que le renversement du régime de dictature est impossible. L’opposition a perdu une bataille, faute d’une bonne orientation de la politique d’opposition. Mais elle n’a pas encore perdu la guerre. Elle a encore des ressources politique pour mener le combat et vaincre.
Nous pouvons gagner la bataille de la démocratie et créer la prospérité dans notre pays; mais à condition que nous parvenions ensemble à bien organiser les ressources inemployées et à redéfinir la politique d’opposition à conduire. Celle-ci, encore une fois, passe nécessairement par l’émergence d’une force alternative d’opposition.
Fait à Lomé, le 10 Juin 2002
Premier Secrétaire de la CDPA-BT
Prof. E. Gu-Konu
Déclaration de la CDPA-BT à propos du limogeage du Premier ministre Agbéyomé Kodjo
Monsieur Agbéyomé Kodjo vient de subir le sort de ses prédécesseurs. Son éjection répond aux logiques de fonctionnement du régime despotique et du pouvoir personnel. Tout le monde sait que la question des législatives anticipées invoquée pour obtenir la tête du Premier ministre relève du mensonge habituel par lequel le régime cherche toujours à abuser l’opinion. Kofi Sama sortira par la même voie.
Poussé par un sentiment compréhensible de dépit, Agbéyomé a fait sur la nature et les pratiques du régime et de son parti des révélations encore plus précises que celles faites par Dahuku Péré dans sa lettre. Tous les Togolais doivent être informés des propos d’Agbéyomé. Mais en réalité, Agbéyomé n’apprend rien de nouveau à ceux qui continuent de subir l’oppression despotique depuis près de quatre décennies.
Avec encore plus de précision que les révélations de Péré, les propos d’Agbéyomé:
1. donnent raison à la volonté populaire exprimée le 5 octobre 1990 de mettre un terme au régime dictatorial pour pouvoir instaurer un régime démocratique dans le pays;
2. sont une reconnaissance implicite de tout ce que l’opposition reproche au régime et qui justifient l’insurrection populaire d’octobre 1990;
3. sont une confirmation de tout ce qu’Amnesty International a dénoncé dans son rapport sur la violation des droits humains au Togo.
Les propos d’Agbéyomé révèlent certes le degré de pourrissement extrême atteint par le RPT et le régime qu’il soutient. Mais la CDPA-BT appelle ses membres, ses sympathisants et l’opinion tout entière à une grande vigilance. Il est des fruits pourris qui ne tombent pas tout seul.
La CDPA-BT affirme que ce qui importe dans la phase actuelle de la lutte pour la démocratie n’est pas qu’un courant réformiste émerge du RPT pourrissant pour tenter de sauver l’avenir de ce parti et donner par la même occasion l’opportunité à ceux qui accompagnent la dictature d’avoir bonne conscience à l’égard de la population. Ce qui continue de préoccuper les Togolais, c’est la fin du régime dictatorial et du parti qui l’a toujours soutenu sans réserve pendant plus de trois décennies.
Lomé, le 1er juillet 2002
Pour la CDPA-BT
Le Premier Secrétaire de la CDPA-BT
Prof. E. Gu-Konu
Déclaration de la CDPA-BT: la CDPA-BT se félicite de la naissance du Front!
La CDPA et le CAR se sont associés l’ADDI et l’UDS-TOGO pour constituer un front. La CDPA-BT se félicite de l’initiative. Elle espère que les partis constituants parviendront à tirer des tentatives de regroupement passées les leçons nécessaires qui s’imposent pour arriver à faire de ce nouveau groupe un front réel, capable de contribuer à l’avancée de la lutte contre le régime.
La constitution du front n’a pas seulement le mérite de clarifier la situation politique au niveau de l’opposition togolaise. C’est aussi un constat de la faillite de la politique d’opposition conduite jusqu’à présent. Elle démontre en outre que la concurrence pour le pouvoir comme principe à la base des rapports des partis d’opposition entre eux dans la lutte contre un régime despotique est incompatible avec une union réelle de l’opposition.
La CDPA-BT estime que la faillite de la politique d’opposition s’explique surtout par la marginalisation de la masse de la population, tenue à l’écart de la lutte politique pour le changement et entretenue dans l’inaction. Elle a conduit à la démobilisation et à l’apathie politique qui paralysent si dangereusement la lutte engagée contre le régime. Le constat de la faillite appelle une réorientation inévitable de la politique d’opposition dans son ensemble. La CDPA-BT souhaite que la constitution du front crée une occasion favorable à cette réorientation courageuse. Elle est prête à contribuer à toutes les formes d’action allant réellement dans ce sens.
La réorientation passe entre autres par:
Une priorité à donner à la lutte pour la fin du régime sur la lutte pour la conquête du pouvoir tout de suite,
L’abandon du principe de la concurrence comme fondement des rapports entre les partis d’opposition au régime despotique, dans la phase actuelle combat pour la démocratie,
L’implication réelle de la population dans la lutte politique à travers une véritable remobilisation des masses populaires…
La CDPA-BT estime que c’est cette remobilisation qui constitue la tâche prioritaire de l’opposition à l’heure actuelle, et qu’elle devrait permettre l’émergence d’une force alternative d’opposition. Notre parti est prêt à s’associer à toute action qui concoure à cette remobilisation réelle. La force de l’opposition réside dans la force organisée des masses populaires.
Concernant les élections, la CDPA-BT estime qu’en raison du dilatoire par lequel le régime avait fait retarder jusqu’à présent les législatives anticipées, l’enjeu décisif se situe désormais à l’horizon 2003, que Eyadema se décide à se retirer ou non. Dans cette perspective, le retour au code électoral consensuel est une exigence.
Mais le code électoral consensuel et l’unicité des candidatures ne suffisent pas à eux seuls à garantir la transparence du scrutin et à obliger le régime à se conformer au verdict des urnes lors des présidentielles de 2003. Les institutions mises en place par le régime, et qui avaient permis le coup de force électoral de juin 1998, demeurent toujours en vigueur. L’abrogation de ces institutions scélérates constitue une exigence au même titre que le retour au code électoral consensuel. La CDPA-BT est prête à s’associer à toute forme d’action allant dans ce sens.
Lomé, le 14 août 2002
Pour la CDPA-BT,
Le Premier Secrétaire
Prof. E. Gu-Konu
Conférence-débat de la CDPA-BT: « Pour une politique alternative d’opposition au Togo »
CONFÉRENCE-DÉBAT: SAMEDI 11 MAI 2002
«Pour une politique alternative d’opposition au Togo»
Avec la participation du Prof. Gu-Konu, Premier Secrétaire de la CDPA-BT, de passage à Paris.
Quarante quatre ans après le coup d’arrêt donné au processus de l’indépendance amorcé le 27 avril 1958, le peuple togolais vit depuis le 13 janvier 1963 une tragédie sans précédent.
Sous prétexte «qu’il n’y a pas d’argent dans le pays», l’État ne paie qu’irrégulièrement les salaires et les pensions. En plus, il fait tarir toutes les sources d’argent par une ponction fiscale de plus en plus débridée. Le pouvoir d’achat de l’immense majorité de la population est ainsi au-dessous de zéro. L’économie s’en trouve de plus en plus délabrée, les hommes ne pouvant plus acheter ni vendre. La population meurt par fournée, faute de pouvoir manger et faute de pouvoir se soigner.
Les droits de l’hommes sont constamment violés; la presse indépendantes est harcelée. Et le régime use de toutes les formes possibles de la violence répressive pour se maintenir au pouvoir.
Sur fond de cette tragédie, le nouveau blocage provoqué par le régime à travers la modification du code électoral montre clairement que le « dialogue inter-togolais » ne pouvait déboucher que dans une impasse, et contribuer à empêcher le changement tant souhaité par le Peuple togolais.
Où va l’opposition togolaise? Peut-on encore espérer? Que faire pour réussir l’alternance politique au Togo?
Venez débattre de toutes ces questions avec le professeur E. Yema Gu-Konu.
LE SAMEDI à 11 MAI 2002 à 14 heures 30
Salle Mission de France (Paroisse St-Hippolyte)
27 Avenue de Choisy – 75013 PARIS (FRANCE)
Métro: Porte de Choisy
VENEZ NOMBREUX… VENEZ NOMBREUX
Paris, France, 6 mai 2002 CDPA-BT
Déclaration de la CDPA-BT sur la reprise des séances du CPS
Le CPS s’est réuni une seconde fois le mardi 2 avril 2002 pour constater à nouveau le désaccord entre l’opposition et la mouvance présidentielle au sujet de la modification unilatérale du code électoral par le gouvernement. Les deux partis se sont séparés sur ce constat et ont repris date pour le 9 avril 2002. Sur cette nouvelle situation de blocage, la CDPA-BT déclare ce qui suit:
1 – Puisqu’il est retenu que le CPS est l’instance de suivi de l’Accord Cadre de Lomé et de règlement des problèmes non traités par le « dialogue intertogolais », c’est au CPS que doivent être prises les décisions entrant dans le cadre de la recherche des solutions aux problèmes relatifs à la situation politique transitoire qui va jusqu’aux législatives anticipées prévues. Ces décisions ne relèvent pas d’une autre instance.
2 – Puisque le mécanisme retenu pour la prise des décisions au niveau du CPS est le consensus, cette règle doit être respectée par les deux partis. S’il se trouve que l’application d’une décision prise par consensus rencontre des difficultés, le constat doit en être établi également par consensus. Et c’est également par consensus qu’il faut éventuellement revenir sur la décision concernée.
3 – En modifiant unilatéralement le code électoral adopté par consensus au CPS, voté par l’Assemblée le 05 avril 2000 et promulgué par le gouvernement, le régime et son parti ont donc procédé à un coup de force de la même nature que le coup de force électoral de juin 1998. C’est une épreuve de force incompatible avec la voie du « dialogue » que l’on prône comme voie unique de règlement du problème politique togolais.
4 – En conséquence, la position prise par les leaders de la tendance de l’opposition représentée au CPS est la seule possible dans la situation présente: Il faut abroger les dispositions ayant unilatéralement modifié le code électoral et la composition de la CENI. L’ensemble de l’opposition soutient donc cette position. Le retour au code électoral adopté par consensus doit être le préalable politique minimum pour la poursuite des négociations au CPS entre le régime et la tendance de l’opposition représentée au Comité.
5 – Mais les leaders de la tendance de l’opposition représentée au CPS doivent comprendre que la réponse à cette nouvelle épreuve de force engagée par le régime contre l’opposition démocratique n’est pas d’aller à chaque fois constater le désaccord dans une séance du CPS et prendre rendez-vous pour une séance suivante. C’est la nature du CPS lui-même en tant qu’instance de règlement de la crise togolaise qui est mise en question par l’épreuve de force.
L’épreuve de force engagée par le régime aggrave l’état du rapport des forces politiques aux dépens de tous ceux qui demandent le changement du régime. Les leaders de la tendance de l’opposition représentée au CPS doivent se rendre maintenant à l’évidence que le problème politique actuel ne se pose pas en termes de « configuration politique » à trouver avec le régime despotique, mais en termes de modification du rapport des forces en faveur de l’opposition. Et que cette modification du rapport des forces passe nécessairement par une pression organisée de tous ceux qui veulent la fin du régime despotique. C’est par cette pression organisée que l’opposition pourra sortir de l’impasse où elle s’enlise de plus en plus au CPS.
Fait à Lomé, le 3 avril 2002
Pour la CDPA,
Le Premier Secrétaire,
Prof. E. Y. Gu-Konu
CDPA-BT : La reprise des séances du CPS, où va l’opposition togolaise?
Les partis de l’opposition émargeant au CPS avaient posé comme condition de la poursuite de leur participation au CPS la libération d’Agboyibo. Le responsable du CAR étant libéré par Lomé II le 14 mars 2002, le CPS a donc repris ses séances ce 26 mars 2002. Les leaders des partis de l’opposition représentée au Comité demandent le retour au Code électoral adopté par consensus il y a quelques mois et donc l’abrogation des lois récentes par lesquelles le régime a modifié unilatéralement le Code électoral et la composition de la CENI. Les représentants du régime ont fait comme s’ils n’ont rien entendu, et ont déclaré aller relire la tête reposée les documents produits. La reprise des séances du CPS, si elle se poursuit, promet des surprises.
La séance de ce 26 mars 2002 est la 85e séance depuis la mise en place du Comité de suivi de l’Accord-cadre de Lomé. Tout ce qui est sorti des 84 rencontres précédentes est le code électoral, la CENI et ce que la CENI a pu faire vaille que vaille depuis sa création jusqu’à la suspension de ses séances en janvier.
Après le RPT, le CAR, la CDPA, la CPP et l’UFC avaient bloqué à leur tour le fonctionnement du CPS en décidant de ne plus participer aux séances du comité tant qu’Agboyibo sera en prison. Et ils réussirent à maintenir leur position avec raison, malgré les pressions du pouvoir et celle des facilitateurs. Une fermeté qui a payé. Elle a mis le régime dans une situation si difficile que Lomé II s’est senti obligé d’inviter les leaders opposants du CPS à prendre langue avec Agbeyome Kodjo, en sachant d’ailleurs très bien qu’ils préféreraient s’adresser au bon Dieu lui-même.
Mais avant de les inviter à venir discuter, le pouvoir a donc unilatéralement remis en cause tout ce qui avait été fait par « consensus » entre ces chefs de parti et le régime depuis la signature de l’ACL, c’est-à-dire tout ce qui avait été fait pendant les 84 séances du CPS. La remise en cause de ces décisions a ainsi ramené le Comité à son point de départ, c’est-à-dire à plus de neuf mois en arrière. Aux problèmes anciens (y compris l’incarcération d’Agboyibo) qui n’arrêtaient pas de paralyser le fonctionnement du CPS, le régime a trouvé ainsi le moyen d’ajouter délibérément de nouveaux problèmes avant de convier à discuter. La situation s’en est trouvée singulièrement compliquée, mais aux dépens de l’opposition et au profit du régime.
En modifiant le code électoral et en imposant une nouvelle composition de la CENI, Lomé II n’avait en effet plus grand’chose à perdre en libérant Agboyibo. Au contraire, il avait tout à y gagner: il n’apparaît pas seulement « magnanime »; il laisse la fausse impression qu’il à la bonne volonté à débloquer la situation politique pour permettre la relance du processus électoral comme on le lui demande. Mais surtout, il met ces leaders opposants en demeure de retourner prendre leur place au Comité pour continuer le jeu. Et il les force du même coup à rechercher ou à accepter des compromis sur les décisions inadmissibles unilatéralement prises au sujet du Code électoral et de la CENI. Ces chefs de parti peuvent-ils en effet refuser d’aller siéger puisque l’unique condition qu’ils ont posée est accordée avec « magnanimité »? Peuvent-ils refuser de faire des compromis sur ce qui est inacceptable pour l’opposition sans se faire accuser de toutes parts comme voulant empêcher la tenue des législatives anticipées? Mais quels compromis peuvent-ils bien trouver ou accepter dans la situation présente sur ces décisions, et qui ne soient pas un gain pour le régime et un recul pour l’opposition?
Où va l’opposition togolaise? Cette 85e séance a confirmé une fois de plus la divergence « naturelle », indépassable qui oppose fondamentalement un régime despotique et une opposition démocratique à ce régime. Entre celui qui dit « quitte le pouvoir » et celui qui fait tout pour continuer de le confisquer contre la volonté populaire, il n’y a pas de dialogue possible. Sauf si celui qui remet le pouvoir en cause finit par accepter de le partager avec le régime qui ne veut pas le lâcher pour tout l’or du monde, et se montre disposé à prendre ce que ce régime veut bien lui octroyer. Mais quand on accepte de se faire octroyer une parcelle du pouvoir despotique par le régime despotique, on ne se bat plus pour le changement démocratique. On se bat pour être là. Pour figurer. On accompagne le système despotique dans ces conditions.
Fait à Lomé, le 28 mars 2002
Prof. E. Y. Gu-Konu
Le Premier Secrétaire
CDPA-BT : Point de la situation politique
1 – Des législatives anticipées pour mettre fin aux souffrances du Peuple
Certains leaders de l’opposition croyaient, de bonne foi ou non, qu’ils pouvaient résoudre par le « dialogue intertogolais » la crise provoquée par le coup de force électoral de juin 1998. Le « dialogue » s’est achevé depuis juillet 1999 par l’Accord Cadre de Lomé. Le CPS est mis en place depuis août 1999. Le principe de la dissolution de l’Assemblée-RPT et celui de l’organisation des législatives anticipées sont adoptés au cours du «dialogue».
On prévoyait le scrutin pour le 1er trimestre 2000. Le nouveau code électoral rédigé de façon consensuelle par le RPT et les leaders des partis d’opposition représentés au CPS est adopté le 5 avril 2000. La CENI est installée le 30 juin 2000 et elle a commencé à préparer les législatives anticipées quelques mois après, avec beaucoup de difficultés provoquées par le régime.
2 – Le problème Agboyibo
Entre temps le régime a créé le problème Agboyibo de toutes pièces pour en tirer profit. Le procès et l’incarcération du leader du CAR constituent en fait une diversion par laquelle le régime voulait détourner l’opposition de l’essentiel et, si possible, la diviser plus qu’elle ne l’est déjà et l’affaiblir encore plus.
Mais le problème Agboyibo participe aussi à la stratégie du régime de tenter de refuser les législatives anticipées. Comment l’opposition pourrait-t-elle en effet accepter d’aller aux législatives anticipées quand l’un de ses responsables est victime de tant d’injustice et d’arbitraire!
3 – L’échec de la facilitation
Le dernier passage des facilitateurs remonte au 14 janvier 2002. Cette mission fut un échec complet. Comme la précédente, elle s’était fixé pour objectif d’obtenir la libération de Agboyibo et de relancer le processus électoral. Elle ne put obtenir du régime ni l’un ni l’autre. En repartant les mains vides le 19 janvier 2002, les facilitateurs proclamèrent qu’ils allaient adopter la « stratégie du silence ».
Le facilitateur allemand n’a pas résisté sous le poids de la « diplomatie du silence ». Il a craqué. Et il a appelé les choses par leurs noms, en tenant plutôt le pouvoir responsable du blocage du processus électoral. Il a naturellement été désavoué par Bernard Stasi. Depuis, la « stratégie du silence » continue et Lomé II continue d’enfoncer le clou dans l’arbitraire et dans le dénigrement de l’opposition.
4 – Remise en cause de la CENI et du Code électoral
Les législatives anticipées qui auraient dû avoir lieu depuis le premier trimestre de l’an 2000 sont sans cesse reportées. On parla de décembre 2000, puis de mars 2001. Et l’on fixa enfin mars 2002. Mais entre-temps, le régime et le RPT remirent en cause le Code électoral et la CENI. Rappelons que le Code électoral avait été élaboré ensemble par le RPT et les leaders des partis d’opposition au CPS ; le Code électoral avait été promulgué comme loi le 5 avril 2000 et les membres de la CENI avaient été approuvés par la même assemblée qui remet maintenant toutes ces dispositions en cause.
5 – Blocage du CPS
Peu avant la dernière mission des facilitateurs, les leaders des partis de l’opposition représentés au CPS avaient fini tout de même par faire de la libération d’Agboyibo une condition de leur retour au CPS. Les facilitateurs n’avaient pas réussi à leur faire changer d’avis et le régime non plus. Ce qui honore beaucoup l’opposition dans son ensemble. Il faut souligner toutefois qu’avant l’affaire Agboyibo, les leaders opposants du CPS avaient mille et une conditions à poser au régime pour leur participation au Comité.
6 – Mesures portant modification unilatérale de la CENI et du code électoral
Le 08 février 2002, le régime prit unilatéralement des décisions inadmissibles pour modifier la loi électorale et la composition de la CENI. Les modifications apportées au Code électoral ne concernent pas seulement les législatives anticipées si celles-ci venaient à se tenir ; elles concernent toutes les autres élections à venir, notamment les présidentielles de 2003.
Ces décisions sont inacceptables. Elles remettent en cause les bases mêmes de l’Accord Cadre de Lomé. Et elles montrent que tout ce que le régime a jamais attendu du «dialogue intertogolais» est de lui permettre de retomber sur ses fesses et de perdurer au moins jusqu’en 2003. Cette stratégie du régime était évidente depuis septembre 1998, dès l’introduction de l’idée de dialogue dans le milieu.
Les décisions unilatérales du régime au sujet de la CENI et du Code électoral compliquent davantage la situation pour ces leaders. Ils risquent ainsi d’apporter une fois de plus un sérieux coup de main au régime pour le sortir de la situation dans laquelle il s’est à nouveau empêtré.
7 – A Lomé II, il ne s’est rien passé
Le régime a fait semblant de débloquer la situation en tendant une perche pourrie aux leaders de l’opposition siégeant au CPS. Le Premier ministre a écrit une lettre le 16 février 2002 pour les inviter à renouer le dialogue. Soulignons que cette lettre a été écrite après le débat inadmissible de l’Assemblée RPT sur la CENI et le Code électoral. Les leaders des partis considérés ont refusé à juste titre d’aller voir Agbéyomé. Ils ont préféré cependant aller à Lomé II, estimant qu’Eyadema est le seul interlocuteur valable en la circonstance.
A Lomé II, ils ont limité leurs exigences à la libération de Agboyibo. Eyadema a ressassé le même argument scandaleux en laissant entendre qu’il attend d’Agboyibo de venir demander sa grâce. Les leaders opposants du CPS ont maintenu leur position. A Lomé II, il ne s’est rien passé.
8 – Report unilatéral des élections anticipées
Le 26 février 2002, le gouvernement décida unilatéralement de reporter sine die les législatives anticipées, en imputant à l’opposition la responsabilité du blocage du processus électoral. L’opinion la plus courante au sein de l’opposition est que le régime ne veut pas faire les élections parce qu’il a peur d’être battu. Il convient d’analyser la situation politique en toute objectivité.
Le régime ne met pas des entraves à l’organisation des législatives anticipées parce qu’il aurait peur d’être battu. S’il reporte sans cesse les élections et fait sans cesse du dilatoire, c’est parce qu’en réalité il ne veut pas du tout de législatives anticipées. Pas seulement pour éviter de couper les vivres à ses député-clients avant terme ; mais aussi et surtout pour montrer une fois de plus qu’il n’entend pas se laisser imposer quoi que ce soit par une opposition qu’il méprise et pour laquelle il voue une haine viscérale.
9 – Libération d’Agboyibo
Par la force des situations, le régime a fini par libérer Agboyibo le 14 mars 2002. Cette libération a déclenché une réaction populaire à la hauteur de l’énormité de l’iniquité et de l’arbitraire du procès et de l’incarcération du leader du CAR. Quelles que soient l’origine et la nature des pressions qui ont contraint le régime à libérer Agboyibo, cette libération est une victoire des forces démocratiques sur les tenants du régime despotique.
Mais l’arbre ne doit pas cacher la forêt. La libération d’Agboyibo n’a pas résolu les multiples problèmes qui rendaient déjà le CPS totalement inefficace, et expliquaient son blocage avant même l’arrestation du leader du CAR. La remise en cause de la CENI et la révision du Code électoral ont aggravé la situation. Face au RPT, les leaders opposants qui vont ainsi reprendre leur place au CPS risquent de se retrouver devant un choix difficile.
10 – Les perspectives d’avenir
Les leaders des partis d’opposition au CPS avaient conditionné leur participation aux séances du Comité par la libération d’Agboyibo. Le régime vient de procéder à cette libération après avoir arbitrairement modifié unilatéralement le Code électoral. Les nouvelles conditions résultant de cette manipulation de la loi électorale sont inadmissibles, aussi bien pour les législatives anticipées que pour les autres scrutins à venir. Les leaders opposants, qui vont reprendre le dialogue au CPS vont-ils accepter ces nouvelles conditions? Ou vont-ils pouvoir contraindre le pouvoir à faire marche arrière?
On continue d’entretenir l’opinion dans la croyance suivant laquelle les législatives anticipées seraient le bout du tunnel. Elles marqueraient la sortie de « crise » et « mettraient fin » aux souffrances du peuple. Depuis dix ans, les leaders du courant dominant de l’opposition avaient adopté une politique d’enfermement dans la légalité autocratique en prenant la « communauté internationale » pour la planche de salut. Les expressions les plus remarquables de cette politique sont la suite sans fin des « dialogues » qui ne font jamais avancer la lutte, et la marginalisation des masses populaires considérées exclusivement comme une clientèle électorale à exploiter. Si depuis dix ans les leaders de ce courant dominant ne sont jamais arrivés à réussir le changement par cette politique, est-ce avec l’écharpe de député qu’ils y parviendront?
Si l’objectif de la lutte ouvertement engagée en octobre 90 reste toujours la fin du régime despotique et l’instauration d’un système politique démocratique dans le pays, alors il faut reconnaître que la politique menée jusqu’à présent par le courant dominant de l’opposition a échoué. Parce que l’objectif n’est pas atteint. Et que rien ne permet de dire qu’il le sera demain avec cette politique. Dans ces conditions, il faut avoir le courage de définir et de conduire une autre politique d’opposition au régime. La définition et la conduite de cette politique impliquent nécessairement l’émergence d’une force alternative d’opposition.
Les perspectives d’avenir après la libération d’Agboyibo ne paraissent guère rassurantes. En conséquence, la CDPA-BT invite ses membres et l’opinion tout entière à une vigilance accrue.
Fait à Lomé, le 19 mars 2002
Pour le Bureau Exécutif de la CDPA-BT,
Le Premier Secrétaire
Prof. E. Y. Gu-Konu
CDPA-BT: Après la libération d’Agboyibo, quelles perspectives?
Par la force des situations, le régime vient de libérer M. Agboyibo. La CDPA-BT s’associe à la joie de tous les Togolais épris de liberté et de justice. Quelles que soient l’origine et la nature des pressions qui ont contraint Lomé II à libérer le leader du CAR, sa libération est une victoire des forces démocratiques sur les tenants du despotisme.
L’indignation provoquée dans l’opinion par le procès scandaleux et l’incarcération injuste de M. Agboyibo avaient suscité un grand mouvement de solidarité pour la libération immédiate et sans condition du leader du CAR. Ce mouvement avait été organisé par un comité de crise connu sous le nom de « Comité pour la libération inconditionnelle et immédiate de Me Yawovi Agboyibo ». Le Bureau Exécutif de notre parti remercie les membres de la CDPA-BT et tous ceux qui avaient manifesté leur solidarité en participant à ce mouvement populaire jusqu’au bout dans le but de flétrir l’arbitraire et d’imposer la justice.
Le mouvement pour la libération d’Agboyibo avait ouvert des perspectives prometteuses pour une remobilisation populaire indispensable à une poursuite cohérente de la lutte pour la fin du régime despotique et l’instauration de la démocratie dans le pays. Mais le mouvement avait été délibérément étouffé après le meeting public du 8 septembre 2001 et s’est terminé en queue de poisson. C’est là une autre expression des contradictions irréductibles qui minent l’opposition togolaise et l’affaiblissent sans cesse. La CDPA-BT le regrette. Notre parti affirme une fois de plus qu’une pression populaire cohérente et soutenue est indispensable à un aboutissement heureux de la lutte pour la démocratie.
Le courant dominant actuel de l’opposition avait fait de la libération de M. Agboyibo la condition de la reprise de sa participation aux séances du CPS, et donc de la relance du processus électoral. Entre-temps, le régime avait pris des mesures inadmissibles au sujet de la CENI et de la loi électorale. Ces mesures ont aggravé les conditions des élections, pas seulement pour les législatives anticipées, mais aussi pour toutes les autres élections à venir. Une fois de plus, les leaders du courant dominant se sont mis dans une situation difficile dont le régime pourrait tirer profit. Vont-ils accepter en échange de la libération de M.Agboyibo les nouvelles conditions inadmissibles que le pouvoir veut imposer? Ou vont-ils obliger le régime à faire marche arrière?
La tentation peut être forte au sein du courant dominant de vouloir accepter d’une façon ou d’une autre la modification unilatérale du Code électoral et la recomposition de la CENI contre la libération de M. Agboyibo. Un tel marché de dupes serait une manière de fourvoyer une fois de plus la lutte pour la démocratie.
La CDPA-BT appelle donc ses membres et tous ceux qui aspirent au changement démocratique à une vigilance accrue. L’opposition doit exiger l’annulation pure et simple des décisions remettant en cause la composition de la CENI et portant modification du Code électoral.
Fait à Lomé, le 19 mars 2002
Pour la CDPA-BT,
Le Premier Secrétaire
Mise à jour: Extrait du Conseil National de la CDPA-BT, Allocution de clôture
La CDPA-BT a procédé à une mise à jour de sa dernière publication: « Conseil National de la CDPA-BT ». Elle propose un extrait de l’allocution de de clôture du Conseil.
(…)
Vous avez bien voulu venir nous dire un certain nombre de choses. Cela va parfaitement dans le sens de notre pratique politique à la CDPA-BT. Encore une fois nous disons que la lutte que nous sommes en train de mener comporte une dimension importante, celle d’une réflexion constante à poursuivre en vue de trouver la voie la meilleure pour sortir le pays de la situation dans laquelle il s’abîme de plus en plus. Et nous disons que cette réflexion doit être menée sur la base des idées que chacun doit apporter librement et en toute transparence. Plus d’une fois, nous avons parlé de débat démocratique. Ce que nous appelons débat démocratique, c’est cette discussion libre sur les problèmes nationaux, sans rétention de l’information, avec un grand esprit d’ouverture et le souci constant de déboucher sur les formes d’action les plus efficaces possibles. Nous considérons que sans débat démocratique, il n’est pas possible d’avancer, il n’est pas possible d’opérer le changement démocratique. Le débat démocratique est fondamental.
Voilà pourquoi je remercie beaucoup le représentant de Citoyen 2000 (C2000) pour tout ce qu’il vient de dire. Pendant la colonisation, nous avions été des sujets et non des citoyens. Quarante ans après l’indépendance, nous ne devons plus continuer d’être des sujets. Nous devons devenir des citoyens. Un citoyen a des droits et des devoirs. Un droit de regard sur la marche des affaires publiques. Le devoir impératif de contribuer à la bonne marche de la cité. Le devoir de dire non, le devoir de s’insurger contre tout ce qui va à l’encontre du bien-être des hommes et des femmes dans la société. Le devoir de se battre pour imposer la vérité dans la conduite des affaires de l’Etat… Ce citoyen qui aime son pays, qui se bat pour être un homme ou une femme libre, qui se bat pour que la vérité triomphe pour une bonne gestion du bien public, ce citoyen est à construire dans notre pays. Si cette édification du citoyen togolais participe aux tâches que se donne C2000, alors la CDPA-BT ne peut que soutenir cette association et son action. Le représentant de C2000 a dit que chaque peuple a le gouvernement qu’il mérite. Cela veut dire que les Togolais peuvent changer le régime qui les opprime et les maintient dans la misère, s’ils sont réellement décidés à le faire. Je remercie le représentant de Citoyen 2000
Mes remerciements également au représentant de l’Association pour la Promotion de la Culture Démocratique. Je suis heureux d’apprendre qu’une organisation de ce genre est en train de se former. Tous les militants de la CDPA-BT ne peuvent formuler aujourd’hui qu’un seul vœu à l’adresse de l’Association pour la Promotion de la Culture Démocratique : comme Citoyen 2000, que cette association aussi s’organise rapidement pour remplir la mission historique qui lui revient en tant qu’association de citoyens dans cette lutte en cours pour la conquête de la démocratie dans le pays.
Mes remerciements vont également au Parti des travailleurs. Ils viennent de nous dire des choses admirables, que malheureusement on n’entend pas assez au sein de l’opposition togolaise. Une certaine orientation de la lutte pour le changement démocratique a provoqué un découragement chez beaucoup de travailleurs, surtout depuis la liquidation de la grève générale illimitée. Au point qu’ils ont du mal à se retrouver dans le discours politique oppositionnel dominant. Il se trouve -et on ne le dira jamais assez- que la masse des travailleurs constitue une force potentielle dont la transformation en force active organisée constitue une des tâches majeures dans cette phase de notre lutte pour la démocratie. Parce que cette tâche interpelle tout le monde, la CDPA-BT est prête à collaborer étroitement avec le Parti des Travailleurs et toute autre organisation pour sa réalisation.
Nous remercions également la CDPA. La CDPA-BT n’est pas la CDPA. Nous n’avons pas encore réussi à aplanir les divergences qui nous séparent. Elles sont plus profondes qu’on le croit, parce qu’elles sont liées à des orientations et à des options fondamentales qui président en fin de compte aux pratiques politiques. Mais elles ne nous empêchent pas de nous engager aux côtés de la CDPA dans toute action unitaire que nous jugeons susceptible de faire avancer la lutte en cours pour le changement du système politique dans le pays.
Nous sommes particulièrement heureux d’entendre ce que le secrétaire général de la CDPA vient de dire. On voit abusivement dans les législatives anticipées le bout du tunnel. Et de part et d’autre, des démagogues ne cessent de laisser entendre que ce scrutin résoudra ce qu’il est convenu d’appeler « la crise », et qu’il mettra fin aux souffrances du peuple. Nous sommes heureux d’entendre aujourd’hui le secrétaire général de la CDPA émettre des réserves. Il va tout à fait dans le sens de ce que nous pensons quand il déclare que l’après-élections sera fertile en difficultés, et qu’il convient donc de se mobiliser pour pouvoir les affronter. Ce pour quoi les Togolais se sont insurgés en 1990 n’est pas qu’une opposition collabore de quelle que manière que ce soit au régime despotique en place.
Nous avons travaillé avec les amis de la CPP. Nous avons travaillé ensemble quand ils étaient encore UTD, PDU, UDS, PAD. Nous avons réfléchi ensemble pendant plusieurs années à la manière de faire en sorte qu’il se dégage dans le pays une véritable force d’opposition. Nous sommes allés même jusqu’à leur proposer des éléments d’une plate-forme en vue d’une alliance sérieuse et durable. Nous n’avons pas pu aboutir à un accord parce que nous avons des divergences politiques profondes et une vision totalement différente de la lutte pour le changement du système politique dans le pays.
C’est tout à fait normal. Un parti politique n’est pas une simple association loi 1901. Il naît d’une longue réflexion préalable, de longs débats souvent difficiles, à l’issue desquels il se donne des buts à atteindre, une orientation idéologique pour éclairer sa pratique politique, des principes et des règles d’action. Tout cela lui confère une identité et une personnalité. Un tel parti politique ne peut donc pas décider du jour au lendemain de se saborder, et de se fondre dans une organisation unitaire dont l’unique souci est de devenir un grand parti. La CDPA-BT ne se reconnaît pas dans cette façon de faire.
Aujourd’hui nos amis de la CPP viennent de nous dire qu’ils laissent la porte ouverte. Nous en sommes heureux. Nous leur redisons que nous sommes toujours pour le principe de l’unité d’action, qui peut toujours devenir le point de départ possible pour une alliance sérieuse, solide et durable. Et que nous sommes toujours prêts à nous engager à leurs côtés dans toute action unitaire de nature à contribuer sans ambiguïtés à une avancée réelle de la lutte que nous menons pour la démocratie et le progrès économique et social dans le pays. Nous ne faisons pas la politique pour devenir à tout prix quelque chose demain, ne serait-ce que parce que demain pourrait toujours être long à venir. Nous faisons la politique pour transformer le pays et préparer un avenir heureux pour nos enfants et nos petits enfants. Une fois encore, je remercie nos amis de la CPP pour leur présence parmi nous aujourd’hui.
On me demande de dire le mot de clôture de notre Conseil National. Un mot de clôture, c’est trop peu ; c’est trop court pour une manifestation de ce genre. Ce que nous avons fait ensemble depuis vendredi soir suscite une foule d’idées. Je vous prie en conséquence de m’autoriser à dire deux ou trois mots, au lieu d’un mot de clôture.
La réunion que nous clôturons aujourd’hui marque une étape importante dans la vie de la CDPA-BT. Parce qu’elle correspond au 10e anniversaire de la création du parti. Avant 1990, les conditions de la vie politique dans le pays rendaient fort difficile toute réflexion collective pouvant conduire à la création d’un parti politique d’opposition au régime en place. Nous avons bravé le régime à nos risques et périls. Et nous avons fini par créer un parti d’opposition qui a activement contribué à la préparation de ce qui allait se produire en octobre 1990. Nous sommes heureux de pouvoir le dire aujourd’hui. Pas pour en tirer une satisfaction personnelle, mais pour amener à l’idée que s’il était difficile, dangereux de vouloir créer un parti d’opposition dans ce climat politique confiné du RPT que l’on a imposé à tout le monde comme parti unique, il n’était pas impossible de le faire.
La solution au problème politique fondamental du pays à cette époque n’était pas d’essayer de rassurer le régime despotique et de cajoler Eyadema pour l’amener à céder le pouvoir, ou de collaborer carrément avec lui sous le faux prétexte que le peuple a faim et qu’il faut pour cela s’atteler au développement économique sous la houlette du « timonier ». La solution était de dire clairement non à la dictature militaire et de passer par tous les moyens pour bâtir une organisation politique massive afin de le combattre pour l’abolir.
Dix ans après le 5 octobre, la situation politique est quelque peu différente. Des partis d’opposition se sont créés et existent. Mais le problème essentiel demeure : faut-il collaborer d’une façon ou d’une autre avec le régime en place pour l’amener à se démocratiser sous prétexte qu’on n’arrive pas à « faire partir » Eyadema, ou faut-il constituer une opposition forte, capable d’exercer une pression massive pour venir à bout du système d’oppression?
Dix ans après notre congrès statutaire, nous aurions dû tenir le second congrès ordinaire depuis. Les conditions concrètes du travail politique dans le pays ne nous ont pas permis de le faire. Faut-il en faire un problème ? Nous aurions pu disparaître du champ politique. Mais nous y sommes plus que jamais et nos idées circulent. C’est le plus important. Notre horizon politique n’est pas borné par les élections. Notre chemin va bien au-delà. Nous devons nous donner dès maintenant un instrument qui nous permette d’en finir avec le régime en place mais en même temps d’engager le pays dans une voie démocratique irréversible et dans la prospérité.
De ce point de vue, ce que nous avons fait pendant ces 3 jours me rassure beaucoup parce que cela montre que nous sommes sur la bonne direction. Il montre en outre que nous avons des disponibilités en jachère; il nous appartient maintenant de nous mettre véritablement en mesure de transformer ces disponibilités en jachère en réalité concrète pour faire avancer notre parti et contribuer à l’évolution politique de notre pays.
Nous avons amplement discuté ; échangé des idées. Des gens parmi nous ont émis des points de vue sur lesquels d’autres n’ont pas été d’accord. C’est tout à fait normal. Ce qui importe n’est pas d’avoir raison à tout prix contre les autres. Le plus important, c’est qu’à partir du moment où il se dégage une tendance générale admise par la majorité d’entre nous, la minorité doit faire l’effort nécessaire pour aller dans le sens de cette tendance majoritaire, tout en continuant de réfléchir pour trouver de nouveaux arguments par lesquels convaincre les autres sur la justesse de ses idées. C’est ça la démocratie. C’est le fondement du fonctionnement démocratique d’un parti politique. C’est le fondement du fonctionnement démocratique de la société. Que ceux dont les idées n’ont pas recueilli la majorité ne se découragent pas, et ne cherchent surtout pas à s’en aller pour cette raison. S’ils s’en vont pour cela, ce n’est pas démocratique. Nous avons encore beaucoup à faire ensemble. Nous devons nous armer de patience, de courage, de clairvoyance pour arriver à le faire.
Nous avons travaillé dans des conditions matérielles difficiles. Certains n’ont pas mangé hier soir. Ce n’est pas fait exprès. Je voudrais souligner que ce genre de chose que nous faisons est toujours difficile. Hier soir certains ont pu aller se coucher. En d’autres circonstances, nous aurons pu travailler jusqu’à 5 heures du matin, puis revenir nous asseoir à 8 heures pour la plénière. Nous devons nous mettre à la hauteur des tâches qui nous attendent demain. C’est la seule façon de faire de nos partis politiques, en l’occurrence de la CDPA-BT, de véritables organisations de transformation politique, de transformation économique, de transformation sociale.
Que reste-t-il à dire ? Nous allons nous séparer tout à l’heure. Le Bureau exécutif est très heureux que nous ayons pu nous rencontrer. Il sera encore plus heureux si demain nous pouvons encore nous rencontrer de la même manière, et plus nombreux qu’aujourd’hui. Il souhaite donc un très bon voyage à tout le monde. Il souhaite que chacun rentre tranquillement dans sa famille, auprès de ses enfants, auprès de sa femme, auprès de ses parents, auprès de ses amis.
Il souhaite qu’à partir de tout ce que nous avons discuté ici ensemble, chacun d’entre nous, arrivé dans son milieu, explique, explique encore, explique sans arrêt. Pourquoi faire des élections ? Pourquoi faire un travail politique ? Pourquoi est-il nécessaire d’être membre d’un parti politique ? Pourquoi la vie coûte-t-elle chaque jour plus cher ? Pourquoi les salaires, les bourses, les pensions de retraite et de veuvage ne sont-ils pas payés ou le sont avec tant de retard ? Expliquer pour permettre une meilleure compréhension des problèmes essentiels du pays afin de susciter l’action qui libère et fait réellement progresser, pour permettre à la société togolaise aussi de devenir une société démocratique où il fait bon vivre.
Pour finir, je vous prie d’excuser la longueur de mon discours. Mais je ne m’arrêterai pas sans avoir dit un dernier mot. Depuis vendredi, nous avons eu parmi nous des agents de sécurité. Ils sont venus nous protéger. Ils sont restés tout le temps que nous sommes restés. Nos remerciements à ces agents et à leurs responsables hiérarchiques. Je voudrais dire à ces agents de sécurité qu’ils constituent un des corps de notre société. Au même titre que le corps des professeurs, ou le corps des artisans, ou le corps des commerçants… Ils sont d’abord des citoyens avant d’être une autre chose. Le policier, le gendarme, le militaire ne sont que des citoyens en habit. Ils ne sont donc pas différents de nous. Je les remercie d’avoir certainement compris cela.
Si nous avons dit des choses qui les ont choqués, qu’ils ne se fâchent pas. Qu’ils reviennent demain nous voir. S’ils nous rencontrent dans la rue, qu’ils nous arrêtent, et qu’ils nous demandent : « Mais pourquoi avez-vous dit ceci l’autre jour ? Expliquez-nous pourquoi vous avez dit cela ». Nous leur expliquerons. Nous leur dirons pourquoi nous avons dit ceci ou cela. Et nous sommes sûrs qu’en tant qu’homme, qu’en tant que père de famille, qu’en tant que mari, qu’en tant qu’ami, qu’en tant que citoyens, ils comprendront. Et ils adopteront demain l’attitude qu’il faut pour qu’ensemble nous parvenions à instaurer la démocratie dans ce pays et à promouvoir le bien-être de tous. Je les remercie une fois de plus et je dis au revoir à tout le monde.
Kpalime, le 18 février 2001
Le 2e Secrétaire
Prof. E. Gu-Konu
L’échec de la facilitation, la remise en cause de la CENI et la révision de la loi électorale imposent une nouvelle orientation de la politique d’opposition
Après analyse de la situation politique créée depuis la dernière mission des Facilitateurs, la CDPA-BT établit les faits suivants.
1 – Comme la précédente, la dernière mission des Facilitateurs s’est soldée, elle aussi, par un échec complet.
a – Les facilitateurs n’ont pas pu faire sortir Agboyibo de prison, contrairement à ce qu’espéraient d’eux ceux qui avaient laissé tout leur espoir sur eux et sur « la communauté internationale ». Ils n’ont pas réussi non plus à convaincre le régime d’abandonner cette seconde accusation montée de toute pièce juste pour maintenir le leader du CAR en prison.
b – Les facilitateurs n’ont pas réussi à débloquer le fonctionnement du CPS. Ils n’ont pas pu réunir le Comité. Il faut reconnaître que, pour une fois, les leaders des partis d’opposition émargeant au Comité ont fait preuve de fermeté et de cohésion. Reste à savoir pour combien de temps?
c – La « stratégie du silence », que les Facilitateurs ont proclamé adopter comme voie de règlement n’est qu’une façon de maquiller l’échec et de s’en tirer à bon compte.
2 – L’échec de cette autre mission est une preuve supplémentaire de l’échec du «dialogue intertogolais» lui-même.
a – La CDPA-BT avait dit à plusieurs reprises que cet autre «dialogue» n’apporterait rien à l’opposition. Et depuis septembre 1998, elle avait dit que l’idée même d’un «dialogue intertogolais», dans ce contexte du blocage politique d’après le coup de force électoral de juin 1998, n’est rien de plus qu’un os jeté en pâture à l’opposition pour l’occuper et donner du champ au régime afin de lui permettre de retomber sur ses fesses.
b – Le « dialogue intertogolais » n’a donc pas résolu le problème qu’on prétendait lui faire résoudre. Au contraire, il a permis au régime d’en créer d’autres en profitant de la situation d’infériorité dans laquelle les chefs des partis d’opposition impliqués dans le processus se sont constamment placés face au pouvoir en place et son parti.
c – En décidant de ne plus participer aux séances du CPS tant que Agboyibo ne sera pas libéré, les partis d’opposition émargeant au comité avaient pris une décision politique juste. Ils auraient dû aller jusqu’au bout de leur fermeté en refusant cette procédure qui consiste à leur faire signer des lettres d’engagement lors d’un dîner à l’Ambassade de France. C’était là une façon de réunir le Comité sans le dire. Quand on décide de ne plus siéger au CPS tant que Agboyibo ne sera pas libéré, on ne va pas régler en d’autres lieux et par d’autres voies les problèmes qui devraient être réglés au sein du CPS.
3 – La situation nouvelle créée par l’échec de cette dernière mission des facilitateurs et par les récentes décisions du gouvernement imposent des conclusions qu’il convient de tirer.
a- Le «dialogue intertogolais», et tout son système de facilitation-médiation n’ont pas fait progresser le processus de démocratisation dans le pays. Au contraire, les graves décisions prises unilatéralement par le pouvoir ont ramené le pays à sa situation d’après le coup de force perpétré par le régime au lendemain des présidentielles de 1998. Ces décisions constituent une remise en cause de tout ce qui fut retenu depuis le début du «dialogue intertogolais», y compris le CPS et la CENI et tout le reste.
b- Les facilitateurs et la « communauté internationale » n’ont donc pas résolu le problème politique togolais, contrairement à ce qu’espéraient d’eux ceux qui avaient laissé tout leur espoir sur eux. On l’a probablement compris maintenant: la « communauté internationale » peut à la rigueur, si elle le veut, donner un coup de main utile pour faire avancer la lutte du peuple togolais pour la démocratie. Mais elle ne peut pas faire à la place des Togolais ce qu’ils doivent faire eux-mêmes pour se libérer de l’oppression.
c- Les décisions arbitraires et unilatérales que vient de prendre le pouvoir tant au sujet de la CENI que du Code électoral remettent totalement en cause le principe même de la liberté, de la transparence et de l’équité des législatives en vue. Celles-ci n’offraient déjà pas aux Togolais des perspectives d’avenir rassurantes. A plus forte raison, dans la situation qui vient d’être créée, elles n’ont plus aucune signification au regard de la lutte du peuple pour la démocratie.
d- La nouvelle situation créée par l’échec de la facilitation et par la remise en cause du «dialogue intertogolais» par le régime montrent que le courant dominant de l’opposition togolaise a conduit encore la lutte du peuple togolais pour la démocratie dans une nouvelle impasse, et que l’orientation politique imprimée à la lutte par ce courant de l’opposition ne peut pas permettre aux Togolais de réaliser leurs aspirations au changement. C’est donc la faillite d’une politique d’opposition au régime despotique. En conséquence, il importe de redéfinir une nouvelle orientation et une autre politique d’opposition. Cette exigence appelle nécessairement l’émergence d’une force alternative d’opposition.
Fait à Lomé, le 12 février 2002
Pour la CDPA-BT,
Prof. E. Y. Gu-Konu,
Premier Secrétaire de la CDPA-BT
Sur le chemin des législatives anticipées: mises à jour
« Sur le chemin des législatives anticipées » est une nouvelle brochure éditée la CDPA-BT pour informer l’opinion sur des problèmes propres à la transition démocratique togolaise.
Cette brochure analyse un ensemble de problèmes propres à la transition démocratique togolaise. La période prise en compte par ces analyses est celle comprise entre le début du « dialogue inter-togolais » et la mise en place de la Commission électorale nationale indépendante (CENI).
Bien entendu, la situation politique a évolué depuis la création de la CENI, surtout au cours des six derniers mois de l’année 2001. Des événements nouveaux se sont produits : Débat autour de l’éventualité d’une révision de la constitution et de la loi électorale, que les hommes du régime ont finalement tranché en en faisant un «débat interne» au RPT, fixation en fin de compte de la date des législatives anticipées, déblocage des crédits nécessaires à la préparation des élections par la CENI, lancement de la révision des listes électorales, procès et détention d’Agboyibo… Ces événements ont suscité des prises de position diverses par les acteurs politiques tant du côté de l’Opposition que du côté du régime en place.
Ces nouveaux éléments survenus sur la scène politique ne sont pas prises en compte dans ces analyses. Dans tous les cas, ils ne modifient en rien la nature des problèmes analysés et ils ne changent rien aux conséquences probables de ces problèmes sur le processus de démocratisation…
Dans la mesure où le scrutin tant réclamé aurait dû avoir lieu déjà depuis le premier trimestre de l’année 2000, ces nouveaux éléments sont venus seulement rallonger le chemin des législatives anticipées dans la même direction, de toute évidence pour atteindre avec moins de raideur le même objectif: une sorte de cohabitation de quelques leaders opposants avec le régime en place dans la logique de la « démocratie apaisée »..
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SUR LE CHEMIN DES LÉGISLATIVES ANTICIPÉES
Sommaire
Avertissement
I Préface
II Introduction
III Accepter le débat démocratique
IV «Sans Eyadema, c’est le chaos»!
V La violence dans le processus togolais de la démocratisation
VI La CENI, une priorité des priorités?
VII La règle du consensus ouvre la voie à la cohabitation
VIII La majorité des 4/5
IX La majorité des 4/5 comme source de blocage
X Vote à bulletin secret, « vote de trahison »?
XI Les législatives anticipées et la Cour constitutionnelle
XII La presse indépendante et la transition démocratique dans un régime de despotisme néo-colonial
XIII Sur le chemin de la cohabitation
XIV Conclusion
Lomé, Togo, 30 décembre 2001
Éditions de la CDPA-BT
Sur le chemin des législatives anticipées
« Sur le chemin des législatives anticipées » est une nouvelle brochure éditée la CDPA-BT pour informer l’opinion sur des problèmes propres à la transition démocratique togolaise.
Cette brochure analyse un ensemble de problèmes propres à la transition démocratique togolaise. La période prise en compte par ces analyses est celle comprise entre le début du « dialogue inter-togolais » et la mise en place de la Commission électorale nationale indépendante (CENI).
Bien entendu, la situation politique a évolué depuis la création de la CENI, surtout au cours des six derniers mois de l’année 2001. Des événements nouveaux se sont produits : Débat autour de l’éventualité d’une révision de la constitution et de la loi électorale, que les hommes du régime ont finalement tranché en en faisant un «débat interne» au RPT, fixation en fin de compte de la date des législatives anticipées, déblocage des crédits nécessaires à la préparation des élections par la CENI, lancement de la révision des listes électorales, procès et détention d’Agboyibo… Ces événements ont suscité des prises de position diverses par les acteurs politiques tant du côté de l’Opposition que du côté du régime en place.
Ces nouveaux éléments survenus sur la scène politique ne sont pas prises en compte dans ces analyses. Dans tous les cas, ils ne modifient en rien la nature des problèmes analysés et ils ne changent rien aux conséquences probables de ces problèmes sur le processus de démocratisation…
SUR LE CHEMIN DES LÉGISLATIVES ANTICIPÉES
Sommaire
Avertissement
I Préface
II Introduction
III Accepter le débat démocratique
IV «Sans Eyadema, c’est le chaos»!
V La violence dans le processus togolais de la démocratisation
VI La CENI, une priorité des priorités?
VII La règle du consensus ouvre la voie à la cohabitation
VIII La majorité des 4/5
IX La majorité des 4/5 comme source de blocage
X Vote à bulletin secret, « vote de trahison »?
XI Les législatives anticipées et la Cour constitutionnelle
XII La presse indépendante et la transition démocratique dans un régime de despotisme néo-colonial
XIII Sur le chemin de la cohabitation
XIV Conclusion
Lomé, Togo, 30 décembre 2001
Éditions de la CDPA-BT
Vœux de la CDPA-BT pour la nouvelle année 2002
Le régime despotique célèbre aujourd’hui son 35e «13 janvier». C’est une fois encore l’expression du mépris total qu’affiche le pouvoir en place au Peuple togolais et, une fois encore, le signe de la volonté des tenants de l’autocratie de s’accrocher en dépit des aspirations des Togolais au changement démocratique.
Il faut se rappeler ce qu’est le «13 janvier». Le 13 janvier 1963, un quarteron de militaires conduits par un certain sergent Eyadema fit un coup d’État, assassina le président de la nouvelle République et imposa au pays un régime des plus oppresseurs et des plus prédicateurs jusqu’en 1967. Le camp militaire devint alors le centre de gravité du pouvoir réel, et le territoire fut durement traité comme un pays conquis.
Le 13 janvier 1967, les mêmes militaires firent un second coup de force, s’emparèrent cette fois-ci officiellement de l’appareil d’État et instaurèrent une dictature militaire à visage découvert et à pouvoir personnel. La création du parti unique (le RPT) trois ans plus tard ne fut qu’une façon de masquer le visage réel de ce régime pour poursuivre l’oppression du peuple et la dilapidation des ressources du pays.
C’est contre ce régime intolérable que le peuple s’est insurgé en 1990 avec la volonté d’y mettre un terme afin de permettre l’instauration des libertés démocratiques et la construction d’un État de droit au Togo. Mais la restauration du régime despotique dès février 1992 et l’orientation électoraliste de la lutte pour le changement firent échouer la transition démocratique. On connaît la suite jusqu’au «dialogue inter-togolais» et après.
A la veille des législatives anticipées si abusivement considérées comme un aboutissement heureux devant marquer la fin de la «crise», on aurait pu penser que le régime RPT pourrait s’abstenir de célébrer son «13 janvier» afin de marquer sa volonté de s’engager sans duplicité dans le processus démocratique et de favoriser le changement politique. La célébration de ce «13 janvier» annonce ainsi ce qui va se passer après les législatives anticipées. Car, elle traduit clairement l’entêtement du régime à poursuivre la confiscation du pouvoir d’État au mépris de la volonté populaire.
Contrairement à ce que l’on fait croire, les législatives anticipées ne marqueront donc pas la fin du régime d’oppression et n’apporteront pas le changement pour lequel le peuple est descendu dans la rue le 5 octobre 1990. Cela veut dire également qu’elles ne mettront pas fin aux souffrances du peuple comme on le proclame abusivement, même si l’Union européenne reprend son aide financière.
Dans le contexte institutionnel actuel et devant la volonté du régime de se maintenir au pouvoir, les députés de l’opposition dans la nouvelle assemblée qui sera issue des urnes ne seront guère que des otages, parce qu’ils continueront d’être impuissants face au pouvoir en place comme ils l’étaient déjà avant les élections. La CDPA-BT souhaite que les Togolais prennent conscience de cette douloureuse réalité, pour ne pas se laisser aller au découragement le moment venu.
Car, le processus de démocratisation imposé au régime despotique en 1990 par l’insurrection populaire doit aboutir. Le peuple togolais a consenti trop de sacrifices et de privations pour se laisser soumettre à une démocratie de façade derrière laquelle l’ancien régime continuerait de confisquer le pouvoir réel et de poursuivre une politique d’oppression génératrice de misère.
L’orientation imprimée à la lutte depuis février 1992 a suffisamment montré ses limites. Ce sont ces limites qui expliquent l’échec de la transition. Il est plus que nécessaire maintenant qu’une force alternative d’opposition émerge. C’est la seule condition pour faire avancer le processus de démocratisation engagée voici onze ans avec tant de sacrifices.
Ce sont là les vœux que la CDPA-BT formule au début de cette année 2002 pour ses militants et pour tous ceux qui aspirent au changement démocratique. Et l’émergence de cette force alternative d’opposition est une tâche collective dont la réalisation requiert l’apport de tous les Togolais de l’intérieur et de la diaspora qui veulent réellement que le Togo aussi vive libre demain, et prospère comme un État normal.
Lomé, le 13 janvier 2002
Pour le Bureau Exécutif de la CDPA-BT,
Prof. E. Gu-Konu,
Premier Secrétaire de la CDPA-BT
ANNEE 2001
Profession: Député ou leçon du Gabon?
Les résultats du premier tour des législatives au Gabon n’ont pas reçu une couverture médiatique aussi large qu’on pouvait l’espérer. Les médias qui sont habituellement si prolixes sur ces genres d’événements en Afrique ont été plutôt assez discrets sur le cas gabonais. Et pourtant, ces élections et leurs résultats présentent un grand intérêt dans la problématique de la démocratisation par les urnes dans le présent contexte de la transition démocratique sur le continent. Et elles offrent à cet égard des leçons de nature à enrichir la réflexion sur le processus.
On sait que le Gabon est un exemple typique des régimes de dictature néo-coloniale montés par les «réseaux Foccart »dans le cadre de la politique africaine que De Gaulle entendait conduire pour maintenir les anciennes colonies françaises d’Afrique dans le giron de la France sous le couvert de la « décolonisation ». C’était l’objectif évident de la Communauté «franco-africaine et malgache», qui se muera peu de temps après en «coopération franco-africaine» et qui produira par la suite la «francophonie».
On se souvient de la restauration brutale du pouvoir de Léon M’Ba à Libreville par le corps expéditionnaire français envoyé par De Gaulle pour mater l’insurrection populaire qui remettait en cause le pouvoir à Libreville. Bongo était préparé par la France dès ce moment pour être le maître du Gabon. La Françafrique commença par faire de lui le vice-président du vieux Léon M’Ba que la maladie retenait à Paris. Albert Bongo organisa des législatives en mars 1967 et les gagna avec 99,5% des voix. Léon M’Ba mourut le 28 novembre 1968 et Bongo devint automatiquement président du Gabon. Il supprima alors la vice-présidence pour concentrer tous les pouvoirs entre ses mains avec la bénédiction de Paris, dissout le Bloc Démocratique Gabonais (BDG) de Léon M’Ba et créa son propre parti, le Parti Démocratique Gabonais (PDG), pour mieux contrôler le pouvoir. Bongo était ainsi en fait au pouvoir bien avant la mort de Léon M’Ba, et voici 34 ans qu’il est aux commandes de la dictature néo-coloniale au Gabon en tant que président.
Omar Bongo a tout mis en œuvre pour résister à la tourmente de la démocratisation et pour contrôler la transition démocratique au profit de son régime. Il y réussit d’autant mieux que le processus de la démocratisation s’était très tôt engagé dans la voie électoraliste au Gabon sous la pression de forces étrangères. Comment un régime despotique, qui a plongé ses racines dans le tréfonds d’un pays et dans la conscience de ses habitants pendant près de 40 ans n’offrirait-il pas à un potentat néo-colonial africain qui n’entend pas quitter le pouvoir, tous les moyens pour se relégitimer à chaque fois par les urnes?
En s’engageant dans la même logique électoraliste, les leaders de l’opposition gabonaise ont marginalisé la population en réduisant de fait son rôle dans le processus de la démocratisation au « vote des bêtes sauvages ». Plus que jamais affaiblis par cette marginalisation ils ne pouvaient rien faire d’autres que de dénoncer la fraude après les élections, de dialoguer avec le régime si ce dernier trouve un intérêt à dialoguer avec eux, et de passer le reste du temps à « se battre » pour obtenir des « élections libres, transparentes et équitables ». Jusqu’aux prochaines élections! C’est ce que des leaders les plus en vue de l’opposition gabonaise ont fait jusqu’à présent, en se livrant par ailleurs une concurrence à mort pour le pouvoir.
A la veille de ces dernières élections législatives, l’un des leaders, Pierre Mamboundou, avait enfin prôné le boycott pour sortir du cercle vicieux du discours de la démocratisation par les urnes en Afrique. Pierre-Louis Agondjo avait proclamé au contraire qu’il irait aux élections pour aller «se battre» afin d’obtenir la révision de la loi électorale. Les premiers résultats du premier tour des législatives viennent de donner une majorité écrasante au parti de Bongo: 54 sièges sur 120, contre 3 sièges pour l’opposition, et autant pour les indépendants. D’autres candidats de l’ancien parti unique détiennent de bonnes positions. On ne peut pas en dire autant pour l’opposition.
Pierre-Louis Agondjo est le seul élu de son parti. Son vice-président a reconnu au lendemain des élections que la participation de son parti est une erreur, tout en précisant qu’il s’agit là d’une position personnelle. Quant à Pierre-Louis Agondjo, il sera député s’il est élu au deuxième tour. Il passera la législature à défendre ses points de vue dans une assemblée où il ne pourra rien changer et où il jouera le rôle de la cinquième roue dans une démocratie «apaisée» à la gabonaise. En attendant, le peuple gabonais continuera de subir le pouvoir despotique de Bongo, de voir les puissances financières étrangères piller les ressources du pays sous la protection du régime et de mijoter doucement dans la misère. Pierre-Louis Agondjo, Paul M’ba Abessole, et autres cohabiteront ainsi jusqu’aux prochaines élections législatives, sur le dos des masses miséreuses du Gabon.
Bien entendu, il n’est pas dit que le cas des législatives gabonaises peut automatiquement se reproduire ailleurs. Mais il devrait donner à réfléchir. Surtout sur l’après législatives.
Lomé, le 18 décembre 2001
Prof. E. Gu-Konu
Premier Secrétaire de la CDPA-BT
De la rumeur à l’information. I – Le harcèlement de la presse indépendante
(Convention Démocratique des Peuples Africains – Branche Togolaise (CDPA-BT), http://www.cdpa-bt.org, 7 novembre 2001)
Avec la libération de Abdul Ganiou Bawa, le dernier des trois journalistes récemment arrêtés est sorti de prison. C’est le directeur de publication de « Le Combat du Peuple » qui fut libéré en premier lieu ; il aurait demandé à être gracié. Ce fut ensuite le tour du directeur de « Nouvel Echo » ; et en dernier lieu, celui de « Echos d’Afrique ». Il faut souligner d’ailleurs que si M. Klu Nevame est sorti de prison, les poursuites engagées contre lui ne semblent pas être levées pour autant. Il n’en demeure pas moins qu’il est aujourd’hui libre de ses mouvements. C’est déjà un acquit inestimable. Quant à M. Abdul Ganiou Bawa mis en prison pour « atteinte à l’honneur » et « publication de fausses nouvelles », il aurait bénéficié d’une intervention personnelle du chef de l’Etat auprès du préfet de Dankpen pour que ce dernier retire sa plainte contre le journal.
Depuis quelques années, la presse indépendante a toujours fait l’objet d’un harcèlement presque hargneux dans le pays. La situation s’est notablement aggravée depuis le dernier remaniement ministériel ayant porté Walla Sizing au ministère de l’intérieur et de la décentralisation, et Seyi Mémène au ministère de la justice. Aussi, ne peut-on pas faire mieux que de se réjouir de ces mises en liberté successives. On peut même être tenté de voir dans ces événements le signe d’une évolution positive de l’état d’esprit affiché jusqu’alors par le régime à l’égard du principe de la liberté de la presse dans le pays. Et cette tentation pourrait être d’autant plus justifiée que le pouvoir vient de manifester pour la première fois l’intention de modifier la composition de la HAAC pour permettre à l’opposition d’y être représentée.
Mais une hirondelle ne fait pas le printemps, si toutefois hirondelle il y a. Les problèmes fondamentaux de la liberté de la presse et de l’information demeurent en effet, de même que ceux des rapports difficiles du régime avec les journalistes. Les conditions de l’interpellation et de l’incarcération du directeur de « Nouvel Echo », de même d’ailleurs que celles de sa libération remettent crûment ces problèmes à l’ordre du jour. Ils font partie des problèmes de la démocratisation du système politique en vigueur, et de ceux de l’enracinement futur de la démocratie dans le pays. En conséquence, il convient de ne pas les perdre de vue un seul instant, mais de les poser constamment pour susciter davantage une prise de conscience qui étende sans cesse le champ des libertés démocratiques dans le pays.
La liberté de la presse et de l’information ne se limite pas à la possibilité pour les journaux d’exister sous la menace permanente pour les hommes de presse de se voir jetés en prison pour peu qu’ils osent rechercher la vérité, et qu’ils portent un regard critique sur les hommes du pouvoir. Elle va bien au-delà de cette existence précaire. La presse n’est véritablement libre dans un pays, et l’information n’y est réellement libérée que si le journaliste est effectivement en mesure de jouer à travers son journal le rôle social qui lui revient dans le fonctionnement démocratique de la société. Un Etat où la presse n’est pas libre est un Etat où les hommes du pouvoir peuvent se permettre de faire tout ce qu’ils veulent. Et en toute impunité. Un tel Etat n’est pas un Etat démocratique.
La charge portée contre le directeur de « Nouvel Echo » pour l’envoyer moisir en prison est qu’il a puisé son information dans la « rumeur ». Ce dont il ne s’est point caché du reste. Et l’on en a automatiquement déduit que l’information est fausse. Il faut souligner que le ministère public, qui envoie en prison pour cette raison, n’a pas encore démenti l’information en question. Et il n’a pas établi la preuve de son inexactitude. L’arrestation du directeur de « Nouvel Echo » pose ainsi un double problème, celui du rapport entre la rumeur et l’information, et celui de la rumeur en rapport avec l’établissement de la vérité.
La rumeur, c’est l’opinion qu’une foule de personnes se fait sur quelqu’un ou sur quelque chose, et qui circule de bouche à oreilles au sein de la population. A ce titre, la rumeur est rarement le produit d’une pure invention. Elle a toujours un fondement vérifiable, qui peut être vrai ou faux. Et c’est parce que ce fondement peut être vrai ou faux que la rumeur peut être un point de départ pour l’établissement de la vérité. A partir de ce moment, estimer à priori que la rumeur est fausse peut traduire une volonté d’étouffer le fait colporté par elle, et empêcher l’établissement de la vérité sur ce fait. « Il n’y a pas de fumée sans feu… ». Il se trouve en plus que le fait colporté par la rumeur depuis quelques semaines déjà et rapporté dans son journal par le directeur de « Nouvel Echo » est extrêmement grave, s’il est établi qu’il est vrai. Et c’est bien pour cette raison qu’il est impératif d’établir sa véracité ou son inexactitude aux yeux du public. Pour ne pas donner ainsi le sentiment (vrai ou faux) de chercher à l’étouffer par la force ou à le couvrir par la ruse.
Il se joue aujourd’hui une véritable tragédie sociale au Togo. Sous prétexte « qu’il n’y a pas d’argent dans le pays », l’Etat ne paie qu’irrégulièrement les salaires et les pensions. Et il fait tarir toutes les sources d’argent par une ponction fiscale de plus en plus débridée. Le pouvoir d’achat de l’immense majorité de la population est au-dessous de zéro. L’économie s’en trouve de plus en plus délabrée, les hommes ne pouvant plus acheter ni vendre. La population meurt par fournée, faute de pouvoir manger et faute de pouvoir se soigner. Dans cette tragédie sociale que l’on joue avec tant de désinvolture, il est intolérable qu’une poignée d’individus se permette de piller littéralement le trésor public comme le fait ressortir opportunément la Commission de lutte contre la corruption et le sabotage économique. Et ce pillage est d’autant plus criminel qu’il porte sur des montants scandaleusement élevés.
Dans cette tragédie sociale qui se joue, lorsque la rumeur publique colporte un nouveau cas possible de malversation, et qu’un journaliste en fait état en précisant par ailleurs qu’il s’agit de rumeurs, ce qu’une autorité publique a de mieux à faire dans une situation de transparence politique n’est pas de jeter ce journaliste en prison, mais d’ouvrir une enquête pour établir la vérité. Et de féliciter au demeurant ce journaliste pour avoir tenté de contribuer à l’établissement de la vérité, même si l’enquête révélait par hasard que la rumeur s’est trompée. Bien entendu, cette pratique courageuse n’est envisageable que dans une situation de transparence politique que les Togolais souhaitent tant, et qu’ils revendiquent depuis quelques années à travers la quête du changement démocratique. La presse libre est une précieuse garantie de la transparence politique. Elle aide le pouvoir public à se préserver de la tentation de couvrir l’infamie.
Alors ? La rumeur ne peut-elle pas être le point de départ pour l’établissement de la vérité dans certains types de régimes politiques ? Et dans ces types de régimes politiques où l’accès à l’information est plus ou moins hermétiquement fermée et les média publics sous contrôle, les journalistes n’ont-ils pas le devoir d’être suffisamment courageux pour recourir au moins à la rumeur en vue d’établir la vérité sur les faits qu’elle colporte ? L’importance du rôle de la presse libre dans la société fait de ces questions des questions importantes dans cette situation de transition que traverse le pays. Elles devraient faire par conséquent l’objet de débats publics. Dans cette situation de transition, il devrait s’agir, avant toutes choses, de rénover la réflexion sur les principes démocratiques afin de pouvoir innover, et de définir les modalités de l’enracinement de ces principes dans l’action politique.
Dans tous les cas, si l’on estime que la rumeur ne peut pas, cas échéant, servir de point de départ pour l’établissement de la vérité, la seule façon de mettre le journaliste à l’abri de la tentation d’y recourir faute de mieux est donc d’ouvrir largement le champ de l’information. Cette ouverture implique la plus grande transparence possible dans la gestion de la chose publique, la suppression des entraves à l’accès libre du journaliste aux lieux de production de l’information, une réelle liberté de l’information et de la presse, une véritable pluralité des idées… L’avenir démocratique du pays en dépend.
(À suivre: II – Déontologie et liberté de la presse)
Lomé, le 07 novembre 2001
Prof. E. Gu-Konu
Premier Secrétaire de la CDPA-BT
Interview du 1er Secrétaire de la CDPA-BT à Togoforum
(Convention Démocratique des Peuples Africains – Branche Togolaise (CDPA-BT), http://www.cdpa-bt.org, 18 octobre 2001)
(…Il faut se battre ensemble pour faire avancer la lutte pour la démocratie au Togo et en Afrique. C’est une condition incontournable pour le développement et pour une prospérité partagée. C’est pour cela que chaque Togolais, chaque Togolaise doit se sentir concerné, si son pays lui tient à cœur, et apporter sa contribution, une contribution la plus concrète possible dans un cadre approprié qu’il aura choisi en toute liberté, en toute connaissance de cause et en fonction, non pas des hommes, mais des idées et des pratiques politiques en œuvre dans ce cadre. Une implication plus décisive et plus concrète de la diaspora peut jouer un rôle déterminant dans l’émergence de la force alternative dont il est question et contribuer à accélérer le processus du changement démocratique…)
Togoforum: Pr. Gu-Konu, vous avez fait un commentaire après la conférence de presse donnée par le Comité de Crise le 24 août 2001 au Foyer Pie XII de Lomé. Beaucoup de lecteurs saluent votre analyse et estiment être une contribution de taille, en ce moment où le combat pour la liberté au Togo est dans le besoin d’un second souffle.
Avant de revenir sur votre commentaire, nous aimerions aborder d’entrée le cas Agboyibo qui fut d’ailleurs la motivation de la conférence de presse du Foyer Pie XII.
Quel message voulait délivrer le comité de crise à travers ladite conférence de presse? Qu’est-ce qui fut arrêté de concret et quelles en sont les conséquences sur le sort de Me Agboyibo?
Pr. Gu-Konu: Pas d’autres messages que celui d’informer l’opinion sur le déroulement du procès et sur les conditions de la détention du premier responsable du CAR. Vous savez qu’avant cette conférence les deux meetings organisés par l’opposition avaient été interdits et dispersés à coup de grenades lacrymogènes. Puisque le régime interdit à l’opposition d’informer l’opinion par le moyen des meetings, les partis politiques concernés ont choisi de le faire par le biais d’une conférence de presse.
Togoforum: La plupart des analyses au sein de l’opposition inscrivent l’arrestation et l’incarcération de Me Agboyibo dans l’habituelle logique crapuleuse et tyrannique du régime Eyadema. N’existe-t-il pas d’autres hypothèse quand on sait qu’il y avait le loup dans la maison pendant les jours qui ont précédé l’odieux verdict? Nous voulons parler du très célèbre Janu Lacaze de France.
Pr. Gu-Konu: La CDPA-BT a inscrit l’arrestation, le procès et l’incarcération d’Agboyibo dans la logique de l’arbitraire propre à un régime autocratique. C’est pour cette raison que la CDPA-BT a pris part à la lutte collective pour la libération du leader du CAR. Notre action s’inscrit dans la lutte que nous menons contre l’arbitraire, pour les libertés démocratiques, pour la justice dans toutes ses dimensions et pour la vérité. Le loup dont vous parlez, et qui aurait été dans la bergerie pendant les jours qui ont précédé l’odieux verdict ne nous intéresse pas dans ce cas précis. Notre préoccupation première, c’est la nature totalitaire et l’opacité du régime. Si le régime était démocratique, des loups aux dents longues ne viendraient pas faire n’importe quoi dans le pays.
Togoforum: Le second procès intenté par le pouvoir contre maître Agboyibo et le mandat de dépôt contre lui semblent confirmer qu’il existe un plan bien caché qui ne réussirait pas si le leader du CAR sortait de prison. Qu’en dites-vous?
Pr. Gu-Konu: Ce qui nous préoccupe à la CDPA-BT n’est pas l’existence ou non d’un plan caché, que nous ne connaissons donc pas puisqu’il est caché. Ce qui nous préoccupe, c’est que ce second procès, par le contenu des chefs d’accusation alignés comme par la procédure apparaît bien comme un coup monté et est donc tout aussi inique que le premier. C’est une autre manifestation de l’arbitraire. A notre avis, dans les conditions actuelles de la vie politique dans le pays, c’est cet arbitraire que toutes les forces démocratiques du pays doivent se mettre ensemble pour combattre jusqu’au bout, sans calculs inavouables.
Togoforum: Les autres leaders de l’opposition non encore emprisonnés semblent impuissants. Attendent-ils leur tour pour devenir imaginatifs?
Pr. Gu-Konu: Tous les partis de l’opposition, à l’exception de l’ADDI et du PDR ont participé à l’action, avec peut-être chacun des arrière-pensées certes. Mais en réalité, il s’agit plus d’une question de rapport de forces que d’imagination. Bien entendu, un peu plus d’imagination et de hardiesse peut permettre le renversement du rapport des forces.
Togoforum: Revenons à votre commentaire suite à la conférence de presse. Vous êtes sorti de la conférence plus inquiet qu’avant d’y aller. Pouvez-vous partager votre sentiment avec nous?
Pr. Gu-Konu: Je n’avais pas d’inquiétudes en allant à la conférence de presse. Je n’en suis donc pas sorti plus inquiet qu’avant d’y aller. Mon commentaire est une série de constats et non l’expression d’un état d’âme. Ces constats ne sont pas nouveaux et nous les avions déjà formulés à plusieurs reprises. Lisez les publications de la CDPA-BT: « La charte d’alliance » (décembre 1991), « l’Echec d’une transition » (mars 1995), « Dialoguer, pour quoi faire ? » (décembre 1998), « Parlez-moi du dialogue inter-togolais » (mai 2000)…, la liste est longue. Ce qui est nouveau, c’est que ces constats ont été remis en évidence par la conférence de presse. Et c’est une bonne chose. Les avoir refait pour la enième fois ne répond pas à un besoin de jeter la pierre aux autres, mais au souci de montrer une enième fois qu’ils constituent des problèmes concrets de notre lutte pour la démocratie et qu’ils appellent plus que jamais une réflexion novatrice pour une précision plus grande des objectifs de la lutte et une redéfinition des voies et moyens pour les réaliser.
Togoforum: Il semble donc qu’un diagnostic très rigoureux et peut-être douloureux s’impose aujourd’hui au sein de l’opposition togolaise et même au sein de la population. Par où faut-il commencer?
Pr. Gu-Konu: Par un bilan. Un bilan sans complaisance, objectif et courageux de ce qui a été fait jusqu’à présent. Et tirer de ce bilan les leçons qui s’imposent.
Togoforum: Professeur, attardons-nous un peu sur le peuple togolais. C’est quand même étonnant que la population togolaise aussi martyrisée qu’elle l’est, ne semble pas comprendre que son rôle soit le plus déterminant dans le changement tant voulu.
Vous écrivez: «La majorité des Togolais se comporte ainsi comme s’ils ne sont pas directement concernés par la lutte contre le régime despotique, comme s’ils sont des étrangers vivant dans le pays, comme s’ils sont des observateurs neutres de la vie politique nationale, comme s’ils ne sont pas tenus de s’impliquer dans la lutte en cours pour la démocratie dans le pays, comme s’ils ont choisi de se mettre à l’abri de tous les risques, comme s’ils sont là chacun pour indiquer aux leaders politiques la voie à suivre, cette voie étant pour chacun sa propre voie individuelle, ce qu’il pense tout seul, avec la certitude catégorique qu’il a tout seul raison contre tous.»
Les leaders de l’opposition étant issus de cette même population, n’y a-t-il peut-être pas lieu d’observer à la loupe la société togolaise elle-même avant de s’attaquer aux erreurs des leaders? N’est-ce pas parce que la population est ce qu’elle est qu’elle a les dirigeants qu’elle a? Le peuple a certainement certaines faiblesses intrinsèques. Quelles seraient selon vous les faiblesses inhérentes à notre population elle-même à corriger?
Pr. Gu-Konu: Non. Ce n’est pas étonnant. Quarante ans d’une dictature pure et dure, assortie d’un obscurantisme politique des plus aliénants, exerce des effets profonds sur une société, surtout si celle-ci vient à peine de sortir de l’oppression coloniale, et qu’elle commence à peine à chercher une nouvelle voie d’évolution.
Tenez. L’immense majorité de la génération Eyadema croit toujours que le salaire est une faveur, que le policier, le gendarme ou le militaire peut se permettre de faire tout ce qu’il veut à un civil et en toute impunité, que le recteur de l’Université peut décider de porter les frais d’inscription de 4200 F à 50000 F du jour au lendemain, que le régisseur de la prison peut imposer de lui-même le paiement de 200 F à toute personne qui veut rendre visite à un détenu, sans que les traces de ces taxes figurent où que ce soit dans la comptabilité nationale… Si déroutants qu’ils peuvent paraître, ces comportements de la population pris globalement s’expliquent donc. Pas par la nature des hommes, pas par des « faiblesses intrinsèques » à la société, mais par la nature du système qui gouverne le pays.
Vous posez bien le problème des leaders de l’opposition. Mais il faut qu’on s’entende d’abord sur le contenu du concept de leader d’une opposition à un régime d’oppression. Malheureusement cela risque de donner lieu à un long débat qui ne peut avoir sa place ici. Le leader de l’opposition au régime despotique est en principe une personne dont le niveau de conscience politique est plus élevé que la moyenne observable au sein de la masse opprimée. Et c’est justement parce que son niveau de compréhension des faits et des situations est au-dessus de celui de la masse sous-politisée et sous-informée qu’il peut être un leader. Son rôle est alors de contribuer à élever le niveau de la conscience politique de la masse pour faire de celle-ci une force organisée et combative. Il lui revient de trouver les voies et moyens, les mots et la pratique politique appropriés pour réussir dans cette tâche. C’est par là que le leader est ce qu’il doit être, à savoir la conscience agissante du peuple comme nous l’avons dit voici 12 ans dans l’Alternative. On ne saurait excuser les erreurs du leader de l’opposition par ce que vous appelez les « faiblesses intrinsèques » de la population, parce que le leader qui émerge de la masse du peuple opprimé a pour premier rôle d’amener ces masses à dépasser ses limitations pour pouvoir acquérir une conscience politique et civique la plus élevée possible.
Togoforum: Le Togo, comme aucun autre pays francophone d’Afrique, a connu la plus longue grève générale; le pays vit la pérennité des pratiques dictatoriales les plus inhumaine depuis pratiquement quarante ans ; notre pays se caractérise aujourd’hui par une situation économique des plus dégradées du Continent et une élite qui ne semble briller que par ses calculs individualistes. Vous le dites plus ou moins dans votre commentaire. Est-ce que dans ses conditions, le peuple togolais ne mérite pas qu’on lui jette quelques fleurs ? Le peuple n’a-t-il pas totalement raison de désavouer ses leaders d’opposition?
Pr. Gu-Konu: Il ne s’agit pas de se jeter des fleurs mais d’arriver à mettre un terme au régime despotique et à instaurer la démocratie dans le pays. Dans cette voie, les Togolais n’ont en réalité aucune raison de faire preuve d’autosatisfaction. Nous aurons droit qu’on nous jette des fleurs le jour où nous aurons réussi à mettre un terme au régime de dictature dans le pays. Il ne s’agit pas non plus de se contenter d’approuver ou de désavouer. Il faut aller au-delà de ces deux attitudes. Il faut pouvoir exercer un contrôle réel sur les leaders pour qu’ils tiennent droits, c’est-à-dire qu’ils définissent et conduisent une politique d’opposition conforme aux aspirations de la masse du peuple opprimé. Ce contrôle ne peut être une série de réactions spontanées, individuelles, au gré des humeurs du moment et sans suite dans les idées. Il ne peut être efficace qu’en étant un contrôle collectif exercé dans un cadre défini et sur la base de structures prévues à cet effet dans ce cadre.
Autrement dit, on ne peut exercer ce contrôle qu’en étant dans un cadre organisé. Si les membres d’un parti d’opposition considèrent que la direction de leur parti conduit une politique inappropriée, il leur revient d’interpeller cette direction pour qu’elle conduise une politique plus conforme, ou alors qu’ils changent cette direction, le cas échéant, en usant des procédures prévues par les statuts du parti. Naturellement, ces genres d’actions ne sont possibles que dans le cas d’un parti démocratique.
Si les militants d’un parti d’opposition estiment tout changement impossible du fait du caractère non démocratique de l’organisation, il faut qu’ils en sortent pour pouvoir apporter leur contribution à la lutte dans le cadre d’un autre parti. Un autre parti qu’ils peuvent créer eux-mêmes en tant que parti dissident, ou un parti déjà existant dont la pratique politique leur convient mieux. Aucun des partis d’opposition actuels n’est un modèle de démocratie tant dans leurs structures que dans leurs mécanismes de fonctionnement ; mais ils ne sont pas tous des partis totalitaires et réactionnaires non plus. On peut faire son choix parmi eux si l’on sait ce que l’on veut et si on veut réellement faire quelque chose pour faire avancer le processus de démocratisation.
Togoforum: Le facteur France est sans nul doute un facteur déterminant dans les malheurs d’un peuple aussi démuni que le nôtre. La dictature a été installée, est soutenue, et entretenu par la France. Pourtant, les intellectuels togolais pratiquent la langue de bois vis-à-vis de ce facteur, certainement par calcul politique. Que diriez-vous au regard de ce facteur, surtout à l’endroit du peuple et de la jeunesse.
Pr. Gu-Konu: Peut-être seulement deux choses pour le moment.
D’abord qu’il faut toujours faire une distinction entre le peuple de France et la classe dirigeante française qui fait la politique de la France en Afrique. Il est vrai que ce sont les Français qui élisent ceux qui font et votent les lois et qui acceptent donc la politique africaine de la France. Mais voyez les taux d’abstention aux élections: ils baissent sans cesse. Et quand on ajoute à cela le faible niveau d’information politique de la majorité de ceux qui vont aux urnes… Le petit peuple de France qui vote savait-il en réalité quelque chose de la mission assignée à Elf dans la politique africaine de la France et dans la défense des intérêts de la France en Afrique ? Même si au bout du compte il bénéficie dans une certaine mesure des retombées de cette magouille politico-financière d’Elf sur le continent, il est victime lui aussi d’une situation qu’il n’a souvent pas les moyens de contrôler. Il faut préciser que la classe dirigeante française dont il est question ne se réduit pas aux hommes politiques, mais se prolonge par les féodalités financières que ces hommes politiques représentent dans leur majorité et dont ils défendent les intérêts abusivement confondus aux intérêts de la France.
Ensuite, que la tendance consistant à croire que notre salut ne peut nous venir que de l’extérieur est désastreuse. Le peuple togolais, notamment sa jeunesse doit savoir qu’il lui revient de mettre lui-même la jarre sur les genoux quitte à ce qu’un apport externe l’aide à la mettre sur la tête. Autrement dit qu’il est illusoire de croire que ce sont les autres qui viendront nous débarrasser de notre régime despotique et nous installer dans le paradis de la démocratie. Les forces démocratiques qui, en France ou ailleurs, oeuvrent sincèrement au progrès des peuples peuvent nous aider et sont prêts à le faire. Mais elles ne peuvent apporter leur concours que si nous montrons la détermination à nous en sortir, et si nous faisons réellement ce qu’il faut pour cela. Parce que ces forces démocratiques de France et d’ailleurs savent qu’il ne leur revient pas de nous dire ce qui est bon pour nous et de venir nous le faire à notre place. Nous devons les aider à nous aider.
Togoforum: Il semble que les leaders de l’opposition ne comprennent pas ou ne veulent pas comprendre que notre la population en elle-même est une force. Nous avons connu une série de sommets de Colmar, une série de sommets de Ouaga, une série de sommets de Lomé, mais la crise togolaise demeure intacte. Alors, les facilitateurs facilitent-ils ou compliquent-ils les choses dans la crise togolaise?
Pr. Gu-Konu: Il ne m’appartient pas de dire s’ils facilitent ou s’ils compliquent les choses. Je vous rappelle seulement que la CDPA-BT avait dit et écrit plusieurs fois depuis septembre 1998 que l’idée de dialogue intertogolais introduite dans cette confusion politique d’après le coup de force électoral n’était qu’un moyen d’occuper les Togolais pour permettre au régime de retomber sur les fesses.
Et nous avons dit qu’au lieu d’aller dialoguer avec le régime usurpateur, il valait mieux mettre l’accélérateur sur la mobilisation populaire.
C’est pour ces raisons que la CDPA-BT avait refusé de participer au dialogue. Ceux qui ne pensaient qu’en termes de législatives et de députation nous avaient traités une fois de plus d’irréalistes et avec mépris. Et ce sont ceux-là qui se sont mis à se plaindre avec démagogie que l’opposition a été » flouée » et que le dialogue a permis à Eyadema de conserver son fauteuil. Sans avoir le courage politique de dire que d’autres les avaient mis en garde contre ce danger. Nous étions convaincus que le dialogue ne résoudrait pas le problème de la démocratisation dans notre pays, mais qu’il contribuerait au contraire à relégitimer le régime. Ceux qui n’ont pas intérêt à ce qu’il émerge en Afrique de véritables Etats démocratiques sur les cendres des régimes d’oppression qu’ils ont toujours soutenus en Afrique ne peuvent pas avoir de la transition démocratique la même conception que ceux qui subissent au quotidien l’oppression despotique sur le continent. C’est normal. C’est à nous de prendre les dispositions nécessaires pour ne pas nous laisser flouer par les hommes du régime et les forces étrangères qui les soutiennent.
Togoforum: Vous expliquez le comportement défaitiste de la population togolaise par la marginalisation dont elle fait l’objet de la part de certains leaders de l’opposition qui se prendraient pour des « messies » capables de tout faire à la place ce peuple.
Vous écrivez: «Cette marginalisation est une des raisons essentielles de la faiblesse de l’opposition face au régime en place. Car, et on ne le dira jamais assez, la force de l’Opposition ne réside pas dans la tête et dans le porte-monnaie de ses leaders, si charismatiques soient-ils. Elle réside d’abord dans la force organisée de la masse du peuple, et dans la capacité de cette masse à se mettre en mouvement toutes les fois que cela s’impose, pour exercer la pression nécessaire en vue d’atteindre un but déterminé. Et organiser la masse du peuple pour en faire une force politique d’opposition relève avant tout du domaine des partis politiques d’opposition, et donc des directions de ces partis».
Avez-vous l’impression que c’est en toute connaissance de cause que les leaders de l’opposition marginalisent la population au lieu d’en faire sa force? Est-ce par ignorance ou par malice, surtout lorsqu’on connaît le déséquilibre des rapports de force sur le terrain?
Pr. Gu-Konu: Il convient d’éviter les procès d’intention. Ce qu’on peut dire par contre, c’est que impliquer activement la population dans le processus politique n’est pas chose facile. Il faut beaucoup de moyens pour le faire. Des moyens matériels et des moyens humains. Mais quand on estime à priori que le seul rôle politique dont le peuple est capable est d’assister aux manifestations organisées par les leaders et d’aller aux urnes, on ne juge pas nécessaire d’entreprendre l’effort requis pour aller au-delà. Et puis, un peuple activement impliqué dans le processus politique, donc informé et capable d’initiatives devient plus exigeant, et donc plus gênant. La gestion démocratique de la société est infiniment plus difficile que sa gestion autocratique ou sa gestion technocratique.
Togoforum: Les Ivoiriens ont prouvé l’année dernière qu’ils constituaient une force lorsque le général Guéi a voulu confisquer leur victoire. En 1998, le peuple togolais avait déjà fait l’expérience du même genre de confiscation, mais les résultants sont différents dans les deux pays. Comment expliqueriez-vous que nous autres togolais ayons tendance à espérer notre salut de l’extérieur plutôt que de l’intérieur? Que se passe-t-il dans notre mentalité, Professeur ? Sommes-nous un peuple plus inculte que d’autres?
Pr. Gu-Konu: Nous ne pensons pas que le problème se pose en ces termes. Trouvez les moyens d’élever la conscience politique du peuple et impliquez-le à fond dans le processus politique et il n’acceptera plus n’importe quoi. Et à partir de ce moment, il prendra confiance en lui-même. Et il ne verra plus dans l’apport extérieur qu’un appoint éventuel à l’effort qu’il doit fournir pour recouvrer la liberté.
Togoforum: Vous écrivez: «Car, ce n’est pas la «Communauté internationale» qui défendra demain le régime démocratique togolais s’il s’agit d’un régime véritablement démocratique. C’est avant tout le peuple organisé qui le protègera et le défendra, s’il s’y retrouve réellement. Et à condition qu’il soit organisé et qu’il représente une véritable force politique».
Qui peut organiser le peuple togolais?
Pr. Gu-Konu: Ce sont les partis politiques d’opposition. Parce que ce sont eux qui, par leur nature, sont habilités à définir un projet de société, une orientation nationale et la politique nationale pour réaliser ce projet dans l’orientation nationale retenue. Affirmer ceci n’est pas exclure les organisations associatives (syndicats, associations de défense des droits de l’homme, associations régionales ou locales de développement…) de la lutte en cours pour le changement démocratique. Elles peuvent y contribuer efficacement dans le sillage des partis d’opposition. Mais elles ne peuvent pas prétendre à un rôle politique autonome par rapport aux parties politiques parce que telle n’est pas leur mission, et leurs structures comme leurs règles de fonctionnement ne les prédisposent pas à un tel rôle.
Dire que l’organisation politique du peuple revient aux partis de l’opposition c’est-à-dire à l’opposition peut aggraver la confusion au sein et au sujet de l’opposition togolaise. D’abord, parce que tous les partis d’opposition ne font pas de l’organisation de la masse une priorité. Mais surtout, tous les partis d’opposition n’ont pas le même projet de société, une même vision de l’orientation de la vie nationale, les mêmes positions idéologiques, la même attitude à l’égard des puissances étrangères. Cette diversité est tout à fait normale. Et c’est heureux. Si non, il n’y aurait qu’un parti unique de l’opposition. La diversité des positions idéologiques, de la vision de ce que doit être le pays demain et des pratiques politiques découlant de ces positions offre aux togolais un éventail de choix.
Ce n’est donc pas l’opposition qui organise parce que ce concept est trop flou. C’est chaque parti d’opposition qui propose une forme d’organisation. Et il appartient aux Togolais, à chaque togolais de choisir. Devant le problème politique togolais, dans cette lutte en cours pour la liberté, aucun togolais ne doit rester indifférent, resquiller, attendre. Mais ce choix doit se faire en toute connaissance de cause, en fonction des idées et des pratiques, et non pas en fonction des personnes et des intérêts personnels, notamment ce qu’on espère tirer dans l’immédiat ou demain de tel ou tel autre parti.
C’est à ce niveau que l’on voit la nécessité de l’information qui est étroitement en rapport avec le problème du faible niveau de conscience politique. Lorsqu’on n’est pas informé, on a du mal à choisir et l’on reste dans son coin en rongeant son fer. Lorsqu’on choisit en n’étant pas informé ou en étant mal informé, on fait 9 fois sur 10 un choix erroné. Et l’on pose des actes erronés. Voilà pourquoi la rétention de l’information et la marginalisation de la population sont source d’obscurantisme politique.
Togoforum: Vous reconnaissez qu’«organiser une masse populaire comme celle que constitue à l’heure actuelle le peuple togolais après plus de trente ans de cette dictature n’est pas une tâche facile. Vous ajoutez: «Mais c’est une tâche historiquement incontournable.»
Ceci suppose beaucoup de travail pour un minimum d’harmonisation des stratégies. Est-ce possible avec l’opposition togolaise actuelle? Beaucoup de leaders semblent rouler pour des intérêts basés loin du Togo.
Pr. Gu-Konu: Dans l’état actuel des ambitions politiques, aucune harmonisation des stratégies n’est possible parce que les enjeux électoraux qui conditionnent en dernier ressort la vision du processus de démocratisation sont trop concurrentiels, notamment au niveau des quatre partis du CPS (et des autres aussi d’ailleurs). Tenez : si l’action engagée pour la libération de Agboyibo s’est terminée en queue de poisson de façon si minable, c’est simplement parce que les trois autres partis du CPS ont senti après le meeting du 11 septembre 2001 que toute cette affaire tourne à une propagande électorale effrénée pour le CAR et Agboyibo. Et ils n’ont pas hésité à torpiller le mouvement dès la fin de ce meeting. Il est vrai que le CAR aussi, volontairement ou inconsciemment, n’a pas résisté à la tentation d’exploiter ce procès inique et sa suite à des fins électorales. Ceci étant, si les enjeux électoraux n’avaient pas prévalu, si tous les partis de l’opposition avaient considéré le mouvement pour la libération de Agboyibo comme un mouvement contre l’arbitraire du régime avant toutes choses, l’action aurait pu être poursuivie. Même si elle ne parvenait pas à créer la pression politique suffisante pour forcer le pouvoir à relâcher le responsable du CAR, elle aurait pu créer un climat de mobilisation politique croissante favorable à la lutte globale pour la fin du régime despotique.
Togoforum: Vous faites remarquer que certains leaders de l’opposition actuelle privilégient «l’opposition élitiste par rapport à l’opposition de masse, la crédibilité politique extérieure par rapport à la crédibilité politique à l’intérieur du pays, la pression extérieure par rapport à la pression de la masse (qu’il faut organiser), les solutions électoralistes et les « dialogues » par rapport aux situations de blocage politique qui offrent à la masse du peuple l’occasion de se mobiliser pour intervenir sur la scène politique et peser sur cours de l’évolution.»
Les facteurs extérieurs jouent un rôle décisif dans la naissance de nos difficultés actuelles et devraient contribuer lorsqu’ils sont localisés à dénouer les crises. Professeur, l’ONU et d’autres organisations internationales avaient joué un rôle important dans la « décolonisation » et les « indépendances ». Il existe actuellement des mouvements en France, dont l’association Survie, qui luttent pour que les responsables politiques français cessent de jouer des rôles négatifs dans le bien-être des peuples d’Afrique. N’est-ce pas que c’est dans cet esprit que nos élites devraient approcher l’autorité française et autre?
Pr. Gu-Konu: Le contexte mondial dans lequel s’était opéré la » décolonisation » n’est pas le contexte mondial dans lequel les peuples d’Afrique se battent désespérément pour la démocratie. L’ONU de 1958-60 n’est pas l’ONU d’aujourd’hui. Voilà pourquoi il est illusoire de croire que cette institution peut encore faire aujourd’hui ce qu’elle avait fait hier en faveur des peuples opprimés il y a 50 ans.
Il existe dans le monde des forces progressistes qui se battent ou sont disposés à se battre pour la liberté des peuples opprimés et pour le respect des droits humains. Survie en est une. Il en existe d’autres. Et il existe même des individus qui interviennent ou sont prêts à apporter un concours utile. Les forces africaines qui luttent pour la démocratie en Afrique doivent aller au-delà de ce que fait Survie en France ou d’autres organisations du même genre en Allemagne ou ailleurs dans le monde. Elles doivent faire ce qu’il faut pour que les organisations démocratiques du monde fassent un choix clair, le même dont je viens de parler pour chaque togolais.
Un choix qui leur permette de jouer aux côtés de ceux qui luttent pour la démocratie en Afrique un rôle susceptible de contribuer le plus concrètement possible à l’émergence d’une puissante organisation politique capable de renverser le rapport des forces actuelles pour que les régimes dictatoriaux disparaissent et laissent la place à des systèmes politiques démocratiques sur le continent.
Togoforum: Vous affirmez que l’élitisme qui caractérise l’opposition togolaise l’a amenée à cohabiter volontaire ou involontairement avec la dictature de Lomé. Pouvez-vous vous expliquer davantage sur ce point?
Pr. Gu-Konu: C’est parce que nous concevons la lutte de façon élitiste que nous ne voulons pas impliquer les masses populaires dans le processus politique, ou que nous ne parvenons pas à le faire. Ce faisant, nous nous privons de la force que représente la masse de la population. Et nous sommes donc en position de faiblesse par rapport au régime. Dans cette position, nous n’avons d’autres choix que de rechercher les voies de conciliation avec le régime. Ces voies sont les dialogues et autres médiateurs. Elles nous conduisent forcément à la collaboration, et donc à la cohabitation avec le régime despotique. Toute la période de notre histoire, qui va du coup de force électoral jusqu’au dernier passage des facilitateurs, est une période de cohabitation et en fait de collaboration. Celle qui va s’ouvrir avec les législatives à venir en est une autre. Il en fut de même de celle marquée par le passage de Kodjo à la primature…
Togoforum: Professeur, Il semble que notre lutte soit plus difficile qu’à l’époque des indépendances!
Pr. Gu-Konu: C’est exact. A l’époque des indépendances, les nationalistes s’étaient unis autour d’un objectif clair: celui de l’indépendance et de l’unification. Et ils ont su mobiliser l’ensemble de la population autour de cet objectif. Aujourd’hui, la course au pouvoir engagée avec empressement et dans le désordre par certains partis de l’opposition dès avant la Conférence nationale a brouillé l’objectif de la lutte et a paralysé la mobilisation conséquente de la population. Ces tendances ont naturellement rendu la lutte plus difficile, sans compter les pressions négatives des forces étrangères. Mais si la lutte est plus difficile aujourd’hui qu’hier, elle n’est pas impossible. Et la difficulté ne doit pas donner lieu au découragement et à l’abandon.
Togoforum: Il ressort de votre commentaire, la nécessité de «l’émergence d’une puissante force alternative regroupant tous ceux qui ne se retrouvent pas dans la tendance dominante de la politique d’opposition actuelle.»
Vous estimez qu’il ne doit pas s’agir d’une réorientation de la politique d’opposition actuelle, mais d’une nouvelle force. N’est-ce pas là une démarche polémique même si elle apparaît courageuse? Comment la définissez-vous, cette force alternative? Quels seront précisément ses objectifs et ses moyens d’action?
Pr. Gu-Konu: Non. La démarche n’est pas polémique. D’abord parce que cette force alternative est une nécessité historique dont la fonction est de débloquer la situation et de faire avancer la révolution démocratique. Il en a toujours été ainsi dans l’histoire. Ensuite parce que l’idée de l’émergence de cette force alternative n’est pas une utopie. Elle peut se constituer aujourd’hui si les Togolais le veulent, si chaque togolais est décidé à contribuer de la façon la plus concrète possible à son émergence. Qu’on le veuille ou non, cette force se constituera. Si les conditions de sa formation, de son émergence ne sont pas réunies aujourd’hui, elles le seront demain.
Nous sommes en fait dans un processus historique continu. La lutte anticoloniale est portée par des forces nouvelles différentes de celles qui se sont opposées à la conquête coloniale, et à la » décolonisation » ; les indépendances néocoloniales sont une étape, une sorte de pallier. Les insurrections populaires des années 80-90 sont également portées par des forces nouvelles par rapport à celles qui avaient mené la lutte pour les indépendances ; la démocratie grise qui est partout à l’horizon est un autre pallier qui se forme. Si la nouvelle force alternative n’émerge pas aujourd’hui, elle finira tôt ou tard par se constituer pour nous faire passer de la démocratie « apaisée » à une démocratie réelle.
Mais les hommes ont la capacité d’accélérer le cours de l’histoire s’ils ont une bonne organisation pour cela. Cette force alternative sera constituée par une seule formation politique mais massive, suffisamment forte pour entraîner les autres dans son sillage, ou alors par des partis politiques alliés dont les positions idéologiques, les objectifs, les mots d’ordre et la pratique politique sont de nature à susciter un vaste mouvement qui portera sans cesse l’alliance en avant. Et, dans la situation actuelle, l’objectif premier de cette force politique alternative devra être la fin des régimes despotiques néocoloniaux du continent et la création d’institutions nouvelles pour instaurer et enraciner la démocratie sur les cendres de ces régimes despotiques. Vous voyez qu’on n’a pas besoin d’être dans le fauteuil d’Eyadema avant de réaliser ce double objectif. Parce que le passage de la dictature à la démocratie n’est pas l’affaire d’un seul homme, d’un leader si charismatique soit-il, mais l’affaire de la masse du peuple en mouvement.
C’est une tâche collective. On a dit à tort et à travers que le départ de Eyadema créerait un vide politique. Je suis persuadé que le peuple organisé saura définir des mécanismes nécessaires au fonctionnement pacifique et efficace de la transition démocratique qui s’ouvrira avec la fin du régime despotique. Il est des situations historiques qui réveillent le génie d’un peuple et lui permettent de trouver les solutions nécessaires pour sa marche en avant.
Togoforum: Vos propositions semblent appropriées pour le contexte actuel du Togo. Toutefois, la mise en oeuvre d’une telle force alternative ne sera pas aisée si l’on tient compte du fait que les leaders des partis politiques actuels, y compris le pouvoir, ont réussi à diviser la population togolaise autour de critères très peu défendables tels que l’ethnicisme, la distribution de billets de banque, les intérêts illégaux et illégitimes.
Pr. Gu-Konu: Oui. Elle ne sera pas aisée. Elle sera même très difficile. Faut-il pour autant se contenter de ce qui se passe actuellement et accepter de collaborer avec un régime dont le peuple ne veut plus ? Si les Togolais ont la détermination de créer cette force alternative, ils sauront trouver le moyen de lui éviter les écueils de la division de l’ethnicisme, du régionalisme, des conflits de leadership. Le refus de collaborer avec le régime autocratique et la ferme volonté de tous les Togolais ayant compris aujourd’hui la nécessité de l’émergence d’une force alternative constituerait un très grand pas dans le sens de la mise en oeuvre d’une telle force.
Togoforum: Vous écrivez: «Les leaders opposants qui tiennent les devants de la scène politique aujourd’hui sont convaincus depuis octobre 1990 que le moment est venu pour chacun d’entre eux de devenir un chef d’Etat ou, à défaut, d’exercer d’une façon ou d’une autre une parcelle du pouvoir, et de le faire avec le moins de risques possibles pour eux. Ils n’ont pas compris qu’il s’agit, avant toute chose, d’abolir le pouvoir despotique, et que c’était là la signification première et le but immédiat de l’insurrection populaire engagée dans la confusion en octobre 1990.»
Vous semblez dire: « Démocratie d’abord, multipartisme ensuite », comme l’avait dit le Professeur Gnininvi.
Pr. Gu-Konu: La formule est belle. Mais elle est trop lapidaire pour ne pas être chargé d’ambiguïtés. Ce que voulaient les Togolais en octobre 90, c’était la fin du régime despotique par le » départ d’Eyadema « . Ce qui suppose tout naturellement la suite, c’est-à-dire la mise en place des institutions qui garantissent les libertés dont on avait été privé pendant 23 ans. La pluralité de partis politiques d’opposition ne s’opposait pas dans son principe à la réalisation de cet objectif. Les partis d’opposition pouvaient se donner une plate-forme commune (comme nous l’avions propose quand certains avaient émis l’idée d’une fusion des parties) pour faire converger les actions vers cet objectif. Ce qui n’a pas été le cas parce que dès avant la Conférence nationale ces chefs de parti affichaient déjà des ambitions concurrentielles. C’est là le fond du problème ; et il demeure. Par ailleurs, le multipartisme est une des expressions de la démocratie pour laquelle nous nous battons. Mais dans le contexte politique spécifique du pays, c’est en même temps un des instruments de réalisation et d’enracinement de la démocratie. Et c’est la première conquête que nous avons faite au plan des institutions démocratiques. Comment est-il possible de mettre au placard cet instrument de démocratisation que nous venons de conquérir, en nous disant: Réalisons d’abord la démocratie avant d’aller le chercher ?
L’obstacle à la démocratisation n’est pas le multipartisme mais la lutte concurrentielle des partis de l’opposition pour le pouvoir tout de suite.
Togoforum: Que répondrez-vous à tous ceux qui diront que vous tentez de tirer la couverture à vous? Beaucoup n’hésiterons pas à voir dans votre démarche celle de votre parti politique, la CDPA-BT.
Pr. Gu-Konu: Je suis le 1er Secrétaire de la CDPA-BT. Les positions que je défends ne sont pas mes positions mais celles du parti que je représente. Je réaffirme que du point de vue de la CDPA-BT, l’adhésion à un parti politique doit se faire sur la base des idées de ce parti et non pas sur la base des hommes. Je n’ai pas adhéré à la CDPA-BT parce que mon cousin a pris la carte de ce parti ou que le leader de ce parti s’appelle M. Tartanpion. Je suis à la CDPA-BT parce que ses idées et sa pratique politique me paraissent bonnes. La CDPA-BT diffuse ses idées pour animer la vie politique nationale et offrir des possibilités de choix aux Togolais. Si un Togolais se retrouve dans ces idées et vient, pour cette raison, se joindre aux membres de ce parti pour faire avancer la lutte en cours et contribuer à l’organisation future du pays, je ne peux qu’en être heureux. Ceci n’est pas tirer la couverture à soi. Un vrai parti politique n’est pas un fonds de commerce. C’est un instrument collectif de transformation politique et sociale pour le progrès et une prospérité partagée.
Togoforum: Votre parti politique n’est pas moins élitiste. Il ne semble pas très connu de la population profonde. Pouvez-vous nous corriger sur ce point et présenter brièvement votre parti politique?
Pr. Gu-Konu: L’élitisme est une menace permanente. Surtout dans un régime obscurantiste où le niveau moyen de conscience politique est faible. Si notre parti est élitiste, il faut qu’il perde de plus en plus ce caractère. Il faut que tous ceux qui trouvent ses idées et sa pratique politique bonnes viennent y adhérer pour combattre cet élitisme et transformer l’organisation en un parti de masse. Parce que la CDPA-BT veut justement être un parti de masse et non un parti élitiste. C’est écrit en noir et blanc dans le préambule de ses statuts (cf. p.11). Nous ne pouvons pas combattre l’élitisme chez les autres et le cultiver en notre sein.
La CDPA-BT fut créée en mars 1990 par ceux-là mêmes qui avaient créé la CDPA en 1988 après une très longue période de réflexion et de lutte contre le pouvoir despotique. L’Alternative est sortie de cette réflexion comme base théorique pour éclairer l’action du parti. Si nous avons éprouvé le besoin de créer un autre parti à la place de la CDPA, c’est pour éviter que la lutte politique pour laquelle nous avons créé la CDPA comme instrument opératoire ne dérive sans cesse par rapport aux principes et aux orientations définis dans l’Alternative. En réalité, et pour être complet, avouons que si la CDPA continue d’exister aujourd’hui, c’est que des amis se sont saisis en 1991 de la coquille vide de ce parti pour y inscrire leur politique. Nous ne savions pas qu’ils allaient procéder ainsi.
La CDPA-BT s’était opposée à l’orientation électoraliste de la lutte à partir de janvier 1992 ; le drame de Soudou est une des conséquences de la pré-campagne engagée par certains partis sur la base de cette orientation. La CDPA-BT s’était élevée contre les « accords paritaires », parce qu’ils constituaient un pas en arrière, et parce qu’ils ont par ailleurs permis la violation de l’article 63 de la Constitution. La CDPA-BT s’était élevée contre le principe de la rencontre de Colmar ; elle a estimé qu’au lieu de se précipiter à Colmar, il fallait plutôt orienter les énergies sur la mobilisation populaire (cf. « Et maintenant… », février 1993). La CDPA-BT avait mis en garde contre les négociations de Ouaga ; elle a estimé que les « accords de Ouaga » allaient plutôt favoriser le régime et défavorisé l’opposition (cf. la réunion de Cotonou, Juillet 1993). La CDPA-BT avait prôné le boycott des présidentielles d’août 1993, parce que les conditions de préparation et de déroulement du scrutin ne pouvaient favoriser qu’une fraude massive au profit du candidat du RPT. La CDPA-BT avait recommandé le boycott des législatives de 1994, parce qu’elles allaient légitimer les présidentielles de 1993 dont la masse des Togolais avait clairement refusé les résultats frauduleux. La CDPA-BT avait, au sein du groupe des huit, estimé que les conditions n’étaient pas réunies pour que le scrutin des présidentielles de 1998 soit libre, équitable et transparent, en raison surtout de la nature et de la composition de la cour constitutionnelle, de même que celles de la Haute Autorité de l’Audio-visuel et de la Communication (HAAC) ; et qu’en conséquence, au lieu de se précipiter chacun pour se porter candidat avec ce désastreux esprit de rivalité entre partis d’opposition, il valait mieux organiser un boycott actif de ces élections sur la base d’une réorganisation préalable de ces institutions. La CDPA-BT avait refusé de participer au « dialogue intertogolais », parce qu’elle estimait dès septembre 1998, que l’idée de ce « dialogue » n’était qu’un moyen d’aider le régime à retomber sur ses fesses après le forfait du coup de force électoral, et que ce « dialogue » ne contribuerait pas à faire avancer la lutte pour la démocratisation du système politique dans le pays…
Togoforum: En fait, quelle différence existe-t-il entre la CDPA et la CDPA-BT? N’est-ce pas un paradoxe que deux partis politiques portent le même nom dans un même pays? CDPA: Convention Démocratique des Peuples africains.
Pr. Gu-Konu: Non. Ce n’est pas le même nom. La spécification Branche Togolaise fait une grande différence. Pas pour ce que vous pensez ; car, elle souligne au contraire la vocation régionale et africaine du parti, en ce sens qu’à la branche togolaise viendront s’ajouter d’autres branches au fur et à mesure que le parti s’implantera dans les autres pays d’Afrique de l’Ouest.
La CDPA avait été en effet conçue au départ sur le modèle du RDA (Rassemblement Démocratique Africain) des années 1946-1956. Elle devait être, non pas un parti national togolais, mais un parti régional ouest-africain, avec des branches dans chacun des pays qui forment aujourd’hui la CEDEAO (Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest). La CDPA-BT maintient cette approche régionale et entend s’y inscrire. Elle se propose comme le premier élément de ce parti régional en projet. Les problèmes de démocratie, les problèmes de développement comme les problèmes d’organisation de l’espace Ouest-africain sont en effet des problèmes régionaux. On les retrouve plus ou moins dans toutes les autres entités étatiques de cet espace balkanisé. Ils ne peuvent pas trouver de véritables solutions dans le cadre de chacun de ces micro-Etats. On ne peut les résoudre efficacement que si on les prend pour ce qu’ils sont en réalité, c’est-à-dire des problèmes dépassant les frontières de ces micro-Etats. Nous aurions pu donner des exemples précis pour mieux éclairer l’idée ; mais nous risquons de rendre l’interview trop longue.
Il est vrai que la ressemblance dans le nom a toujours constitué et constitue toujours une source de confusion dans les esprits. C’est un problème auquel le parti apportera une solution dès que les conditions seront réunies.
Togoforum: Votre parti politique n’a pas participé en 1991 à la conférence national du Togo. Aviez-vous anticipé sur les suites d’une telle rencontre? Etiez-vous certain que ces assises n’étaient pas dans l’intérêt du peuple? S’il vous plait, éclairez la jeunesse togolaise sur votre décision en 1991.
Pr. Gu-Konu: La CDPA-BT est parmi les partis d’opposition du pays le seul qui ait tenu son congrès statutaire avant la Conférence nationale. C’était du 1-3 mars 1991. Vous devez savoir que tous les autres partis d’opposition ne se sont créés qu’en avril 1991 quant le régime a fini par proclamer le multipartisme sous la pression de l’insurrection populaire. Et vous devez savoir aussi qu’aucun de ces partis n’avait tenu leur congrès statutaire avant la tenue de la Conférence nationale. La CDPA-BT était donc à la Conférence nationale.
Le parti avait largement débattu de l’opportunité de cette Conférence. Je vous renvoie à toutes fins utiles à notre déclaration N° 13 du 18 mai 1991: La CDPA-BT et la Conférence Nationale. Nous n’étions pas convaincus qu’elle allait donner ce que la conférence nationale béninoise a donné. Une des tendances du débat était que le niveau atteint par la lutte au Togo ne justifiait plus une conférence nationale, que celle-ci était déjà dépassée par le niveau d’efficacité atteint par la lutte, et qu’au lieu d’une conférence nationale, il valait mieux accentuer la pression populaire jusqu’à ce que le régime déjà par terre tombe définitivement. Mais une bonne partie des participants au congrès était fortement impressionnée par la Conférence nationale béninoise. Et l’opinion togolaise, dans sa quasi-totalité, espérait fortement qu’Eyadema allait partir à l’issue de la Conférence.
Le Congrès avait donc décidé que la CDPA-BT irait à la conférence pour contribuer au débat politique, l’éclairer autant que possible et faire ainsi avancer la lutte pour le changement démocratique. Nous étions donc à la Conférence nationale. Nous étions de ceux qui avaient soutenu l’idée de destitution, même si celle-ci ne devait être que symbolique. Notre représentant était membre du HCR. Ce à quoi nous avons refusé de participer, c’est le « dialogue intertogolais », parce que nous étions convaincus qu’il ne pouvait pas résoudre le problème politique togolais, et qu’il fallait au contraire accentuer la pression populaire sur le régime.
Togoforum: Votre conclusion, Professeur Gu-Konu
Pr. Gu-Konu: Il faut se battre ensemble pour faire avancer la lutte pour la démocratie au Togo et en Afrique. C’est une condition incontournable pour le développement et pour une prospérité partagée. C’est pour cela que chaque Togolais, chaque Togolaise doit se sentir concerné, si son pays lui tient à cœur, et apporter sa contribution, une contribution la plus concrète possible dans un cadre approprié qu’il aura choisi en toute liberté, en toute connaissance de cause et en fonction, non pas des hommes, mais des idées et des pratiques politiques en œuvre dans ce cadre. Une implication plus décisive et plus concrète de la diaspora peut jouer un rôle déterminant dans l’émergence de la force alternative dont il est question et contribuer à accélérer le processus du changement démocratique. Si tous les fils de ce pays venaient chacun boucher avec un doigt les trous de la jarre… Et ne l’oublions pas: L’oppression se nourrit du silence… et de l’inaction.
Déclaration de la CDPA-BT sur le drame survenu aux USA le 11 septembre 2001
(Convention Démocratique des Peuples Africains – Branche Togolaise (CDPA-BT), http://www.cdpa-bt.org, 18 septembre 2001)
Le nombre des victimes innocentes du drame du 11 septembre 2001 aux États-Unis d’Amérique ne cesse de s’élever, montrant ainsi l ‘étendue du malheur qui a frappé ce pays. Au nom du principe d’humanité et de solidarité, la CDPA-BT s’associe à la douleur du peuple américain et exprime aux familles éplorées sa tristesse et sa sympathie.
Les événements douloureux de New York et de Washington ont suscité une forte charge passionnelle dans les propos et dans les prises de position à travers le monde. La baisse progressive de cette charge émotionnelle fait remonter chaque jour des faits et des interrogations qui méritent un examen serein afin d’éviter d’accroître la grande confusion qui favorise le désordre mondial et ses conséquences désastreuses sur les hommes.
La CDPA-BT attire l’attention de l’opinion africaine et internationale sur l’empressement des régimes despotiques d’Afrique à tirer partie des campagnes anti-terroristes pour alimenter leurs propagandes mensongères, faire de leurs opposants politiques des «terroristes» et justifier leurs politiques d’oppression.
La CDPA-BT appelle l’opinion nationale et internationale à une grande vigilance contre une exploitation inadmissible du drame du peuple américain à des fins contraires à la liberté, à la justice et à la paix entre tous les peuples du monde.
Lomé, le 18 septembre 2001
Pour la CDPA-BT
Le 1er Secrétaire,
Prof. E. Y. Gu-Konu
Commentaire de la CDPA-BT sur la conférence de presse organisée par le comité de crise le 24 août au Foyer Pie XII
(Convention Démocratique des Peuples Africains – Branche Togolaise (CDPA-BT), http://www.cdpa-bt.org, 26 août 2001)
« Lors du meeting d’information organisé le 24 août 2001 par le comité de crise sur l’arrestation arbitraire de M. Agboyibo, la parole a été donnée à l’assistance pour recueillir son avis. Mêlant pêle-mêle les partis d’opposition, l’assistance a dénoncé sans détour la politique conduite jusqu’à présent par l’opposition. Ce qui s’est passé au foyer Pie XII est grave. Aussi, le premier secrétaire de la CDPA-BT a-t-il cru devoir en faire ce commentaire, pas seulement pour préciser la position de notre parti, mais aussi pour qu’un débat puisse s’organiser sur la politique d’opposition dominante conduite jusqu’à présent, et que ce débat parvienne à conférer une plus grande efficacité à la lutte pour le changement démocratique dans notre pays ».
1- Les interventions lors de la conférence de presse confirment le fait que dans leur ensemble, les Togolais ont tendance à mettre, d’un côté ce qu’il est convenu d’appeler «l’Opposition», et de l’autre, le reste de la population. Dans cette distinction, «l’Opposition» est généralement réduite aux partis d’opposition et à leurs responsables. Et tout se passe comme s’il revient à cette «Opposition» seule, et plus précisément aux responsables des partis d’opposition respectifs de «faire partir Eyadema», le reste de la population n’ayant rien d’autre à faire que d’attendre que le boulot soit fait.
Au sein de la population, ceux qui se sentent vraiment concernés par la lutte, et qui se décident à faire quelque chose, sont plus souvent tournés vers des actions individualistes du genre : écrire à titre individuel une lettre ouverte à Eyadema, écrire au Secrétaire général de l’ONU à titre personnel, ou s’adresser chacun de son côté à la communauté internationale, écrire des lettres ouvertes aux partis de l’opposition pour leur dire ce qu’ils doivent faire et leur relever ce qu’ils ne font pas ou font mal. Beaucoup d’autres attendent généralement la veille des élections pour se mettre à s’agiter dans tous les sens.
La majorité des Togolais se comporte ainsi comme s’ils ne sont pas directement concernés par la lutte contre le régime despotique, comme s’ils sont des étrangers vivant dans le pays, comme s’ils sont des observateurs neutres de la vie politique nationale, comme s’ils ne sont pas tenus de s’impliquer dans la lutte en cours pour la démocratie dans le pays, comme s’ils ont choisi de se mettre à l’abri de tous les risques, comme s’ils sont là chacun pour indiquer aux leaders politiques la voie à suivre, cette voie étant pour chacun sa propre voie individuelle, ce qu’il pense tout seul, avec la certitude catégorique qu’il a tout seul raison contre tous.
2- Ces attitudes s’expliquent par plusieurs raisons dont l’une des plus importantes est la marginalisation de la population par certains des leaders de l’opposition. Ceux-ci croient effectivement qu’ils sont chacun une sorte de messie ayant pour mission de sauver le peuple, et le font croire à ce dernier par tous les moyens. Ils sont sensés travailler pour lui. Ils sont convaincus d’être chargés (par qui?) de penser pour lui et d’avoir le droit de le faire à sa place. Le peuple lui, n’a donc rien d’autre à faire que d’attendre leurs mots d’ordre respectifs, et d’aller voter pour eux le moment venu.
Cette marginalisation est une des raisons essentielles de la faiblesse de l’opposition face au régime en place. Car, et on ne le dira jamais assez, la force de l’Opposition ne réside pas dans la tête et dans le porte-monnaie de ses leaders, si charismatiques soient-ils. Elle réside d’abord dans la force organisée de la masse du peuple, et dans la capacité de cette masse à se mettre en mouvement toutes les fois que cela s’impose, pour exercer la pression nécessaire en vue d’atteindre un but déterminé. Et organiser la masse du peuple pour en faire une force politique d’opposition relève avant tout du domaine des partis politiques d’opposition, et donc des directions de ces partis.
Il est vrai qu’organiser une masse populaire comme celle que constitue à l’heure actuelle le peuple togolais après plus de trente ans de cette dictature, n’est pas une tâche facile. Mais c’est une tâche historiquement incontournable. Et l’on est tenu d’en passer par-là, si l’on veut réellement changer le système politique actuel (et donc toute la politique de développement conduite jusqu’à présent), et si l’on veut que la direction politique nouvelle qui prendra en charge le pouvoir d’État après l’abolition du régime de dictature n’en soit pas chassée par la réaction néocoloniale trois mois plus tard! Car, ce n’est pas la «Communauté internationale» qui défendra demain le régime démocratique togolais s’il s’agit d’un régime véritablement démocratique. C’est avant tout le peuple organisé qui le protègera et le défendra, s’il s’y retrouve réellement. Et à condition qu’il soit organisé et qu’il représente une véritable force politique.
3- Ce qui s’est passé au Foyer Pie XII hier est un désaveu de la politique d’opposition conduite dans le pays depuis le lendemain de la conférence nationale. Ce désaveu appelle une réorientation sérieuse de la pratique oppositionnelle telle qu’elle est aujourd’hui, ou alors l’émergence d’une force alternative bien structurée et suffisamment cohérente pour pouvoir renverser le rapport des forces en le mettant et en le maintenant en faveur de l’opposition démocratique.
Or, toute réorientation de la politique d’opposition dominante est impossible dans l’état actuel de «l’opposition». Les leaders opposants qui tiennent les devants de la scène politique aujourd’hui sont convaincus depuis octobre 1990 que le moment est venu pour chacun d’entre eux de devenir un chef d’État ou, à défaut, d’exercer d’une façon ou d’une autre une parcelle du pouvoir, et de le faire avec le moins de risques possibles pour eux. Ils n’ont pas compris qu’il s’agit, avant toute chose, d’abolir le pouvoir despotique, et que c’était là la signification première et le but immédiat de l’insurrection populaire engagée dans la confusion en octobre 1990.
Voilà pourquoi ils ont toujours privilégié l’opposition élitiste par rapport à l’opposition de masse, la crédibilité politique extérieure par rapport à la crédibilité politique à l’intérieur du pays, la pression extérieure par rapport à la pression de la masse (qu’il faut organiser), les solutions électoralistes et les «dialogues» par rapport aux situations de blocage politique qui offrent à la masse du peuple l’occasion de se mobiliser pour intervenir sur la scène politique et peser sur cours de l’évolution. Il ne s’agit pas là d’erreurs politiques, mais de choix politiques dictés par des convictions profondes et par une manière de voir, même si, pour certains d’entre eux, ce choix est inconscient. Dans tous les cas, pour ces responsables politiques, il n’y a pas une autre politique d’opposition possible que celle qu’ils conduisent en ce moment. Mais celle-là conduit inexorablement vers une cohabitation voulue ou involontaire avec le régime despotique en place, élections ou pas.
Ce qui s’impose aujourd’hui plus qu’hier, c’est donc l’émergence d’une puissante force alternative regroupant tous ceux qui ne se retrouvent pas dans la tendance dominante de la politique d’opposition actuelle. Sans vouloir tirer la couverture à soi, il faut dire que la CDPA-BT avait ressenti la nécessité de l’émergence d’une telle force alternative dès décembre 1991 et avait engagé des actions difficiles dans cette direction (cf. La charte d’alliance de la CDPA-BT). Elle est revenue sur l’idée à plusieurs reprises: avant la signature des «accords paritaires», avant le départ pour Colmar, avant la signature des «accords de Ouaga», entre 1994 et 1996, pendant la campagne pour les présidentielles de 1998. C’est une satisfaction de constater qu’aujourd’hui l’idée fait son chemin dans certains milieux et pourra peut-être se concrétiser un jour.
Mais l’émergence d’une telle force alternative implique un lourd travail de terrain auquel tous les Togolais vivant à l’étranger et qui veulent réellement le changement du système politique peuvent (doivent?) apporter une contribution décisive. Je ne cultive pas le paradoxe.
Lomé, le 26 août 2001
Pr. E. Gu-Konu
1er Secrétaire de la CDPA-BT
Communiqué de la CDPA-BT sur l’incarcération d’Agboyigbo
(Convention Démocratique des Peuples Africains – Branche Togolaise (CDPA-BT), http://www.cdpa-bt.org, 10 août 2001)
La CDPA-BT déclare que ce que l’Opposition démocratique met en cause n’est pas le principe du respect d’une décision juridictionnelle, mais bien une justice aux ordres dont les décisions sont iniques, et dont les magistrats eux-mêmes bafouent sans cesse la procédure judiciaire établie…
Par sa lettre du 8 août 2001, le Ministre de l’Intérieur a interdit le meeting d’information projeté par l’Opposition afin d’informer la population sur le déroulement du procès intenté à Agboyibo, sur les conditions de son incarcération et sur les démarches initiées par le comité de crise pour la libération inconditionnelle du leader du CAR et pour l’annulation de toutes les poursuites contre lui.
La CDPA-BT déclare que les motifs invoqués par le Ministre pour interdire ce meeting ne sont pas valables. Ce que l’Opposition démocratique met en cause n’est pas le principe du respect d’une décision juridictionnelle, mais bien une justice aux ordres dont les décisions sont iniques, et dont les magistrats eux-mêmes bafouent sans cesse la procédure judiciaire établie, ouvrant ainsi à chaque fois la porte à l’arbitraire et à la manipulation des consciences.
La CDPA-BT se félicite donc de la détermination de l’Opposition à combattre l’arbitraire avec fermeté en maintenant le meeting du 11 août malgré les menaces inacceptables du Ministre.
Les actions en cours pour la libération immédiate d’Agboyibo font partie de la lutte légitime en faveur de tous ceux qui sont victimes de cette justice inique, et pour l’indépendance réelle du Pouvoir judiciaire au Togo. Elles participent à la lutte globale engagée par le Peuple togolais pour l’instauration des libertés démocratiques et le respect des droits de l’homme dans le pays.
En conséquence, la CDPA-BT invite ses membres et toute la population éprise de liberté à rester mobilisés, et à soutenir massivement les actions à venir pour la libération sans condition du leader du CAR.
Le destin de la lutte pour le changement du système politique dans le pays dépend de cette mobilisation massive.
Fait à Lomé, le 10 Août 2001
Pour la CDPA-BT,
Le Secrétaire
Pr. E. Gu-Konu
Allocution du 2e Secrétaire de la CDPA-BT au Conseil National de la CDPA-BT du 17 au 18 février 2001
(Convention Démocratique des Peuples Africains – Branche Togolaise (CDPA-BT), http://www.cdpa-bt.org, 8 août 2001)
« La situation confuse où l’on a fini par enliser la lutte pour la démocratisation, surtout depuis le coup de force électoral de juin 1998, à travers le processus du «dialogue inter togolais», impose plus que jamais un autre recentrage de la politique d’opposition conduite tout au long des dix années écoulées. Une tâche infiniment plus difficile qu’il y a dix ans. La confusion politique a, en effet, pris des proportions sans précédent et produit des conséquences désastreuses. Le découragement a brisé l’élan populaire. Le discours sur «l’éradication de la dictature» est devenu un paravent derrière lequel se sont cristallisés des enjeux sans rapport avec les aspirations des masses populaires. Les priorités de l’action politique sont désormais fonction d’intérêts antagonistes au sein de ce qu’il est toujours convenu d’appeler l’opposition. Pour nombre de chefs de partis de cette mouvance, le régime n’est plus aussi «diabolique» qu’on le disait à la conférence nationale…
Et pourtant, la situation politique n’a pas fondamentalement changé en bien. Le régime de dictature survit et se renforce au fil des «dialogues inter togolais» et des «accords paritaires». Les libertés conquises grâce à l’insurrection populaire d’octobre 90 sont restées fragiles, et constamment remises en cause. De grandes menaces pèsent sur le multipartisme, qui ne viennent d’ailleurs pas seulement du régime désavoué. La presse fonctionne sous un régime de liberté surveillée, avec un harcèlement continuel des directeurs de publication. La liberté d’expression en est sans cesse précarisée. Les média publics sont tout aussi confisqués qu’avant 1990 et, avec eux, la liberté d’informer et de s’informer. Les humiliations et les brimades d’hier se poursuivent. Les passagers des transports en commun sont toujours contraints de descendre et de traverser à pied les postes de contrôle plus que jamais multipliés sur les routes. Les chauffeurs sont toujours soumis aux rackets et aux abus de pouvoir… A la CDPA-BT, le changement pour nous, c’est aussi l’abolition de toutes ces pratiques qui rendent difficile la vie quotidienne du citoyen… »
Convention Démocratique des Peuples Africains – Branche Togolaise (CDPA-BT)
Courriel: cdpa-bt@lycosmail.com
Conseil national de la CDPA-BT – 17 au 18 Février 2001
(Convention Démocratique des Peuples Africains – Branche Togolaise (CDPA-BT), http://www.cdpa-bt.org, 20 juillet 2001)
Pour une Afrique libre et démocratique, pour une politique d’opposition cohérente et efficace.
La CDPA-BT a tenu son Conseil national les 17 et 18 février 2001 à Kpalime (Togo). Nous avons le plaisir de mettre sur notre site internet (http://www.cdpa-bt.org ) des extraits des documents dudit Conseil. Nous voulons, par ce moyen, informer tous les Togolais et, au-delà, tous ceux qui se préoccupent de l’avenir du Togo et de l’Afrique, pour leur permettre de mieux comprendre la situation qui prévaut dans ce pays, afin d’apporter leurs contributions pour faire avancer la lutte engagée par le peuple togolais depuis 1990 pour la démocratie et les libertés politiques. Mais pour plus de commodité, nous le ferons chapitre par chapitre jusqu’à la fin. Naturellement, les remarques et les suggestions seront toujours les bienvenues.
Allemagne, 20 juillet 2001
André Attiyé, CDPA-BT